Pour répondre à toutes les questions brûlantes du Maroc actuel, nous avons préféré en référer à l'expertise d'une palette de spécialistes qui n'ont pas hésité à se prêter au jeu de bonne grâce et surtout sans langue de bois à nos confrères VH magazine. Ce ne sont ni des vedettes politiques,ni des stars dubusiness. « Force est de constater que la société n'en est pas plus juste, l'économie plus performante et les gens plus civiques » Le Maroc a changé. Le royaume bouge. C'est certain. Bien des citadelles sont tombées, à commencer par la chape de plomb qui pesait sur les initiatives politiques, économiques ou tout simplement civiques. Malgré cela, force est de constater que la société n'en est pas plus juste, l'économie plus performante et les gens plus civiques. Ce qui fait que de nombreuses questions d'une urgence réelle se posent aujourd'hui dans un climat de surchauffe sociale. Traquer efficacement les poches de pauvreté, est-ce vraiment possible ? Sur cette problématique brûlante d'actualité, les uns choisissent de tirer à boulets rouges sur les chefs d'entreprises « peu scrupuleux » ou les autres chargent le gouvernement de tous les maux. D'un autre côté, le chômage massif des jeunes, une sous-classe de nouveaux postulants à l'emploi, remet à l'ordre du jour une flexibilité concoctée à la sauce locale. Les machineries administratives sont là, lourdes qui tournent toujours à vide. Ce qui nous ramène à la question centrale de l'école. Comment finir avec la ségrégation scolaire ? Le rêve de l'école pour tous est battu en brèche par l'inégalité des chances de réussite. Aux beaux quartiers, les établissements de l'excellence, aux autres, l'école à bon marché, les trous à rats et les instituteurs blasés. Avec à la clé, un échec scolaire garanti. Si les gens ont besoin de travailler et leurs enfants d'étudier, ils ont également besoin de se loger aux meilleures conditions. Pour briser les ghettos des bidonvilles, de l'habitat précaire, autant ne pas se faire trop d'illusions, la hausse des prix de l'immobilier et son corollaire, l'exode rural, risquent de durer encore un temps. Autant dire que le programme « villes sans bidonvilles » relève beaucoup plus du voeu pieux. Réhabiliter l'impôt ? Dans un pays où personne ne trouve indécent de frauder le fisc, réhabiliter l'impôt sonne comme une provocation, comme une tentative de faire saigner encore plus les « pauvres » patrons alors qu'en réalité, ce sont plutôt les petits, les salariés qui sont eux, ponctionnés à la source. Depuis plusieurs décennies, les patrons n'ont cessé de réclamer la baisse de l'impôt sur le revenu grâce à un chantage à l'emploi d'un goût plutôt douteux. Pour doper l'investissement ? Non, tout simplement, pour se remplir encore plus les poches. Nos experts, eux rappellent que le pays peut faire l'économie d'une fiscalité plus citoyenne, plus juste. En baissant par exemple la TVA, celle qui frappe tous les citoyens, quels que soient leurs revenus et en s'attaquant à une refonte globale qui permette d'élargir l'assiette de façon juste et progressive. Quelle stratégie adopter alors pour promouvoir les droits de l'homme, revoir la croissance à la hausse, présenter un système scolaire performant ou encore imaginer des niches d'emploi pour les diplômés chômeurs ? Croire que la vérité se trouve plutôt dans l'action du gouvernement, c'est oublier qu'elle est aussi sur le terrain des luttes du dernier des citoyens lambda. Quels sont donc les nouveaux fronts, les combats à mener en priorité ? Pour répondre à toutes ces questions brûlantes d'actualité, nous avons préféré en référer à l'expertise et au savoir-faire d'une palette de spécialistes qui n'ont pas hésité à se prêter au jeu de bonne grâce et surtout sans langue de bois. Ce ne sont ni des vedettes politiques, ni des stars du business. Mhamed Hammadi est docteur d'Etat, enseignant dans plusieurs universités prestigieuses au Canada, en France, aux Etats- Unis. Houssaini Taj Eddine est avocat à la cour suprême, il fait partie de plusieurs think thank internationaux. Abdelhamid El Jamri, spécialiste en ingénierie de projets est un expert reconnu auprès de nombreuses instances internationales. Karim Tazi, le patron de Richbond, très actif dans l'humanitaire, l'homme est notamment le fondateur de la fameuse banque alimentaire. Quant à Tahar Benjelloun, sa