Abdelhamid Amine, président du réseau national d'opposition à la loi anti-terroriste En marge de la conférence de presse organisée à Rabat par le réseau national d'opposition à la loi anti-terroriste, nous avons rencontré Abdelhamid Amine, le militant marxiste-léniniste, président de l'AMDH et de ce réseau qui milite pour le retrait pur et simple du projet gouvernemental. Amine a répondu à nos questions sans ambages. La définition du terrorisme telle qu'elle se présente dans le projet gouvernemental est effectivement très extensive et imprécise. Ceci s'illustre dans la série des délits et crimes prévus dans le code pénal marocain et qui ont été hissés au niveau des crimes terroristes. De même que le projet a inclus des actes relevant de la liberté d'expression dans la case terroriste. Ainsi, toute propagande, publicité, approbation publique ou une simple assistance sont devenues des actes terroristes. Si, par exemple, j'étais témoin, de ta réaction approuvant telle ou telle action jugée terroriste par les autorités et si je ne t'avais pas dénoncé, je serai considéré automatiquement comme complice dans une action terroriste. Cela dit, je dois être franc pour dire que le problème de la définition alternative du terrorisme nous importe peu pour le moment. En effet, notre priorité, actuellement, est de faire en sorte que le projet du gouvernement soit retiré. Pour le reste, nous espérons ouvrir un large débat national pour aller au fond des choses. Nous estimons, cependant, que le gouvernement a fait dans la précipitation pour préparer son texte pour le faire adopter au plus vite lors de la session extraordinaire. Si nous nous étions penchés sur la définition du terrorisme, cela nous aurait coûté beaucoup de temps et le gouvernement nous aurait pris de court. C'est pour cela que notre priorité est de freiner ce processus pour annuler ce projet dangereux. D'ailleurs, ce projet est, à mon avis, beaucoup plus dangereux que le sinistre dahir de 1935. Ce dernier prévoyait des peines d'emprisonnement pouvant atteindre 5 ans, alors que celui-ci impose même la peine capitale. En fait, ce projet de loi ne vise pas à lutter contre le terrorisme et ne vise pas à protéger les populations. C'est un texte qui terrorise le peuple en mettant des épées de Damoclès sur les têtes des gens. Vous savez, maître Nouidi qui était conseiller juridique de Abderrahman Youssoufi, avait dit que le gouvernement marocain avait présenté un rapport complet à la commission de lutte antiterroriste du conseil de sécurité en avril 2001, dans lequel le Maroc avait souligné que son arsenal juridique était doté de tous les moyens de lutte contre le terrorisme. Que s'est-il passé après cela pour que notre pays change de position ? Nous estimons que les conséquences des événements du 11 septembre ont fait que l'administration américaine vise à imposer aux pays d'instituer des législations qui protègent les intérêts des Etats-Unis. Pourquoi donc le Maroc n'avait rien prévu de tel dans le projet de code de procédure pénale qui a été adopté récemment ? Que s'est-il passé au juste ? Nous croyons que depuis, le Maroc a connu un processus d'enlèvements qui a été dénoncé en son temps par toutes les forces vives de la nation et que certaines victimes ont même menacé de décréter une grève de la faim pour dénoncer les enlèvements et les séquestrations. Qu'a fait le gouvernement pour mettre fin à ce processus et aux atteintes aux droits de l'Homme ? Rien, sinon et au lieu de faire respecter les droits de l'Homme, il a présenté un projet de loi qui vise à légaliser les atteintes aux droits fondamentaux des personnes. Ainsi, les prévenus peuvent être gardés 14 jours en détention préventive et les autorités peuvent perquisitionner à tout moment et en dehors des horaires légaux. Les avocats de la défense ne peuvent pas assister leurs clients tout au long de la détention préventive et ainsi de suite. Donc, nous nous trouvons devant des procédés terroristes qu'il faut dénoncer avec vigueur. Notre pays n'a nullement besoin de cette loi. Son arsenal juridique est suffisamment doté de dispositions de lutte contre le terrorisme. Il est vrai que certaines actions terroristes ont eu lieu, mais notre pays en a été épargné. Certains actes isolés et limités ont été enregistrés, mais il ne faut pas en faire une raison pour l'adoption d'une loi spéciale anti-terroriste. Il n'y a au Maroc aucun vide juridique dans ce domaine.