Entretien avec Rachid Hamdad, président de l'UACC (union des agences conseil en communication) Dans le cadre d'une volonté commune de transparence dans la diffusion des titres de presse, le groupement des annonceurs du Maroc (GAM) et l'union des agences conseil en communication (UACC) ont pris l'initiative de mettre en place des conventions avec les médias. Cela passe par une redéfinition des relations entre agences, annonceurs et médias. Interview avec le président de l'UACC. La Gazette du Maroc : votre initiative avec le GAM est venue pour redéfinir la relation annonceurs/agences/médias. Quelle est sa portée ? Rachid Hamdad : dans les métiers de la publicité, il y a plusieurs intervenants. Le point de départ est évidemment l'annonceur qui passe en principe par une agence conseil en communication, en vue de la réalisation de ses travaux. Ladite agence est le maître d'œuvre de la stratégie de communication et elle est, dans le même temps, pour la fonction achat, un intermédiare entre l'annonceur et les fournisseurs qui sont en aval (supports de presse écrite et audiovisuelle, imprimeurs, flasheurs, studios…). Il s'avère que dans cette intermédiation, il y a des questions d'argent qui peuvent entacher la transparence voulue par les uns et les autres. Car en facturant à l'annonceur, l'agence inclut, en plus du prix d'achat du fournisseur, une marge bénéficiaire. La règle veut que les choses soient transparentes et que la structure des coûts soit communiquée au donneur d'ordre. Ceci peut éveiller des soupçons, et nous sommes en train de mettre en place des conventions régissant la relation entre annonceurs, agences et médias pour clarifier au mieux les responsabilités des uns et des autres. Celles-ci incluent, en plus de la transparence des tarifs, la question des délais de règlement. En tant qu'intermédiaire, l'agence est prise en tenaille entre un annonceur qui la paye et un support qu'elle doit payer. Il faut clarifier aussi cette situation pour une bonne marche des travaux. Dans un autre volet, ce qu'on veut aussi apporter comme clarification, c'est la transparence des médias. Aujourd'hui, ni l'annonceur ni l'agence ne sont en mesure de déterminer la rentabilité de telle ou telle campagne publicitaire et ce, à cause du flou qui entoure les mesures d'audience. Nous voulons arriver à un point où l'on pourra indexer le tarif d'un support à une audience. A ce moment, nous pourrons apprécier ou déprécier les prix qui nous sont proposés par les supports. Ceci n'existe pas au Maroc. En quelque sorte, c'est un peu le sens de notre démarche vis-à-vis des supports de presse écrite avec lesquels on s'est engagé par le biais de la convention. A ce jour, seul un noyau de supports a répondu à notre appel, mais une bonne dynamique s'est enclenchée et un grand nombre de supports sont maintenant candidats à la signature. Comment sera définie cette structure de contrôle de diffusion. Reproduira-t-elle le schéma de l'OJD ? Cette structure, qui doit être l'arbitre et juger du bien-fondé et de la véracité des informations communiquées, reste à mettre en place. Au niveau de notre association, nous avons formulé un vœu et nous avons mis en marche la machine. Evidemment, nous allons veiller à une indépendance totale dans l'action de cet organisme de contrôle de diffusion. Pour ce qui est de l'OJD, nous n'avons aucune objection pour que l'organisme de contrôle marocain suive ses traces. Ce que nous exigerons en fin de compte, ce sont des comptes certifiés par un organisme expert. Qu'en est-il de l'audiovisuel ? Nous sommes actuellement sur un projet de convention qui concerne l'audiovisuel : entre les chaînes de télévision, les régies, les agences et les annonceurs. Nous espérons être prêts pour la rentrée. Au niveau des procédures, les choses sont claires. L'annonceur est celui qui finance. L'agence est mandatée pour concevoir sa campagne et la mettre en œuvre en impliquant plusieurs intervenants externes. Quand elle a affaire à des supports médias, elle doit s'adresser aux régies. En gros, chaque intervenant est tenu de se concentrer sur son métier de base. En parallèle, nous avons un projet ambitieux qui consiste en la mise en place de l'audimat. La libéralisation du paysage audiovisuel s'accompagnera par l'émergence de nouveaux supports (chaînes et radios). Si nous n'avons pas un instrument de mesure, il est impossible de prendre une décision réfléchie et d'évaluer l'impact des campagnes que nous lançons. Reste la question du financement. Nous avons proposé, au ministère de la communication, lors des journées de réflexion sur la réforme de l'audiovisuel des 20 et 21 avril, en convergence avec le GAM, à ce que le revenu de la taxe d'écran que nous payons (5%) soit reversé en totalité au financement du projet de l'audimat. L'enveloppe globale qui est de 25 millions de dirhams par an nous paraît suffisante. Lors des journées de réflexion sur la réforme de l'audiovisuel et de la presse, ce sont des questions qui ont été posées et qui ont été reprises dans le plan d'action. Ce qu'on veut en termes clairs, c'est mettre en place des outils de régulation du marché. Les questions financières dans la relation annonceur/agence/médias ont été bien régies par la loi Sapin en France. Pourquoi ne pas envisager un arsenal juridique qui protège les intérêts des uns et des autres ? Il y a un processus que nous tenons à respecter. Nous sommes pleins de bonne volonté. Il est vrai que nous avons toujours des difficultés avec certaines personnes qui ne réagissent pas, mais c'est un travail de longue haleine. Au sein de l'association UACC, nous n'avons pas non plus toutes les agences de la place qui sont adhérentes. Nous sommes en train de mettre en place des règlements. Ne seront membres de l'association que ceux qui remplissent certaines conditions. Cette définition deviendra le standard du marché. Je veux dire par là que même les agences qui ne sont pas membres de l'association seront confrontées en allant vers les régies… à cette réglementation. Quelque part, le marché va se réguler selon la base qualitative que nous allons mettre en place. La loi de la concurrence fera son travail et ne résisteront que ceux qui répondront à certains standards. Il y va de la responsabilité de l'annonceur de choisir celui qui ne respecte pas les critères et il aura les méthodes de travail qu'il méritera. L'objectif arrêté c'est que cette autodiscipline devienne une mécanique reflexe. Si les choses évoluent dans le sens qu'on veut, par la signature de la convention, une régie devra automatiquement refuser un annonceur qui veut acheter de l'espace, si le budget de celui-ci est géré par une agence. Ou bien si l'annonceur n'a pas d'agence, la régie doit lui conseiller d'en chercher une. Et c'est valable aussi pour l'agence si elle est prise en défaut pour une raison ou pour une autre. Peut-on espérer une transparence totale dès 2004 ? Je pense qu'on va aller de l'avant dès la rentrée prochaine avec l'audiovisuel. La convention est prête. Par ailleurs, nous devons également rencontrer les afficheurs, les producteurs et les régies. Enfin, nous souhaitons que chaque corps de métier dispose d'une association professionnelle qui puisse défendre ses intérêts. Avoir un interlocuteur unique ne fera qu'aider à faire avancer les choses rapidement.