carrière d'auteur à succès parle largement pour lui. L'essentiel de cette démarche consistant à faire de ces modestes propositions matière à débat, pour une ébauche ( il est permis de rêver ) d'un vrai projet sociétal national. Administration Dégraisser le mammouth Houssaini Taj Eddine 1. Il faut donner à l'administration les moyens de travailler correctement. Par exemple, la Justice a commencé son informatisation. Mais ses fonctionnaires ne sont pas bien formés pour répondre aux besoins des citoyens concernant les jugements rendus, les actes en délibération, les plaidoiries et les conclusions des parties adverses.. Les citoyens doivent pouvoir obtenir un certificat de résidence, une attestation de travail… sur place et, mieux encore, par Internet. Mohamed Hamadi Bekouchi 2. Concernant la nomination aux postes de commis de l'Etat (ONCF, RAM, OCP, ONEP, ONE...), les trois prétendants finalistes doivent passer des auditions publiques devant une commission (jury) composée de parlementaires, de personnalités qualifiées et de décideurs économiques et sociaux. Abdelhamid El Jamri 3. On observe aujourd'hui, qu'une minorité de fonctionnaires veut le changement et fait tout pour le réussir. Il faut repérer cette minorité, l'encourager et la responsabiliser au sein de l'administration. Karim Tazi 4. Exiger des services de l'Etat qu'ils répondent systématiquement, rapidement et de manière formelle à toute question de droit posée par un citoyen ou une entreprise. Les administrés devront avoir le droit de se prévaloir de cette réponse devant les juridictions jusqu'à ce qu'elle soit remplacée par un acte réglementaire. Lutte contre la corruption Commissariat royal anticorruption Houssaini Taj Eddine 5. La lutte contre la corruption doit commencer au niveau de l'école primaire, puis au niveau des lycées et de l'université. Ce qu'on appelait « l'éducation civique », qui a disparu de nos programmes scolaires doit revenir. Elle peut jouer un rôle déterminant. Mohamed Hamadi Bekouchi 6. Lancement d'une campagne médiatique permanente de mise en garde contre la corruption en partant de situations vécues… en premier lieu par les décideurs politiques, économiques et commis d'Etat. 7. Des sanctions lourdes, depuis les pénalités financières jusqu'au suivi judiciaire, doivent être prises contre les corrompus et les corrupteurs. 8. Un Commissariat royal anti-corruption doit être créé. Tahar Ben Jelloun 9. Le citoyen ne doit plus céder aux pressions pour devenir un corrupteur. Quant à l'Etat, il doit absolument payer décemment ses employés pour éliminer le prétexte de la corruption. Le civisme, l'éducation, le sérieux, c'est ce dont nous avons besoin pour lutter contre la corruption avec, évidemment, une justice indépendante et intègre. Croissance Réveiller l'esprit d'entreprise Abdelhamid El Jamri 10. Le seul moyen, en l'absence de richesses naturelles abondantes, est de continuer à soutenir le pouvoir d'achat des populations les plus démunies par la compensation, tout en mettant en place des mécanismes pour que de gros groupes industriels ne profitent pas de cette compensation. 11. Pour agir sur les salaires, la solution passe par l'augmentation de la compétitivité de notre économie et donc, la croissance. Pour ce faire, il faudrait agir sur les ressources humaines, notre principale richesse, mais qui connaît actuellement des insuffisances dans sa qualification, tant au niveau quantitatif que qualitatif. Agriculture Ne tirez pas sur les paysans Abdelhamid El Jamri 12. Reconnaître définitivement que le Maroc est un pays semi-aride. 13. Inciter les paysans à aller vers de nouvelles cultures moins consommatrices d'eau et vers « l'industrialisation » de leur production. Houssaini Taj Eddine 14. Aujourd'hui, on est surtout dépendant de l'étranger… On ne produit pas suffisamment de denrées alimentaires essentielles. L'Etat doit imposer un nouveau code de l'investissement dans le domaine agricole pour pouvoir au moins satisfaire les besoins essentiels du pays. La FAO a constaté que les denrées alimentaires ont connu, entre 2007 et 2008, une augmentation qui dépasse 40%. C'est une sonnette d'alarme pour les pays comme le Maroc. On ne pourra plus se permettre, à l'avenir, le luxe d'importer du blé et autres céréales à des prix convenables. Investissements Haro sur l'économie de rente