Je me promenais dans le Parc de la Ligue Arabe. Mon attention fut attirée par un vieil homme assis sur un banc. Il se tenait la tête de ses deux mains et semblait abattu. Intrigué, je lui ai demandé : Monsieur, ça ne va pas ? Je ne sais que te répondre jeune homme. Je suis très triste. Après une brève discussion, il s'était confié à moi. Voici ci-après le résumé de ce qui le rendait triste. Son cri de coeur que j'ai un petit peu arrangé : Brebis égarée Comment un père peut-il aborder une question qui normalement doit être débattue entre une mère et sa fille ? Je sens que ma fille est une brebis égarée. Je suis maintenant un vieux père de famille. Je connais, comme tout homme qui se respecte, le comportement égoïste de mes semblables, les mâles. La mentalité de bon nombre de Marocains est spéciale. Ils hissent les filles sur un piédestal par des compliments sur la beauté de leur corps exhibé sans pudeur, ainsi que sur celle de leur visage, lorsque celles-ci sont maquillées avec exagération. Ils bernent volontiers, grâce à une cour outrancière, les jeunes filles qui, sans vergogne, s'habillent en mettant en valeur les atouts dont les a dotés le Bon Dieu. Elles sont pâmées par le flux des paroles mielleuses qu'elles gobent bêtement avec avidité, en s'imaginant que leur interlocuteur, envoûté par leur beauté, ne peut plus se contrôler. Ces hommes agissent ainsi, non pas dans le but de fonder un foyer avec leur future épouse, mais dans celui de passer un moment agréable en compagnie d'une victime qui doit invariablement « passer à la casserole ». Et puis, leur forfait accompli, ils se débinent sans s'inquiéter outre mesure de ces écervelées dont l'avenir se retrouve compromis par les désastreuses conséquences. Cependant lorsqu'ils pensent à se lier sérieusement, pour la vie avec la compagne désirée, ils se mettront à la recherche de celle qui doit, en premier lieu être sage, puis pudique et discrète. Les occidentaux bien nés, en quête de la conjointe idéale, agissent de la même manière. Alors, les familles soucieuses de "placer" leurs filles, les éduquent dans le but de les voir choisies par le mari sérieux ou les voir mariées tout court. La jolie chanson suivante, qui s'adresse particulièrement à toute jeune fille en âge de fonder un foyer, le corrobore : Les yeux baissés, les genoux serrés, Faites de la dentelle, faites de l'aquarelle, De la tapisserie, de la pâtisserie ; Mais, n'allez pas surtout, Jouer le guilledou, Avant de prendre époux. Ma fille unique est dans l'erreur. Elle s'imagine qu'en s'habillant sans aucune pudeur, à la manière des filles occidentales dépravées, et au mépris des concepts que lui a inculqués son père, elle arrivera à décrocher un mari. Elle se fourre le doigt dans l'œil. Elle n'a qu'à, au sein de sa propre famille, prendre de la graine auprès de celles qui se sont mariées honnêtement. Elles ne se maquillent que pour assister à certaines fêtes ou occasions. Elles sont pudiques, elles ont trouvé époux. Je suis absolument sûr qu'elle a rencontré des jeunes gens qui se sont moqués d'elle. Je suis sûr, qu'après un laps de temps de relation plus ou moins innocente, on l'a larguée. Alors, elle a du demander, et j'en mets ma main au feu : "— Pourquoi m'as-tu posé un lapin ? Pourquoi est-ce que tu ne m'appelles plus ? Pourtant j'ai fait tout ce que tu me disais et tout ce que tu voulais que je fasse." Elle ne devait, en aucun cas, lui permettre certains écarts ou exaucer ses désirs, tant qu'ils ne sont pas encore mariés ! Et elle ne veut pas encore ouvrir les yeux. C'est grave, très grave ! J'espère que l'irréparable n'a pas été commis. Et sa maman, qui ne fait rien pour la dissuader, la pousse dans le gouffre. J'assiste, déconcerté et impuissant, à la dérive de ma fille vers un avenir incertain. Elle va droit à l'échec, dans cette entreprise sacrée pour le gente féminine, à laquelle toute jeune fille, ayant la tête sur les épaules et les pieds sur terre, s'attaque corps et âme : fonder un foyer. Cette attitude me ronge, elle me consume à petit feu. Je suis en train de souffrir le martyre. Je sens que je suis en train d'attraper quelque maladie incurable. Je souhaite que dans ce cas-la, l'agonie soit de courte durée. Je souhaite aller retrouver le Bon Dieu sans créer des problèmes ni de désagréables contraintes à mon entourage. Vous qui me lisez, conseillez-moi, s'il vous plaît !