Dans le cadre de ses Rencontres diplomatiques, l'Agence marocaine de presse (MAP) a organisé ce jeudi une conférence autour du thème "Passé et avenir des relations entre le Maroc et le Brésil", avec comme invités d'honneur l'Ambassadeur du Brésil à Rabat, José Humberto de Brito Cruz et la directrice de l'Institut des études hispano-lusophones Fatiha Benlabbah, auteure d'un livre qui vient de paraître sur cette thématique. Dans la préface de son ouvrage, la directrice de l'Institut des études hispano-lusophones explique que le Maroc et le Brésil sont unis par des liens de coopération politique et économique de plus en plus solides, mais aussi par un patrimoine historique commun et une longue tradition d'échanges multiples qui remontent à des siècles. Edité conjointement avec la Fondation Alexandre de Gusmão, cet ouvrage sur les relations maroco-brésiliennes répond à une nécessité, « celle de mettre à la disposition des lecteurs et des chercheurs un outil de travail », explique Fatiha Benlabbah, mettant en avant l'importance de ce genre d'ouvrages où sont compilées des informations pouvant servir de base à des recherches spécifiques futures. Mazagan do Brazil Ambassadeur du Brésil à Rabat, José Humberto de Brito Cruz s'est livré à une analyse des perspectives de coopération pour l'avenir entre le Maroc et le plus grand pays sud-américain. Une discussion enrichissante donc, sur les aspects politiques et économiques de cette relation. Pas en reste, une analyse sur les éléments de mémoire partagée entre les deux pays a été présentée par l'ambassadeur. « Le président du Sénat brésilien nouvellement élu, Davi Alcolumbre est d'origine marocaine, issue de cette immigration produite au XIXe dans le contexte du développement de la richesse du caoutchouc au nord du Brésil » atteste d'emblée l'ambassadeur. Mais ce lien humain remonte à plus loin dans l'histoire. Prenant le cas de l'ancienne forteresse occupée par les portugais de Mazagan (actuelle El Jadida), l'ouvrage mis à l'honneur certifie que la population lusophone qui s'y était établie de 1514 à 1769 a complètement déménagé au Brésil suite à la libération de la ville par le sultan Sidi Mohammed ben Abdallah. Depuis ces temps révolues, c'est la bonne entente entre les deux peuples, incarnée notamment la passion commune pour le football, qui rapproche les deux sociétés. « Il y a quelque chose dans l'âme brésilienne qui trouve une résonance dans l'âme marocaine, et j'oserais dire que la même chose est vraie dans l'autre chance » philosophe José Humberto de Brito Cruz. En 2018, le diplomate compte 55 000 Brésiliens à avoir visité le Maroc grâce à 60 lignes aériennes entre les deux pays. De même, les marocains sont en tête des touristes issus de la région MENA selon lui. « La mobilité sans besoin de visa rend plus faciles les voyages et les connaissances approfondies » justifie l'ambassadeur. Un air d'amitié S'agissant des relations entre Etats, l'ambassadeur déclare: « notre dialogue politique, traditionnellement très positif et productif pas seulement au niveau bilatéral mais aussi au niveau des organismes internationaux provient des défis semblables qui nous lient dans divers domaines ». La récente participation du Chef du gouvernement marocain à la cérémonie d'investiture du président brésilien fraîchement élu a notamment renforcé ce sentiment. Côté échanges commerciaux dans le cadre bilatéral ou dans le cadre du Marché commun de l'Amérique du Sud, couramment abrégé Mercosur, l'ambassadeur a donné quelques clés pour la compréhension des perspectives existantes dans les relations entre les deux pays. Sur un volume d'échange de 1,4 milliards de dollar en 2018, les exportations marocaines vers le Brésil se chiffrent à environ 900 millions de dollars, tandis que le Brésil a exporté vers le Maroc pour un total de 500 millions de dollars. Soit une balance commerciale excédentaire pour le Maroc d'environ 400 millions de dollars. « En 2003, avant la visite de S.M le roi au brésil, ce total était de 428 millions de dollars », fait remarquer l'ambassadeur qui souligne le triplement des échanges commerciaux, plus d'une décennie plus tard. « Mais il reste du travail à faire pour atteindre le niveau qui correspondrait à notre voisinage atlantique » relativise José Humberto de Brito Cruz. Un voisinage de type « atlantique ». Le mot est lâché. La sardine fait tabac L'ambassadeur considère que « l'océan Atlantique n'est pas destiné à être un gouffre de séparation mais a plutôt vocation à être un trait d'union entre l'Amérique du Sud et l'Afrique ». Présents également au cours de cette conférence, les ambassadeurs argentin et paraguayen acquiescent. Et au représentant diplomatique de souligner la pertinence de négocier un accord commercial entre le Mercosur et le Maroc, « pour permettre la réduction des droits de douane des deux cotés ainsi que les barrières non douanières ». En la matière, l'ambassadeur rappelle la rencontre en novembre 2016 entre les ministres de l'Agriculture des deux pays, lors des travaux de la COP22 à Marrakech. « L'une des conséquences de cette rencontre a été la création du poste d'attaché agricole dans les ambassades des deux pays. C'est une question très sensible », reconnait-t-il. Des aspects de complémentarité, les deux pays en dispose sur ce secteur. Le Brésil est un acteur agricole majeur qui a besoin des engrais dont le Maroc est producteur à travers ses réserves de phosphate. Et sur un autre plan connexe, l'ambassadeur rapporte que les brésiliens ont développé un appétit vorace pour la sardine marocaine. « Leur exportation a totalisé 70 millions de dollars en 2018 » indique-t-il. Au même moment, Le Brésil continue d'être le premier fournisseur de sucre au Maroc, ajouté à d'importantes importations de maïs, de poivre et de tabac.