Houssaini Taj Eddine 15. L'Etat doit instaurer un régime fiscal propre à encourager l'investissement intérieur. Ça n'a pas de sens que les investisseurs marocains restent cantonnés au secteur de l'immobilier et autres domaines de l'économie de rente. Il faut encourager l'économie productive, autrement dit l'économie industrielle. Le code d'investissement marocain, qui date de 1995, doit être réformé afin de donner à ceux qui produisent le plus la capacité de travailler : exonérations d'impôts portant, entre autres, sur le nombre d'emplois créés, octroi de primes d'investissements. Mise à niveau Soyons plus agressifs Houssaini Taj Eddine 16. Avec la création de zones de libreéchange avec l'Union européenne, les Etats-Unis, la Turquie et certains pays du Moyen-Orient, nous avons les conditions idéales pour être agressifs. C'est une très bonne expérience qu'il nous faut exploiter pour notre développement économique. Le revers de la médaille, c'est que le Maroc va davantage être confronté au défi de la compétitivité concernant ses produits industriels. Et, malheureusement, l'industrie marocaine n'est pas prête à y faire face. Maghreb Diplomatie parallèle Houssaini Taj Eddine 17. Il faut réouvrir les frontières entre le Maroc et l'Algérie. L'économie des deux pays paie très cher la fermeture actuelle, surtout celle du Maroc. Au niveau du taux de croissance, on perd au moins un point par an. 18. La création d'un Grand Maghreb économiquement fort est nécessaire. Les étapes sont l'établissement d'une zone de libre-échange, une union douanière, puis la création d'un marché commun. C'est une nécessité pour pouvoir être en position de force dans notre dialogue et nos négociations avec nos partenaires européens, surtout après la proposition du président français Nicolas Sarkozy de créer une union méditerranéenne. Enseignement Ecoles de proximité Mohamed Hamadi Bekouchi 19. Fusion des universités en cinq grands pôles Recherche - Développement - Innovation. 20. Déconcentration des facultés et des grandes écoles 21. Mettre l'accent sur le développement personnel, la formation aux métiers prisés et émergents et à la culture générale. 22. La direction doit être assurée par un binôme : un manager chargé de l'organisation et des P.R. et un scientifique en charge de l'aspect pédagogique et de la recherche & développement. 23. Des moyens consistants doivent être dégagés pour des programmes pluriannuels de recherche et d'innovation. Formation Droit de regard Karim Tazi 24. Rétablir l'autonomie budgétaire des établissements de formation professionnelle de l'OFPPT. 25. Renforcer très substantiellement l'autonomie budgétaire des universités en adoptant le principe du contrôle à posteriori. 26. Etendre les formations professionnalisantes à la quasi-totalité des filières universitaires et tendre vers la suppression pure et simple des filières en totale inadéquation avec les demandes du marché du travail. 27. Faire évaluer chaque école et chaque université par une autorité indépendante du ministère, tenant compte entre autre, de l'avis des élèves, de leurs résultats, de leur évolution à moyen terme. Pour ce qui est des Universités, l'évaluation devra tenir compte de la participation effective, la réussite aux examens, l'employabilité des étudiants et la recherche académique. 28. Rétablir la cogestion des établissements de formation professionnelle avec les professionnels des secteurs concernés Fiscalité Réhabiliter l'impôt Karim Tazi 29. Donner à la Direction Générale des Impôts les moyens humains et matériels de lutter contre le secteur informel organisé et d'élargir l'assiette fiscale en vue d'une réduction de la pression sur les entreprises transparentes. 28. Réduire le délai de remboursement de la TVA aux PME à 10 jours. L'administration fiscale doit rembourser dans les 10 jours la TVA aux PME, sauf interrogation motivée sur un risque de fraude. En cas dedépassement, l'administration fiscale sera pénalisée selon les mêmes modalités que celles appliquées aux entreprises du privé. 