C'est un secret de polichinelle : une femme seule dans la rue est une proie facile pour les dragueurs. Sans merci, les femmes, de tous les âges, sont traquées depuis leur premier contact avec le monde extérieur. Souvent elles le sont même chez elles par de mauvais voisins, ces petits curieux qui trouvent du plaisir à voler des regards au-delà des vitres, si ce n'est dans les escaliers. Zoom sur une pratique mal vue mais bien courante. Fatima Ezzahra, Maria et Hajar, trois jeunes mousquetaires qui luttent constamment pour un peu de respect. Un droit qu'elles perdent à chaque fois face à des individus peu commodes: les dragueurs. A chacune des trois Casablancaises, comme toutes les autres marocaines, tous les âges confondus, ses propres malheurs, sauf que l'ennemi est commun : «des hommes qui sortent de nulle part et qui croisent ton chemin demandant un rendez-vous ou un numéro de téléphone», dixit Samira, esthéticienne au Prince Moulay Abdellah, à Casablanca. Fatima Ezzahra, une autre jeune casablancaise, arpente, quant à elle, quotidiennement le fameux quartier Mâarif. Elle n'y peut rien, car elle y habite depuis bien longtemps. Du haut de ses 1.80 mètres, elle possède ce qu'on qualifie de taille de guêpe. Elle se fait belle rien que pour sa satisfaction personnelle sans cibler ni prince charmant ni personne d'autre d'ailleurs, tout ce qu'elle fait c'est pour son bien être. Son attitude ne lui apporte que des ennuis. Chose qu'elle avoue avec aigreur : «je suis fatiguée de ces dragueurs assidus qui me harcèlent quotidiennement». D'après elle, «cela devient vraiment pesant surtout lorsqu'ils passent à l'action. Les poursuites vite transformées en injures deviennent mon calvaire quotidien du quel je ne peux échapper». Faire face à l'ennemi Comme Fatima Ezzahra beaucoup de jeunes femmes appréhendent la fréquentation de certains quartiers de peur d'être gênées, harcelées voire châtiées d'avoir décidé de sortir de chez elles, leur quotidien s'apparente au chemin du combattant au point que certaines d'entre elles ont décidé d'adopter un autre comportement. Maria en est une. A peine 23 ans, cette jeune étudiante ne mâche pas ses mots. Elle est très sûre d'elle et sait très bien remettre ces harceleurs à leur place. Sa méthode personnelle? «Quand un garçon me pourrit la vie en me suivant ou en me lançant des phrases plus ou moins vulgaires je le fixe droit dans les yeux d'un air hautain, je ne lâche surtout pas le regard et j'attends que le con de service baisse les yeux ou disparait complètement de mon champ de vision» Et poursuit avec la même certitude «en plus je n'ai aucun complexe à être aggressive ou froide voire glaciale avec les Tom Cruise en herbe!» Effectivement, des Tom cruise en herbe! Que ce soit le jeune lycéen de 16 ans, le septagènaire au bord de la tombe ou l'éternel-futur immigré adepte du nos-nos à longueur de journée, ils deviennent pratiquants d'une séduction… souvent ratée! Néanmoins, toutes les jeunes femmes ne seraient pas «volontairement séductrices» beaucoup auraient la séduction dans les gênes. Hajar est victime de sa belle chevelure. Elle abhorre être suivie dans la rue et elle ne supporte pas non plus que quiconque l'arrête pour lui demander l'heure qu'il est, vu que ce pretexte est archaïque d'un demi-scièle. Et n'allons pas jusqu'à réveiller cette jeune étudiante en médecine de ses beaux songes, car le prince charmant, elle y croit dur comme fer. Les hommes ne seraient donc pas tous «dragueurs». Le croquis de l'homme de ses rêves? Elle l'esquisse ainsi: «Mon genre d'homme est le type inexpérimenté, j'aimerais qu'il soit timide et qui ne sait ni quand ni comment aborder une femme, c'est tellement charmant. Ces