Préparation de gâteaux de tous genres, achat d'ustensiles de cuisine ou de nouvelles machines électroménagères. Le Ramadan marocain est indéniablement le mois de tous les caprices. La saison estivale touche à sa fin et nos familles ont la chair de poule et le rouge aux joues dès qu'on commence à parler de budget spécifique à un tel évènement. Cependant, entre offres électroménagères alléchantes et récolte alimentaire frénétique les cœurs des familles balancent, et leurs poches aussi ! Il est grand temps de commencer les préparatifs du sacré Ramadan». Penseraient tout naturellement beaucoup d'entre nous. Et c'est bien logique, puisque la tradition a toujours voulu que le Ramadan marocain soit un mois de dépenses et non seulement un mois spirituel. Toutefois, il n'est pas question qu'un foyer marocain se démarque de la règle au nom de la sobriété et de la raison. Car les plaisirs ramadanesques sont irremplaçables. «Il n'y a qu'un seul Ramadan par an et il est hors de question que je me prive de quoi que ce soit, ou que j'empêche ma famille de jouir pleinement de ce mois sacré. Et étant donné que je travaille, cette année je ferais vite de préparer le gâteau au miel (chebbakia) avant la rentrée, même si cela va me demander beaucoup de temps, d'argent et d'énergie. Car je préfère tout ce qui est fait maison», nous révèle Batoul mère de deux jeunes filles. Cette jeune professeur d'espagnol nous rappelle également que ce mois doit impérativement se préparer bien avant son arrivée. «Même si je n'étais pas fonctionnaire, je n'abandonnerais pas mes habitudes, car il faut vraiment être taré pour attendre que le mois de Chaâbane se termine pour commencer les préparatifs du mois sacré. Et puis le comble, c'est que les grandes surfaces ne ratent pas cette occasion pour nous soutirer nos sous. Personnellement, ce ne sont pas les réductions sur l'électroménager qui m'attirent, mais plutôt la récolte de la nourriture que je me procure un mois d'avance». Comme des fourmis, pendant le mois de Chaâbane, toutes les familles marocaines, aisées ou à salaire limité, se précipitent de remplir leurs réfrigérateurs de tout ce qui chatouillerait leur nez. En ce mois de septembre, c'est une véritable course contre la montre. Certaines familles justifient cette frénésie par la peur de risquer une pénurie alimentaire au moment où l'on s'y attend le moins. La récolte du Ramadan D'autres se méfient plutôt d'une probable hausse foudroyante des prix de certains produits alimentaires nécessaires pour la préparation de la fameuse harira. Les dattes étant très consommées à l'heure du f'tour, subissent aussi les foudres des vendeurs. «Je ne tombe pas facilement dans le piège du marketing vu que je m'empresse toujours de faire le plein de concentré de tomate, de dattes, sans oublier le miel, et ce, bien avant la fin de l'été. Ainsi, je n'aurai pas à me plaindre, contrairement à un grand nombre de mes collègues», nous avoue la jeune professeur.Pourtant, il y a aussi celles qui ne sont aucunement contrariées par ces éventuelles mauvaises surprises. Celles-ci, on risque de les croiser quotidiennement pendant le Ramadan, juste avant la rupture du jeûne, devant les épiciers en train de se bousculer pour acheter l'incontournable concentré. Cela devient vite lassant. En plus, ces retardataires sont, bien évidemment, la cible idéale du marketing. L'électroménager a la côte Du côté des grandes surfaces, l'achat bat son plein. Les caissières se frottent les mains en admirant la grande queue de clients à la recherche de la perle rare, et les conseillères n'ont aucun complexe à vous coincer dans un labyrinthe pour vous «conseiller» la cuisinière du mois qui coûte deux fois moins sa valeur. Seul hic : Les clients ont l'embarras du choix et ne savent plus exactement que choisir. Ainsi, casseroles, bols, cocottes, ou lots de verres se vendent comme des petits pains, les cafetières, elles, ont majestueusement la côte. Et curieusement, les récepteurs numériques sont, eux aussi, très vendus en cette période de l'année. Cela pourrait se justifier par le fait que les supermarchés-nombreux qu'ils sont-nous obligent à acheter ce dont on n'a pas vraiment besoin et nous tendent comme seul appât, des réductions bien appétissantes. Ou bien ils nous exhorteraient de cette manière à boycotter les chaînes nationales et à n'avoir d'yeux que pour les chaînes étrangères ! Bref, On doit désormais s'attendre à tout de la part des supermarchés locaux et de leurs offres. Astucieuse, Aicha, une jeune fonctionnaire publique, profite de ces réductions pour arrondir ses fins de mois. Exemple à suivre ? : «je pense que c'est un vrai cadeau que les grandes surfaces nous font en ce moment. Il ne faut pas qu'on soit bernés par ce que les autres pensent de ces réductions. Pour moi, c'est l'occasion ou jamais pour m'approvisionner en tout ce dont ma famille a besoin à des prix réduits. Donc, ce n'est pas le ramadan qui me fait acheter de nouveaux appareils électroménagers», Justifie-t-elle. Cependant, la fin du Ramadan ne mettra pas fin à toutes les dépenses, car ces dernières se verront bientôt enchaînées par un autre budget tout aussi gourmand. Il s'agit de celui de la fête de l'Aid-Es-Seghir. budget scolaire Une rentrée ramadanesque Nous ne vous apprendrons rien en vous disant que ce Ramadan est spécial, du fait que cette année, mi-septembre, coïncide avec la rentrée scolaire. Les familles se mettent alors en quatre pour concilier les deux budgets, sans faire de sacrifices pour autant. Sachant aussi que le ramadan sera suivi d'une grande célebration religieuse, à savoir, la fête de la rupture du jeûne, l'Aïd-es-Seghir. Ainsi, le double dilemme est partagé par tous les foyers : Se contenterait-on d'un minimum de préparatifs ramadanesques en privilégiant la rentrée de nos rejetons, ne serait-ce qu'on pensant à l'Aîd pour compenser ? Ou bien irait-on jusqu'au bout en profitant pleinement des trois plaisirs, même si cela coûtera les yeux de la tête ? Quoi qu'il en soit, cette rentrée scolaire promet d'être aussi sobre que longue!