Après les deux fusillades du week-end qui ont fait une trentaine de morts et des dizaines de blessés, les Etats-Unis sous le choc se sont réveillés groggy. Une ONG, Gun Violence Archives en l'occurrence, a affirmé que la patrie de l'Oncle Sam a connu quelque 251 tueries de masse (plus de quatre victimes) lors de l'année en cours qui ont causé la mort de 272 personnes et fait plus d'un millier de blessés. Donald Trump, qui est sous les feux des critiques et qui est assailli de toutes parts par ses rivaux politiques, après ces faits meurtriers, a présenté ses condoléances aux familles des victimes et a assuré que « la haine » n'avait pas sa place en Amérique. Le locataire de la Maison Blanche, plus démagogue que jamais a même appelé ce lundi à encadrer davantage les ventes d'armes à feu. Cette mesure ajoute-t-il, sera liée à la réforme migratoire qu'il appelle de ses vœux. Mais plusieurs candidats aux primaires démocrates, réagissant en chœur, n'y ont vu que des palabres. Du coup ils accusent le président d'alimenter la montée de l'intolérance en encourageant le nationalisme et ce qu'ils considèrent comme le « terrorisme blanc ». Port d'arme, fait couler de l'encre…et du sang Toutefois, le véritable problème à ce « politiquement correct » dans cette Amérique puritaine, est celui du port d'armes, un vieux débat qui n'en finira jamais de faire couler beaucoup d'encre et de sang. Dans ce pays, on recense le plus grand nombres d'armes à feu au monde en rapport au nombre d'habitants. Ces dernières qui sont en vente libre doivent leur statut à la Constitution américaine qui garantit le droit au peuple de détenir et de porter une arme. En effet le second amendement de 1791 stipule : « Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d'un Etat libre, il ne pourra être porté atteinte au droit du peuple de détenir et de porter des armes ». Et c'est là qu'il va falloir trouver toute l'ambiguïté du débat. Les uns, généralement les démocrates y voient la liberté de porter une arme dans l'engagement ou l'appartenance à une milice tandis que les autres, les conservateurs et le NRA (National Rifle Association) le tout-puissant lobby des armes à feu, partisan mordicus du droit de posséder une arme pour l'autodéfense, n'y font que la lecture de la deuxième partie de l'amendement. Le changement, pas pour demain Aussi, un éventuel changement, malgré tous les drames engendrés, ne risque pas d'être d'actualité de sitôt. D'autant plus que le NRA de ses plus de quatre millions d'adhérents veille au grain. Le lobby depuis un demi-siècle (1968 et le Gun Control Act) lutte pour imposer que la détention et le port d'arme constituent une liberté fondamentale aux Etats-Unis. Son slogan, « Le droit que le peuple a de détenir et de porter une arme ne sera pas transgressé », est régulièrement repris par Donald Trump. La force de frappe de la NRA est inestimable. Elle trouve sa raison d'être dans les nombreux dons et les recettes de ses publicités pour armes à feu. Aussi lors des élections la NRA, à coup de millions de $, fait et défait les politiques régionales, voire fédérales, en optant pour les candidats qui se rangent sur ses positions qu'ils soient conservateurs ou autres. A contrario, quand le lobby s'y met contre certains candidats, qui ne se seraient pas alignés, cela leur peut être fatal. Aussi, dans ce contexte, les républicains ont pris le parti de la NRA et bénéficient de ses largesses. Donald Trump, à coups de millions de dollars, en a d'ailleurs bénéficié lors de sa campagne. D'un autre côté, les démocrates, n'osent pas les affronter ou quand c'est le cas, s'y aventurent en calmant leurs ardeurs, histoire ne pas trop froisser la bête. Mohamed Jaouad Kanabi