29. Simplifier la comptabilité des PME. pour s'orienter vers une comptabilité de trésorerie pour toutes les PME dont le chiffre d'affaire annuel ne dépasse pas les 10.000.000 de DH. Recherche et développement Ramener nos cerveaux Abdelhamid El Jamri 30. Réformer l'université de sorte qu'elle soit capable de mettre en place de la recherche. Cela passe par la mise en place d'un programme important (et du budget qui va avec) de R&D, incluant des bourses pour les jeunes chercheurs, des partenariats au niveau international… 31. Renforcer des programmes comme le FINCOME et faire profiter l'économie marocaine de l'expertise des Marocains de l'étranger. Champ religieux Des mosquées plus intelligentes Mohamed Hamadi Bekouchi 32. Création de « mosquées intelligentes », des espaces de prière, de savoir et du commerce avec ateliers d'écriture et de lecture, services de traduction, mini-bibliothèques, kiosques, ateliers d'artisanat en rapport avec la vie de la mosquée (babouches, djellabas, reliure, écrivain public), café, restaurant. Par cette stratégie, la mosquée sera autogérée et l'Etat réduira ses subventions, lesquelles pourront être investies dans l'alphabétisation et la formation des gens aux métiers : écrivains publics, conteurs… Santé Médecins managers Mohamed Hamadi Bekouchi 33. Les hôpitaux doivent être dirigés par des managers et non par des médecins. 34. Les cliniques doivent comporter au minimum 5 médecins spécialisés permanents ayant plus de cinq ans d'expérience et trois fois plus d'infirmiers permanents qu'actuellement, pour se voir attribuer l'agrément. Emploi Plus de plombiers Mohamed Hamadi Bekouchi 35. Le travail manuel doit être revalorisé, par exemple à travers des spots publicitaires soulignant qu'il y a un déficit chronique dans ce secteur d'activités qui exige des travailleurs et des travailleuses qualifiés portant des tenues professionnelles et travaillant dans des chantiers modernes en toute sécurité. Abdelhamid El Jamri 36. Mettre en place des dispositifs d'adaptation des qualifications des chômeurs diplômés et d'accompagnement à l'emploi. 37. Changer la stratégie de l'ANAPEC en la faisant agir prioritairement sur le demandeur d'emploi pour le rapprocher de l'emploi Politique Retraite anticipée pour les dinosaures Mohamed Hamadi Bekouchi 38. L'âge maximum pour un président ou une présidente de parti politique doit être fixé à 60 ans. 39. Les membres du bureau politique d'un parti doivent effectuer trois mandats au maximum. 40. Dès 2008, les instances dirigeantes des partis politiques doivent inclure au moins 30% de femmes et 25% de jeunes de moins de 30 ans. 41. Institution des normes juridiques, sociologiques et statistiques pour éliminer les partis insignifiants (- de 5 parlementaires, par exemple). Tahar Ben Jelloun 42. Il faut que les responsables prennent des initiatives et ne pas attendre que l'ordre vienne d'en haut. Karim Tazi 43. Fixer au moyen d'une loi organique le nombre de ministres. Une douzaine au minimum et une vingtaine au maximum. Un gouvernement pourra ensuite compter autant de ministres délégués et de secrétaires d'Etat que souhaité. La même loi organique pourra fixer le nombre de directions d'administrations centrales de chaque ministère. Accidents de la route Permis psycho-médical pour chauffeurs fous Mohamed Hamadi Bekouchi 44. La circulation doit être interdite de façon permanente dans les quartiers commerciaux très fréquentés, durant les heures de grandes affluences. 45. Des « villes pilotes » doivent être choisies afin d'être le terrain d'expérimentations innovantes dans le domaine de la prévention routière et dans la lutte contre les drames de la route. 46. Une campagne de prévention « hard » doit être lancée sur les méfaits de l'alcool au volant. 47. Les journées de travail quotidiennes des chauffeurs de taxis, de bus de villes et intervilles, ainsi que des chauffeurs-routiers ne doivent pas excéder huit heures, compteurs de contrôle à l'appui. 48. Les chauffeurs doivent être titulaires d'un permis psycho-médical et faire l'objet d'un contrôle annuel. Culture Valoriser la jeunesse Abdelhamid El Jamri 49. Il faut considérer que la culture est un facteur de développement humain et lui donner toute sa place dans le budget de l'Etat, en l'optimisant autour d'un programme utile et réaliste. Il faudrait diminuer les activités trop coûteuses et souvent sans intérêt réel. 50. L'accès à la culture doit faire partie de notre vie de tous les jours, à commencer par la valorisation de notre patrimoine et par le développement et la valorisation générationnelle, notamment ce que produisent les jeunes Marocains. Tahar Ben Jelloun 51. Il