Ces dernières semaines, d'importantes quantités de tomates marocaines ont été systématiquement détruites sur les parkings des grands marchés en France, sous le prétexte fallacieux d'une surabondance et de prix trop bas. Cette situation, rapportée par le journal « Le Monde« , suscite la colère des agriculteurs français qui dénoncent les tomates marocaines comme le symbole d'une concurrence déloyale. Selon l'Association des producteurs de tomates et de concombres en France, cette compétition inégale est alimentée par les coûts de main-d'œuvre extrêmement bas au Maroc et l'exemption des droits de douane résultant de l'accord de libre-échange conclu en 2012 entre le Royaume et l'Union européenne. Traditionnellement dominée par l'Espagne, la production à bas coût de fruits et légumes a migré vers le sud, propulsant le Maroc au rang de principal fournisseur de l'Union européenne en 2022, détrônant ainsi son voisin ibérique, rapporte Le Monde. Et d'ajouter qu'en cette année-là, plus de la moitié des 660.000 tonnes de tomates marocaines exportées vers vingt-sept pays étaient destinées à la France, d'après l'Association marocaine des producteurs et exportateurs de fruits et légumes. Majoritairement cultivées dans la région d'Agadir, représentant 85% de la production nationale de la saison précédente, ces tomates, en particulier les variétés « divisées » à forte valeur ajoutée telles que les tomates cerises rondes et allongées, occupent une place prépondérante sur le marché français, représentant plus de 50% des importations. Bien que les critiques des producteurs français ne soient pas ignorées au Maroc, la nature souvent silencieuse du secteur persiste. Un représentant de l'Association des producteurs marocains a qualifié la position française de « populiste« , soulignant néanmoins que le Maroc respecte les règles édictées par l'accord de libre-échange avec l'Union européenne. Cet accord a graduellement éliminé les barrières douanières pour les tomates marocaines, les soumettant à des prix d'entrée et à des quotas annuels ne dépassant pas 285 000 tonnes entre octobre et mai. Au-delà de cette période, des taxes sont appliquées. Les producteurs marocains insistent sur le caractère protectionniste des barrières mises en place par les producteurs français et européens pour éviter une saturation du marché. Face aux critiques, un représentant du gouvernement français met l'accent sur la demande croissante, soulignant que « la France ne produit tout simplement pas de tomates en hiver« . Les agriculteurs français insistent sur le coût avantageux de la main-d'œuvre saisonnière au Maroc, bien inférieur à celui en France, bien que l'Union marocaine de l'agriculture et du développement rural s'engage à aligner ces coûts sur le salaire minimum garanti entre professionnels. Un producteur marocain souligne que cette règle vise à prévenir la saturation du marché européen en période de production locale. Il rappelle que lorsque la production de tomates débute en Europe, les prix de l'Organisation mondiale du commerce sont élevés, signalant une forte demande et une offre limitée. Un responsable gouvernemental français, en réponse aux protestations des producteurs, indique que la France est dépendante des importations en hiver et que le moment actuel, en période de crise, n'est pas propice à des restrictions. Habib El Kourch, un vétéran de l'exportation agricole marocaine, réfute les accusations françaises, considérant les manifestations des agriculteurs français comme des prétextes opportunistes pour pousser leur gouvernement et l'UE à un changement de réglementation et davantage de soutien financier. Concernant les blocages de camion, El Kourch estime qu'ils affectent principalement les agriculteurs espagnols et portugais, notant que les exportateurs marocains respectent les conventions signées avec l'UE dans le but notamment de maintenir des relations bilatérales équilibrées. Dans une déclaration à Hespress Fr, El Kourch dément les allégations françaises sur le coût de la main-d'œuvre marocaine, mettant en avant les charges annexes telles que l'emballage et le transport. Il souligne également la contribution des producteurs marocains à l'économie européenne par leurs achats de graines, engrais et intrants auprès de l'UE, notamment la France. En réponse à d'éventuelles mesures restrictives de l'UE, El Kourch souligne la dépendance du Maroc envers l'Union en tant que client majeur pour les intrants agricoles, appelant dans ce sens à résoudre d'abord les problèmes internes de l'UE avant d'appliquer de nouvelles réglementations contre les exportateurs marocains. Quant à la production de tomates, El Kourch rappelle que le Maroc ne couvre que 8% des besoins européens, mettant en lumière l'importance du marché de Saint-Charles en France pour la distribution dans toute l'Europe. In fine, notre interlocuteur insiste sur la contribution des producteurs marocains à l'économie française et européenne, soulignant que leurs produits approvisionnent diverses destinations à travers le continent.