hommes existent partout mais malheureusement ils restent invisibles car ils ont beaucoup de mal à s'identifier». Mais où se cacheraient-ils dirait-on? Une hypothèse: Ils seraient tellement timides qu'ils ne sortent pas de chez eux! Quant aux hittistes, ceux qui peuvent s'adosser contre un mur pendant de longues et chaudes heures sans rater aucune «minette», ils sortent volontiers. Ceux-ci sauraient même deviner le nombre des passantes, les marques de leur vêtements, leur tranche d'âge et et le prénom de leur arrière grand-mère s'il le faut, comme quoi la drague peut vite devenir une activité aussi amusante qu'enrichissante pour nos chômeurs. Toutefois, Entendons-nous bien, il n'y a pas que les hittistes qui s'adonnent à cette pratique peu originale. Beaucoup d'intellectuels s'y mettent avec grande joie, tel un passe-temps. Drague : mode d'emploi Cependant, chaque hobby aurait ses règles, ses astuces. Ce jeune ingénieur nous en dit plus : «personnellement, je pratique la séduction naturelle sans détours ni artifices, de cette manière je montre le chemin à la fille qui m'intéresse, comme ça elle seule pourra décider si elle voudrait bien s'aventurer ou non, car je n'aime surtout pas m'imposer…» Mais des fois notre ami ne peut pas s'empêcher de succomber au charme de certaines séductrices «j'avoue aussi que des fois je deviens la victime de mon propre piège, mais je ne baisse pas les bras, bien au contraire, je joue à fond le jeu : Je pèse mes mots et je cible mon objectif!» Il y aurait aussi une autre catégorie de séducteurs, celle des «dragueurs sages» Ce sourire timide, ces yeux rieurs, c'est Omar, un jeune fonctionnaire de 35 ans. Ce jeune célibataire endurci est devenu un professionnel de la séduction. Car selon ses dires l'art et la manière s'apprennent tout naturellement avec le temps et tout vient à temps à celui qui sait attendre. «Beau gosse malgré lui» dirait-on de prime abord, vu son air timide et sa voix presque inaudible, mais puisque les apparences sont bien souvent trompeuses, on lui donnera le soin de se décrire lui même. «Je suis ce qu'on appelle un homme heureux au jeu mais oh combien malheureux en amour! C'est bien grâce à cela que j'ai appris à laisser mes sentiments au frigo avant de sortir de chez moi, car cela ne mène à rien sinon à la mouise». Il nous révèle pourtant qu'il a toutes les filles à ses pieds, alors qu'il ne s'est jamais tué à en aborder une seule! Son astuce? Rester positif, sûr de soi et feindre l'indifférence totale. «Je pense à ces pauvres messieurs qui se coupent en quatre pour aborder une femme. Ceux-là ne savent nullement séduire! Ils ignorent que la meilleure façon de s'approcher d'une femme c'est de la fuir, sinon c'est elle qui te fuit» Nous apprend il. De plus, son palmarès en femmes est beaucoup plus riche que celui de Raphael Nadal en matchs gagnés en tennis! Comblé qu'il est, il doit ce succès non seulement à son indifférence, mais aussi à sa galanterie “Chaque année je fais la connaissance de beaucoup de jolies créatures. J'en connais une dizaine. Et pour moi le bonheur en matière de séduction c'est justement cela, ne jamais tomber amoureux, il suffit d'être galant et interessé” Ce phénomène aurait tout d'une manoeuvre universelle. Mais quand cela frôle le harcèlement et la débauche, ses causes deviennent tout simplement de mauvaises excuses. Car bon nombre de jeunes filles gênées par ce genre de lourdes taquineries, seraient même prêtes à porter le voile non par pure conviction religieuse, mais rien que pour fuir ces moments déplaisants. Alors facilitons le quotidien de nos soeurs au lieu de leur rendre la vie impossible, ne serait-ce que pour leur témoigner de la sympathie!