faut aborder dans les grands médias certains sujets tabous comme l'inceste, la pédophilie, le suicide, les femmes battues, l'alcoolisme, etc. 52. Avoir de l'imagination, encourager les enfants à user et abuser de leur imagination, donner la priorité à la création, à l'art, au patrimoine et apprendre à nos enfants que nous devons respecter nos racines et les protéger éternellement. Faire vœu d'humilité dans tout ce que nous entreprenons. Ressources énergétiques Partage des eaux Abdelhamid El Jamri 53. Les nappes ont atteint des niveaux très bas dans le Sud du Maroc alors qu'au Nord, des volumes importants d'eau finissent dans l'Atlantique. Des études doivent être lancées pour voir la faisabilité de les récupérer au profit des régions qui en manquent. 54. Développer une stratégie énergétique qui prend en compte, à la fois, la réalité des richesses naturelles marocaine et la situation de ces richesses dans le monde. 55. Développer la sensibilisation et mettre en place des dispositifs draconiens en vue d'économiser l'eau, que ce soit au niveau du consommateur ou des professionnels des secteurs de l'industrie, du tourisme, de l'agriculture… Karim Tazi 56. Mettre en oeuvre un plan national d'énergie solaire et éolienne. 57. Assurer à l'horizon 2020 l'approvisionnement en eau potable de toutes les villes côtières par désalinisation d'eau de mer. 58. Adapter le code de l'urbanisme pour favoriser le solaire et la construction bioclimatique. Précarité Traquer les poches de pauvreté Abdelhamid El Jamri 59. Il faudrait une étude d'envergure sur ce qui produit la pauvreté en vue d'agir sur les « robinet » (le flux) et, en même temps, de traiter l'existant (le stock) par des réformes de fond et des programmes d'aide à l'insertion sociale et d'amélioration des conditions de vie des populations les plus démunies. 60. La lutte contre la pauvreté ne doit pas être de type caritatif, mais doit agir sur les liens sociaux et sur la reconsidération de la personne, en vue de devenir actrice de sa réinsertion. 61. Les politiques publiques doivent passer de la prise en charge à la prise en compte des populations pauvres. Droits de l'Homme Place aux droits économiques Abdelhamid El Jamri 62. Les droits de l'Homme ne se limitent pas à la relation du citoyen avec l'autorité. Aujourd'hui, l'Etat et les associations de défense des droits de l'Homme doivent s'inquiéter des nouvelles exactions que subit le citoyen marocain dans ses difficultés à se loger, dans sa relation avec sa banque, dans son surendettement, dans la scolarisation de ses enfants, dans la cherté de la vie… Tahar Ben Jelloun 63. Le respect des droits de l'Homme commence à la maison ; donner l'exemple chez soi pour mieux faire respecter les droits de la personne dans le travail, dans l'administration, dans la relation avec l'autre. Salaires Sus aux patrons négriers ! Karim Tazi 64. Briser le tabou du SMIG. Il faut mettre un terme à l'hypocrisie qui caractérise la rémunération des travailleurs non qualifiés au Maroc. Rapprocher le taux officiel du taux réel permettrait de ramener un plus grand nombre de salariés dans le formel, de les faire bénéficier d'un minimum de protection sociale, d'encourager la création d'emplois et de décourager le mouvement de délocalisation. 65. Relever les seuils des tranches supérieures de l'IR (impôt sur le revenu). En effet loin d'être un véritable impôt sur le revenu, l'IR n'est en réalité rien d'autre qu'une taxe supportée par les entreprises sur les salaires qu'elles versent. Le niveau élevé de cette taxe a un effet pénalisant sur le recrutement des cadres moyens et supérieurs. Un relèvement des seuils de l'IR aurait enfin l'immense mérite d'augmenter le pouvoir d'achat des classes moyennes marocaines. Houssaini Taj Eddine 66. Le déséquilibre entre les denrées de base et le niveau des salaires est tel qu'il faut indexer les salaires sur l'inflation pour ceux qui ne touchent que le SMIG. INDH L'arme du micro-crédit Houssaini Taj Eddine 67. Le Maroc a beaucoup perdu en raison de « l'ajustement structurel ». Ceci est en relation avec l'éducation, la santé et le niveau social. Je pense que l'INDH peut jouer un rôle important, même si les résultats pour le moment, sont maigres. Tous les pays qui ont réalisé un niveau de développement et de croissance très élevé, le doivent non pas à leurs richesses