Complexe Ibn El Khattab Rapprocher l'infrastructure sociale du citoyen démuni, voilà l'objectif du Centre social Omar Ibn El Khattab qui vient d'être créé il y a deux mois par la préfecture El Fida. Le centre accueille aujourd'hui près de 600 personnes et leur propose chaque jour différents services. Si vous demandez à n'importe qui où se trouve le complexe social du quartier Omar Ibn El Khattab, il pourra facilement vous l'indiquer. Pourtant, le centre ne date que de deux mois seulement. Néanmoins, les services et prestations proposés par cette structure ne laissent personne indifférent. Situé au quartier Derb Milan baptisé Omar Ibn El Khattab, ce centre qui s'étend sur une superficie de 1600 m2 a été réalisé et équipé par la préfecture El Fida Derb Soltane dans le cadre d'une politique, instituée depuis 4 ans déjà, par Aziz Dadès le gouverneur de la préfecture. Une politique dont le mot-clé est proximité et qui vise essentiellement la lutte contre la pauvreté, l'exclusion sociale et l'analphabétisme. Aménagé sur trois étages, le centre comporte plusieurs bureaux d'associations et d'ateliers destinés en premier lieu aux habitants issus de familles défavorisées, aux femmes au foyer, et bien sûr, aux handicapés et jeunes manquant d'espaces de loisirs. Ainsi au rez-de-chaussée, on trouve la réception pour orienter les visiteurs, deux bibliothèques avec une capacité d'accueil allant jusqu'à 120 étudiants et élèves et une salle pour les nouvelles technologies de l'information d'une capacité de cent places comprenant une dizaine d'ordinateurs, déjà opérationnelle depuis l'ouverture du centre. “ Cette salle a été créée essentiellement pour initier les jeunes aux nouvelles technologies de l'information et pour les familiariser avec ces appareils. Certes, nous n'avons pas encore une connexion Internet mais je crois que trois mois de formation ne seront que bénéfiques pour des jeunes de 16 à 20 ans qui n'ont encore jamais touché un clavier”, explique Mustapha Sardi, chef de la division sociale de la préfecture et responsable du centre. En effet, les jeunes semblent très satisfaits de cette formation jusqu'à présent. Cours d'alphabétisation Apparemment, ce ne sont pas uniquement les jeunes qui apprécient les services rendus par ce centre, mais aussi les femmes. En effet, la préfecture a consacré deux grandes salles au deuxième étage pour l'alphabétisation des jeunes filles et femmes au foyer. Une activité qui a connu un grand afflux de la part des habitantes du même quartier puisque 282 femmes viennent chaque jour assister aux cours, sans parler de celles inscrites sur la liste d'attente à cause de l'encombrement des neuf classes disponibles. Ce qui caractérise ces classes c'est surtout la volonté de ces élèves qui sont cependant très âgées pour cette appellation ! Habitant le quartier de Omar Ibn El Khattab, elles ont entendu parler du Centre par leurs voisins, leurs proches, ou bien on a directement frappé à leur porte pour les informer de la création de la structure, dans le cadre de la campagne qui a été initiée par la préfecture pour faire connaître le centre. Certaines ont été inscrites par leurs maris, d'autres ont fait le pas elles-mêmes et sont venues se renseigner, puis ont adhéré aux cours. Depuis, la plupart d'entre elles n'ont jamais raté une séance. L'âge ne les a pas empêchées de chercher la lumière du savoir. Aïcha est née en 1925, ses arrières-petits-enfants sont inscrits dans différentes facultés. Aïcha se déplace difficilement, les années l'ont affaiblie. Pourtant elle s'attache à réaliser son rêve. “ Je veux pouvoir lire les numéros des bus, les noms des rues et un peu de Coran. Mon fils a essayé de m'apprendre quelques versets en me demandant de les répéter après lui. Mais moi je veux pouvoir lire ! Je ne vous cache pas que je suis jalouse de mes