Après près de cinq mois de bombardements israéliens constants et de déplacements massifs à Gaza à la suite des attaques sanglantes du Hamas du 7 octobre, le « carnage » dans l'enclave palestinienne a fait plus de 30.000 morts et doit cesser immédiatement, a estimé le chef des droits de l'homme de l'ONU, Volker Türk. Intervenant devant le Conseil des droits de l'homme, jeudi à Genève à Genève, Türk a affirmé que « la guerre à Gaza doit cesser, et il est grand temps d'arriver à la paix, à la reddition des comptes et à des enquêtes sur les violations +évidentes+ du droit humanitaire international et les éventuels crimes de guerre commis par les deux parties ». Guterres consterné par le bilan A New York, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, s'est également dit « consterné par le bilan humain tragique du conflit à Gaza, au cours duquel plus de 30.000 personnes auraient été tuées et plus de 70 000 blessées ». « Malheureusement, un nombre indéterminé de personnes reposent sous les décombres », a dit son porte-parole dans une déclaration à la presse. Le chef de l'ONU a condamné l'incident survenu jeudi dans le nord de Gaza, au cours duquel plus d'une centaine de personnes auraient été tuées ou blessées alors qu'elles cherchaient une aide vitale. « Les civils désespérés de Gaza ont besoin d'une aide urgente, y compris ceux du nord assiégé où les Nations Unies n'ont pas été en mesure de fournir de l'aide depuis plus d'une semaine », a déclaré son porte-parole, ajoutant que « le Secrétaire général réitère son appel à un cessez-le-feu humanitaire immédiat et à la libération inconditionnelle de tous les otages ». « Il appelle une fois de plus à des mesures urgentes afin que l'aide humanitaire essentielle puisse parvenir à Gaza et à travers Gaza pour tous ceux qui en ont besoin », a-t-il encore dit. De son côté, le chef de l'humanitaire de l'ONU, Martin Griffiths, s'est également dit consterné par les informations faisant état de centaines de morts et de blessés à Gaza lors d'un transfert de fournitures humanitaires à l'ouest de la ville de Gaza jeudi. Les horreurs de la guerre « Il semble qu'il n'y ait pas de mots pour décrire les horreurs qui se déroulent sous nos yeux à Gaza », a déclaré le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, en présentant au Conseil un rapport de son bureau, le HCDH, sur la situation désespérée qui règne dans l'enclave palestinienne. Soulignant le « niveau sans précédent de meurtres et de mutilations » de civils à Gaza, Türk a noté qu'au moins 17.000 enfants sont devenus orphelins ou ont été séparés de leur famille. Après avoir réitéré sa condamnation des attaques « choquantes... totalement injustifiables » perpétrées par le Hamas les 7 et 8 octobre, Türk a noté qu'au moins trois habitants de Gaza sur quatre avaient été déplacés par la guerre, dans le contexte de la « démolition systématique de quartiers entiers » qui a rendu la bande de Gaza largement inhabitable. Impact durable S'adressant au Conseil, qui est le principal forum des Nations Unies en matière de droits de l'homme, sous les auspices de l'Assemblée générale des Nations Unies, Türk a souligné que des milliers de tonnes de munitions avaient été larguées par Israël sur les communautés de Gaza depuis le 7 octobre. « Ces armes envoient une onde de souffle massive à haute pression qui peut rompre les organes internes, ainsi que des projectiles à fragmentation et une chaleur si intense qu'elle provoque des brûlures profondes – et elles ont été utilisées dans des quartiers résidentiels densément peuplés », a-t-il déclaré, ajoutant qu'« en novembre dernier, à l'hôpital égyptien d'Arish, j'ai vu des enfants dont la chair avait été brûlée. Je ne l'oublierai jamais ». Civils pris au piège Le Haut-Commissaire a également noté que le « ciblage aveugle ou disproportionné » par Israël avait probablement entraîné la disparition de dizaines de milliers de Gazaouis, « présumés enterrés sous les décombres de leurs maisons ». Il a aussi condamné les tirs aveugles de projectiles par des groupes armés palestiniens « à travers le sud d'Israël, et jusqu'à Tel-Aviv ». Parmi les 47 États membres du forum, la condamnation par le chef des droits de l'homme des Nations Unies des attaques menées par le Hamas et d'autres groupes armés palestiniens contre des communautés israéliennes, son appel à la libération des otages israéliens toujours détenus dans l'enclave, la nécessité d'un cessez-le-feu immédiat, l'obligation pour les deux parties de rendre des comptes pour les violations des lois de la guerre et la création d'un État palestinien souverain ont bénéficié d'un soutien quasi unanime. Position d'Israël La Représentante permanente d'Israël auprès de l'ONU à Genève, Meirav Eilon Shahar, a dénoncé les attaques des « terroristes » du Hamas et a répété des allégations non fondées de complicité entre l'ONU et le groupe armé. Assise aux côtés de deux otages libérés – Aviva Siegel et Raz Ben Ami – qui se sont donné la main pour se soutenir mutuellement au cours du débat, la déléguée israélienne a également insisté sur le droit de son pays à se défendre, conformément au droit humanitaire international. « Israël se bat dans un champ de bataille que le Hamas a créé à Gaza, un champ de bataille dans lequel les terroristes se cachent derrière et au sein de la population civile. Un champ de bataille que les Nations Unies ont vu se construire autour et en dessous d'eux pendant des années et qu'elles ont choisi d'ignorer », a-t-elle déclaré. « On a dit à Israël à maintes reprises que les terroristes qui ont détourné l'aide, construit des tunnels de terreur, assassiné brutalement des civils innocents, violé, décapité, brûlé vives des familles – ne peuvent être touchés parce qu'ils se cachent au sein de la population civile. Pourtant, nous n'avons pas le choix. Nous devons nous en prendre au Hamas, sinon il continuera à s'en prendre à nous », a-t-elle ajouté. Applaudissements Des applaudissements spontanés ont brièvement interrompu les débats en réponse aux commentaires du Représentant palestinien, Ibrahim Khraishi, qui a fermement condamné les massacres perpétrés par le Hamas en Israël, à l'origine de la dernière flambée du conflit. « Nous le faisons fermement, mais personne ne condamne vraiment le fait que des femmes, des enfants et des personnes âgées sont tués à Gaza », a-t-il dit. Quelque 12.000 enfants et 8.000 femmes figurent parmi les victimes, a insisté Khraishi. Il a ensuite appelé la communauté internationale à empêcher « un nouveau massacre » à Rafah, en référence à une offensive totale imminente des forces israéliennes en l'absence d'un accord de cessez-le-feu. Le chef des droits de l'homme de l'ONU avait auparavant mis en garde contre un assaut terrestre israélien sur Rafah, où 1,5 million de personnes se sont réfugiées « malgré les bombardements incessants ». Une offensive israélienne « entraînerait des pertes humaines potentiellement massives, un risque supplémentaire de crimes atroces, de nouveaux déplacements vers d'autres lieux dangereux et signerait l'arrêt de mort de tout espoir d'une aide humanitaire efficace », a-t-il insisté. Pour conclure: « Je ne vois pas comment une telle opération pourrait être compatible avec les mesures conservatoires contraignantes émises par la Cour internationale de justice ».