naturelles, mais grâce à leur matière grise : le Japon, la Corée du Sud… Abdelhamid El Jamri 68. Il faudrait, en plus de la nécessité d'une bonne conception d'un projet ou d'un programme, renforcer les capacités institutionnelles et opérationnelles des ressources humaines qui en ont la charge. Notamment en ce qui concerne l'évaluation des projets. Urbanisme Verrouiller les cahiers de charge Karim Tazi 69. Pour mettre un terme au phénomène d'extension incontrôlé des grandes agglomérations au détriment des terres cultivables et agricoles, accroître la hauteur autorisée des immeubles, tout en s'efforçant de préserver des espaces non construits, en particulier des espaces verts. 70. Donner aux gouverneurs le pouvoir de relever d'autorité le coefficient d'occupation des sols (COS) s'il est manifestement insuffisant. 71. Encadrer plus strictement le pouvoir d'appréciation discrétionnaire des gouverneurs dans la décision d'accorder le concours de la force publique pour exécuter les décisions de justice relatives aux non paiement des loyers, particulièrement dans le cas de baux commerciaux. Gouvernance Une gestion déverrouillée Karim Tazi 72. Transférer au Conseil de gouvernement une partie importante des prérogatives du Conseil des ministres. 73. Renforcer considérablement le Secrétariat général du gouvernement en expertises juridiques nationales et Internationales, en échange d'une obligation de célérité dans le traitement des projets de lois. 74. Simplifier l'organisation gouvernementale. Les ministres sont trop nombreux, ce qui crée ainsi les conditions de conflits contribuant à la paralysie gouvernementale. En cas de compétences partagées, désigner un ministre chef de file. Nouvelles technologies Le web pour tous Abdelhamid El Jamri 75. Les cybers sont partout, les promotions des abonnements Internet et des ordinateurs suivent la tendance mondiale à la baisse, mais la qualité de l'utilisation des NTIC laisse à désirer. Il faudrait généraliser la connexion à l'école et éduquer pour une utilisation culturelle et scientifique. 76. Le développement des NTIC est une chance, pour les pays du Sud, d'accéder au savoir. Malheureusement, leur utilisation reste très limitée à ce niveau-là, que ce soit par les étudiants, l'université, le centre de recherches… Les professeurs universitaires doivent donc s'ouvrir à ces technologies. Civisme Aux balais citoyens ! Abdelhamid El Jamri 77. Elle nécessite des mécanismes, qui peuvent être incitatifs, aux niveaux fiscalou juridique, et concertés, notamment le principe d'entreprises citoyennes ou d'entreprises socialement responsables. Dans le système de passation des marchés publics, on pourrait proposer d'intégrer la notion du mieux-disant social. Tahar Ben Jelloun 78. Apprendre le civisme, c'est-à-dire apprendre à vivre ensemble. 79. Apprendre à être ponctuel, à respecter parole donnée ; changer notre relation avec le temps et avec l'espace. Il faut être précis. 80. On dit que le Marocain est propre chez lui et sale dehors. N'insistons pas là-dessus, mais le respect de l'environnement est loin d'être une préoccupation du Marocain. Sahara Ces sahraouis, nos frères ! Abdelhamid El Jamri 90. Deux sociétés en une. L'une se méfie de l'autre et ignore sa culture, ses habitudes… Il est urgent de mettre en place des actions de cohésion sociale dans les provinces du Sud. Des programmes culturels, pour mieux se connaître et mieux s'apprécier, sont plus que recommandés ainsi que la formation des cadres de l'Etat en place à l'histoire du Sahara, à sa culture, à sa langue. Karim Tazi 91. Faire de la Région l'acteur majeur d'une politique de décentralisation audacieuse. Les régions doivent être renforcées significativement dans leurs compétences (développement économique, formation professionnelle, éducation, santé). Houssaini Taj Eddine 92. Une décentralisation régionale s'impose. Le système d'autonomie qui va s'appliquer au Sahara peut avoir un impact dans le sens de davantage d'autonomie pour les autres régions du Maroc. Des villes comme Agadir ou Marrakech ne devraient pas être obligées, pour chaque acte administratif, de se tourner vers le ministère concerné, à Rabat. Il est temps de donner plus de liberté de mouvement aux services décentralisés, de leur donner les moyens de travailler et bien sûr, des moyens de contrôle a postériori.