Dans son intervention au colloque sur le pilotage des finances publiques il y a quelques jours à Rabat, le Pr Mohamed Rahj, ancien président de l'université de Settat, avait suscité des éclats de rire de l'auditoire en estimant que « le seul indicateur macroéconomique qui s'est amélioré cette année est notre classement Fifa, le Maroc étant passé du 72 au 71e rang ». Pourtant l'état des finances publiques (à fin août) que vient de publier la Trésorerie Générale du Royaume (TGR) laisse entrevoir quelques (petits) motifs de satisfaction pour les pouvoirs publics. Les décaissements au titre de la compensation sont en recul : 3,2 milliards de dirhams en moins depuis le début de l'année. Ces économies s'expliquent pour l'essentiel par un baril du pétrole qui était bien plus bas il y a quelques mois qu'aujourd'hui. Sauf événement spectaculaire qui embraserait les prix pétroliers, les crédits budgétaires dédiés à la compensation devraient rester dans les prévisions (50 milliards de DH). L'autre motif de satisfaction est à chercher dans la résistance de la TVA, l'un des rares impôts avec l'IR sur salaires à échapper au coup de froid sur les recettes fiscales observé depuis deux ans. Le rendement de la TVA se stabilise (-0,3%) au moment où l'assiette des produits pétroliers à l'import qui le dopait jadis s'est considérablement contractée. A noter aussi cette évolution, peut-être, un tournant. Pour la première fois en effet, c'est le produit de la taxe sur la valeur ajoutée à l'intérieur, en hausse de 1,4% depuis janvier, qui devient la locomotive des rentrées de cet impôt. Certes, il faudra observer la tendance sur la durée afin de tirer des conclusions, mais cela traduit, a priori, un certain élargissement de l'assiette et donc le recul de la fraude qui frappe particulièrement cette taxe. Les contrôles sur pièces ciblant la TVA seraient plus efficaces probablement, et cela est lisible à travers les données relatives aux majorations de retard. A fin août, le Fisc a déjà encaissé près de 940 millions de dirhams, un chiffre en augmentation de 20%. Dans un contexte de contraction de recettes y compris les versements des entreprises publiques au Trésor (en baisse de 2%) et du peu d'effort sur les dépenses, l'objectif de ramener le déficit du budget à 5,5% du PIB à la fin de l'année tiendrait presque du miracle. Par rapport à 2012, le taux de couverture des dépenses ordinaires par les recettes ordinaires a reculé de 4 points : 93% contre 89% à fin août. Cela équivaut à 44,7 milliards de dirhams à trouver et qui alimentent la dette intérieure du Trésor. Et une compétition en plus avec les opérateurs privés sur le marché monétaire en quête de liquidités. Sur les deux principales rubriques des engagements de l'Etat, la fièvre dépensière, elle, ne baisse pas. Au contraire, la masse salariale, qui absorbe 11% de la richesse nationale, est en hausse de 4,1% et progresse 8 fois plus vite que les recettes ordinaires du Trésor. La paie du personnel de l'Etat, charges sociales comprises (67,2 milliards de DH), représente la moitié des dépenses de fonctionnement. Plus inquiétante, la frénésie des dépenses de matériel, qui contraste avec les promesses de rationalisation et de réduction du train de vie de l'Etat. Ces dépenses, qui cachent en réalité une sorte de fourre-tout, sont celles qui enregistrent la plus forte hausse, +14,3% depuis le début de l'année. C'est l'une des rubriques où se trouvent pourtant quelques gisements d'économies. Les plus et les moins Recul historique des droits de douane : Entre les droits à l'importation, la TVA à l'import et la TIC sur les produits énergétiques, le recul est de 3,3%. Mais c'est une baisse historique relevée sur les droits à l'importation qui plongent de 19,7%. L'effet du démantèlement des tarifs douaniers dû aux accords de libre-échange est incontestable, effet auquel il faut ajouter le recul des importations incompressibles et des matières premières. La hausse du produit de l'impôt sur le revenu à fin août (5,2%) tient exclusivement à l'IR retenu sur les salaires. Ce qui n'est pas un bon signe car cela voudrait dire que les activités qui sont au système déclaratif sont mal en point. Dans ce lot, on trouve les professions libérales et toute une myriade d'entreprises individuelles et de TPE. Au total, l'IR a rapporté 22,7 milliards de dirhams contre 21,6 milliards à la même période de l'année dernière. Les recettes au titre de la contribution sociale de solidarité (payée par les entreprises depuis deux ans, et depuis le 1er janvier 2013 par les salariés et autres contribuables à l'IR) se sont établies à 260 millions de dirhams. L'objectif visé d'ici la fin de l'année est de 500 millions de DH. Les recettes de monopole et de participations enregistrent une baisse de 2% en raison de contributions de quelques « grands comptes » publics en forte diminution. L'OCP avec un chèque de 4 milliards de DH a été le plus grand contributeur. La CDG n'a toujours pas signé le moindre chèque pour le Trésor. H. E. www.leconomiste.com