La création de l'espace de dialogue de gauche à Casablanca, intervient au moment où la question de la balkanisation et de l'effritement des partis de la gauche est à l'ordre du jour. Les échéances communales imposent aujourd'hui plus que jamais, de nouvelles alliances de gauche. Plusieurs militants de gauche de Casablanca, appartenant à des sensibilités différentes, ont lancé depuis peu, un espace de réflexion sur leur unification. Les initiateurs de ce projet aspirent à ouvrir le dialogue pour leur rapprochement, dans l'horizon de l'unification de l'action de la gauche en général. La première activité de cet espace, a été l'organisation d'une table ronde élargie, le 15 avril dernier, au siège régional de l'USFP aux Habous, sous le thème évocateur : Qu'est ce que la gauche aujourd'hui ? La direction du débat a été confiée à Mohamed El Aouni, membre du bureau politique du PSU. Un signe d'ouverture, quand on sait le degré de crispation qui existait jusque là entre l'USFP et le PSU. Au fur et à mesure des débats et de ses développements, l'espace déterminera la nature des dossiers et axes autour desquels s'articuleront ses futures activités. L'action est louable et a été saluée par les différentes composantes de la gauche.A Rabat où le PPS et FFD avaient organisé le 18 avril dernier une rencontre autour du même thème, les leaders des partis de la gauche : le PPS, le FFD, l'USFP, le PSU et le CNI ont tous été unanimes sur l'urgence de la concrétisation de cette initiative, qui tarde toujours à venir. Une feuille de principes... A partir des recommandations de l'appel de Bouznika, formulé le 20 janvier dernier, à l'université d'hiver organisée par le courant Action Démocratique du Parti Socialiste unifié, appel signé par la majorité des composantes et sensibilités de la gauche marocaine. Cette rencontre avait adressé un appel à « l'institution d'un espace libre et organisé entre toutes les composantes de la gauche, qui consolidera le militantisme commun sur le terrain à l'horizon de la refondation de la gauche, du dépassement de la réalité de son émiettement et du renforcement des dynamiques unionistes entre ses composantes, dans le sens de l'élaboration d'un projet sociétal de la gauche marocaine basée sur un nouveau contrat politique et social ouvert sur toutes les forces démocratiques ». Dans cette optique, un groupe de militants a initié l'organisation de rencontres, dans le but de concrétiser cet appel sur le plan local. Ils ont convenu de présenter une feuille préliminaire visant l'organisation du débat et le classement des priorités et ce, dans l'horizon de l'élaboration d'une charte de dialogue de gauche. 3 questions à Mounir Bensaleh* «Cet espace est un appel à tous les gauchistes» La Gazette du Maroc : Pourquoi un espace de dialogue de gauche à Casablanca? Mounir Bensaleh : Après une longue histoire d'émiettement de la gauche marocaine, aujourd'hui on sent que toutes les sensibilités de gauche conviennent de la nécessité d'une union. Ce constat partagé par la majorité des militants, s'est accentué depuis les dernières législatives. Dans cet esprit, et dans cette période, plusieurs rencontres d'appareils ou de militants ont été tenues pour penser à la réunification : Conférence de la Fondation Abderrahim Bouabid. Consultations des Bureaux Politiques des formations de gauche, appel de Bouznika de l'université d'hiver, organisé par le courant act démocratique / PSU, coordination d'Agadir des bureaux régionaux de gauche et la coordination de Casablanca des instances régionales. Sans oublier les différents débats lancés au sein de toutes les formations de gauche. A partir notamment de l'appel de Bouznika, où nous avons convenu de lancer des «espaces de dialogue locaux en vue d'un espace national de dialogue de gauche», nous, militants de Casablanca, avons pris l'initiative de concrétiser cette recommandation. L'Espace de Casablanca pour le dialogue de gauche, se veut une initiative fédératrice des militants dans la région, en vue de réfléchir collectivement aux problématiques de la gauche et de son union. Votre initiative est-elle une action locale ou bien aspire-t-elle à fédérer d'autres initiatives dans d'autres régions ? L'initiative est une concrétisation locale de l'appel de Bouznika pour l'action commune de gauche. Nous travaillons à rassembler des militants de la région de Casablanca, ceux qui croient en la nécessité de l'union de la gauche marocaine, partisans ou «indépendants», en vue de lancer de fortes initiatives visant l'organisation d'espaces et rencontres libres de débat et de dialogue sur la base de l'acceptation de la différence, le pluralisme et la partance de la relativité de la vérité. Ensuite penser à des initiatives pratiques, allant dans le sens de relier la gauche à ses bases populaires, de rendre aux mouvements sociaux leur expression politique avancée et dans le sens de la participation à l'abolition des freins qui rendent les mouvements sociaux à caractère défensif limités. Nous allons aussi contribuer au dépassement des difficultés qui entravent l'action commune entre les composantes. Ceci étant, nous suivons de près les initiatives similaires qui sont lancées dans plusieurs régions : Rabat, Meknes, Agadir, Tetouan, ... et partageons notre pratique. Reste quand même, que Casablanca a une symbolique particulière pour la gauche marocaine, mais les espaces régionaux sont pour l'instant indépendants et font l'objet d'initiatives personnelles des militants. L'unification de la gauche est-elle un voeu pieux, un slogan ou bien une stratégie pragmatique électorale qui tente de ne pas répéter les échecs de la gauche aux échéances de septembre 2007 ? Pour l'espace, il est important de noter les missions que les militants lui ont assignées : «Cet espace ne remplace pas le travail des appareils partisans de la gauche. L'appartenance à cet espace est personnelle et libre. C'est une appartenance à un espace ouvert à tous les gauchistes des différentes positions, y inclus les gauchistes non organisés, convaincus des principes susmentionnés. Cet espace est un appel à tous les gauchistes convaincus de l'importance du travail commun et unioniste de la gauche. Pour les échéances électorales, les appareils partisans à Casablanca ont concrétisé une coordination de 6 partis de gauche, afin d'élaborer des programmes communs, le cas échéant coordonner les actions. Nous encourageons vivement cette démarche fédératrice, mais notre appartenance à cet espace est libre, et ne remplace aucunement le travail des appareils. Mais nous pensons aussi à la participation effective dans la revalorisation et le rayonnement des valeurs de gauche, dans la refondation d'une relation équilibrée, effective et démocratique avec les mouvements sociaux et la revalorisation du savoir et de la théorie socialiste dans le travail politique de gauche. * Initiateur de l'espace de la gauche à Casablanca Ingénieur, membre du secrétariat régional de l'USFP à Casablanca