Lamia Miriam Skiredj s'est imposée comme une valeur sûre de la peinture marocaine après une succession d'expositions toutes aussi remarquées les unes que les autres. Aujourd'hui, elle met en scène ses derniers travaux sous le signe de l'abstraction. "J'ai abandonné l'apparence naturelle des choses, et je mets de plus en plus l'accent sur l'expression plastique des rapports. Exprimer plastiquement par l'opposition des couleurs et des lignes. Je cherche un équilibre dynamique entre les verticales et les horizontales. La verticale est l'échine de la vie dans l'espace, l'axe de toute construction». C'est en substance ce que nous dit l'artiste peintre en résumant ce virage important dans sa carrière. On a souvent eu affaire à des œuvres ancrées dans le figuratif, une étape dans la peinture de Miriam Skiredj qui a abouti, naturellement, au besoin de l'abstraction. Le sujet devient alors la couleur en ses formes, la lumière que dégagent les multiples facettes des couleurs. Entre lignes et formes, entre lumière et son absence, la peinture se décline en sujet d'elle-même. On le sentait déjà dans cette période dite figurative du peintre. Son approche de la couleur avait cette particularité de dépasser l'ornement, l'épithète de l'objet. Elle était déjà un approfondissement du sujet, un travail de modelage de la nature même de l'objet peint. «La couleur dorée signifie, pour moi, l'énergie. Toutes les couleurs ont une vibration et la couleur dorée est la plus haute de vibration dans les couleurs. Une vibration de pureté mélangée à celle de l'amour. Cette lumière dorée qui nous enveloppe et apaise nos craintes et nos angoisses. Il s'agit de restituer la vibration de l'âme, cet invisible que sont nos pulsions, nos affects, notre force». Ce sont les sinuosités des sens qui président aujourd'hui au travail de Lamia Miriam Skiredj. Cette recherche de la vibration s'inscrit dans un processus de découverte continue du champ infini de l'expression par la couleur. On se rend très vite compte que la couleur dans les derniers travaux de Miriam Skiredj est aussi musique. Tonalités des formes, présences du coloris. Comme un rythme, un vibrato où l'instrument qui fournit le son est aussi le sens même de ce qu'il révèle. C'est à cet instant précis que la toile, son espace en fait, devient le lieu d'une interaction entre le glissement vers la sonorité et la distanciation par rapport à l'objet donné à voir. Le peintre a cette capacité d'octroyer à l'espace cette notion de temporalité qui réside dans la lumière qui sous-tend les relations entre les différentes zones du tableau. À la fois puzzle, échiquier et surface infinie pour que l'œil ne s'arrête jamais à ce qui semble délimité. La peinture de Miriam Skiredj est à la fois tendre, riche en contrastes et surtout fluide. Une lecture simple qui, par moments, pousse l'amateur à réfléchir sur le rapport à l'objet, la lumière, son absence et les multiples interprétations des sens. Exposition de Lamia Miriam Skiredj, à la galerie Alif-Ba à Casablanca. Du 8 au 30 juin 2006