Quelle stratégie opposer au choc de libre-échange? Le rapport récemment élaboré par la fondation CGEM sous le signe «Les grands scénarios de la CGEM pour une croissance économique efficace» recèle un trésor de recommandations dont l'application n'aura selon toute vraisemblance d'autres effets que d'engouffrer notre économie dans une brèche salutaire. C'est une étude qui éclaire d'une lumière crue les grands métiers sur lesquels devraient se focaliser la future politique économique pour aboutir à un équilibre entre l'absorption du chômage, la réalisation d'une croissance économique suffisante et l'opposition d'une résistance aux chocs externes notamment celui du libre-échange. Huits métiers y sont recensés : les dérivés du phosphate, le tourisme, les produits alimentaires, l'industrie de l'habillement, les composants automobiles, les composantes électroniques, les télé-services et l'exporatation de services économiques. Aux yeux des technocrates de la fondation il faut chercher le surcroît de croissance annuelle nécessaire dans de nouvelles exportations, susceptibles, selon leurs estimations, de générer environ 7 milliards de dirhams de PIB additionnel chaque année. Le Maroc devrait ainsi focaliser son énergie sur les produits à fort potentiel pour instaurer le socle de croissance rendu nécessaire et barrer la route aux chocs externes engendrés par le libre-échange. Si ces sources de croissance supplémentaires qui devraient accompagner la mutation de l'économie viennent à faire défaut il y a péril en la demeure. En d'autres termes la baisse programmée des barrières douanières conduira à un déséquilibre commercial insoutenable, sauf si la politique économique change de cap. Pour mieux appréhender la réalité économique, l'équipe en place s'est mise à retraiter les différents postes constituant la Balance commerciale élargie. Il en est ressorti que les exportations correspondent à des savoir-faire, des métiers, des expertises disposant d'atouts comparatifs par rapport aux territoires concurrents. Mais pour avoir une meilleure visibilité sur la matrice des exportations, les analystes ont tâché de reclasser les ventes de biens et services du «Territoire Maroc» par métiers. S'agissant des importations, le reclassement par métiers a, par définition, moins de pertinence du fait d'une diversification progressive des importations lors de l'entrée dans une zone de libre-échange. Les statistiques disponibles ont permi aux conjoncturistes d'obtenir des séries homogènes pour les exportations et importations à partir de 1992, date à laquelle les marchandises en Admission Temporaire ont pu être réintégrées dans les chiffres des importations et des exportations. Si l'on considère les exportations, il apparaît que celles-ci réalisent une progression tendancielle modérée au cours des dernières années. En effet, entre 1992 et 1999, la croissance moyenne de ces exportations s'établit à +7,3% l'an. Il faut dire que l'un des métiers mondiaux, le tourisme qui a connu un rebond considérable après la guerre du Golf et l'attentat de Marrakech, a contribué à accélérer la croissance annuelle des exportations de la balance commerciale élargie depuis 1996. En effet, les recettes en devises du tourisme ont progressé de 17,9% l'an, passant de 11,7 milliards de dirhams à 19,1 milliards de dirhams entre 1996 et 1999. Le reste des exportations ne progresse que de 5,6% sur la même période, rythme insuffisant pour compenser l'accélération programmée des importations.