petits-fils quand ils commencent à lire les spots publicitaires devant moi ! Maintenant, c'est eux qui m'aident à faire mes devoirs ! ” explique-t-elle. Aïcha n'a pas hésité à nous lire quelques phrases avec fierté pour nous montrer qu'elle commençait à lire. Les instituteurs du centre ne sont autres que les fonctionnaires de la préfecture de Mers Sultan et l'arrondissement d'El Fida. Ils sont six à avoir suivi un stage de formation spéciale pour pouvoir enseigner… Sensibilisation Le deuxième étage est dédié aux activités de sensibilisation des associations. Le centre SOS Hépatite auquel on a réservé une petite salle vise à informer les gens et leur expliquer la maladie et les étapes de son développement. Le même objectif est visé par le centre de diabète de l'enfant qui, en plus de la sensibilisation, propose des tests de dépistage aux visiteurs.Dans sa recherche d'une certaine complémentarité dans ses activités, le centre a même créé des ateliers de formation aux métiers de base. Actuellement, l'atelier de couture est déjà opérationnel, permettant ainsi à une cinquantaine de femmes de bénéficier de cours théoriques et pratiques.Certaines ont même réalisé quelques “travaux pratiques” comme des blouses d'école pour les élèves du primaire. Ce qui est remarquable, c'est que la plupart des adhérentes à cet atelier sont des jeunes filles dont l'âge ne dépasse pas 15 ans. Pour une raison ou une autre elles n'ont pas pu poursuivre leurs études, mais elles ont décidé de ne pas rater cette occasion pour se rattraper et se fixer un but dans la vie. Ilham habite la deuxième rue comme elle dit, un quartier tout près du centre. Cette fille de quinze ans a quitté l'école quand elle avait 7ans. “ Les problèmes familiaux m'ont empêchée de continuer ma scolarité, mon père battait ma mère. Ils ont fini par divorcer et ma mère a commencé à travailler comme bonne à tout faire pour subvenir à nos besoins. Je n'avais plus de but dans la vie. Je n'espérais plus rien…je me sentais perdue entre l'échec de mes parents et la souffrance de ma mère. Pouvoir m'inscrire à ce centre m'a donné une chance d'avoir une autre vie. Je pourrai enfin aider ma mère. Ensuite, j'aurai un métier qui me permettra d'avoir un peu d'indépendance et, qui sait, je peux devenir une fameuse couturière”. De grands rêves pour une petite fille. Des rêves qui peuvent très bien voir le jour. Les douze mois de formation que propose ce centre sont suffisants pour maîtriser ce métier. Les enfants ne sont pas exclus du programme. La préfecture a décidé que l'espace pour enfants soit indépendant du centre. Ainsi une petite crèche a été mise en place en dehors du centre avec une capacité d'accueil de 80 enfants. Actuellement, il existe deux classes permettant à une soixantaine d' enfants de bénéficier d'un programme qui s'étale sur deux ans. Le but est d'apprendre, d'une part aux enfants à lire et à écrire et les préparer pour l'école primaire. D'autre part, de créer un cadre adéquat pour leur épanouissement étant donné que leur âge ne dépasse pas quatre ans. Ceci en programmant des ateliers de dessin, de musique, d'activité orale…Zakaria, le frère jumeau de Mouhcine qui était assis juste à côté et tout content des ateliers de dessin libre, se dit artiste. Lorsqu'on lui a demandé ce qu'il faisait de son temps avant de venir à la crèche, il a répondu innocemment : “ Je jouais au foot avec mes amis dans la rue. Ici c'est plus drôle que la rue parce qu'on peut jouer, dessiner et chanter. En plus, l'institutrice est très gentille, elle nous donne des bonbons et du chocolat…” explique-t-il avec un large sourire. En effet, trois jeunes institutrices ont été mises à la disposition de la crèche pour encadrer les enfants au cours de leurs travaux. Ceci, toujours dans le cadre de la politique de proximité qui est le but essentiel du centre…