Les relations tendues et froides entre Paris et Rabat ne semblent pas évoluer vers un apaisement et un changement positif significatif pour les deux pays. Les signes de la détérioration sont liés à des positions hostiles au Maroc et un dangereux rapprochement avec Alger. La France et l'Algérie seraient-elles en train de se rapprocher aux dépens du Maroc? Des signes d'un rapprochement entre Alger et Paris ont été donnés d'un côté et de l'autre, après la visite d'Etat du président Emmanuel Macron en Algérie et la quinzaine de ministres français qui se sont rendus « symboliquement » en Algérie fin 2022, dans un contexte où l'Algérie allait être classée sur la liste des pays soutenant la Russie contre l'Ukraine. Le soutien de la France dans ce moment là, a fait éviter le pire à l'Algérie. Des ministres algériens devraient eux aussi se rendre en France prochainement pour sceller cette nouvelle relation entre les deux pays liés par une histoire de colonisation sanglante, un douloureux passé que les Algériens n'oublient pas et pour lequel la France ne s'excusera pas, selon une récente interview d'Emmanuel Macron. x Publicité En dépit des demandes d'excuses pressantes du côté algérien, le président français a donné une réponse définitive à cette question mémorielle. Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune a ravalé la fierté légendaire des Algériens, leur « Nif », et a accepté ce refus d'excuses de la France parce qu'un autre dossier plus important aux yeux de la junte militaire est en jeu: Le Sahara. L'Algérie cherche à tout prix à contrebalancer l'équilibre et les relations distinguées entre la France et le Maroc. Elle a le vent en poupe puisque la France a besoin de gaz et a besoin de trouver un moyen de se redéployer au Sahel et en Afrique plus largement et les frontières algériennes, avec le Niger, le Mali et la Libye semblent parfaites pour cela. L'Algérie peut aussi compter sur le parti-pris d'Emmanuel Macron qui a effectué plusieurs visites d'Etat en Algérie, dont les premières de ses deux mandats consécutifs, alors qu'il n'a effectué aucune visite officielle au Maroc hormis celle pour l'inauguration du TGV ou une visite d'ordre privé. Le parti pris du président français s'est confirmé avec son insistance pour régler « fissa fissa » le dossier mémoriel et le renvoi de quelques crânes de combattants même s'il s'est avéré plus tard que leur origine n'était pas garantie et qu'ils pouvaient être aussi des « Harkis » (des traitres algériens qui ont combattu pour la France). Les dirigeants algériens savaient que ces crânes n'étaient pas tous algériens et que parmi eux se trouvaient ceux qui ont tué d'autres Algériens pendant la guerre. Ils ont quand même joué le jeu en les présentant dans des cercueils enveloppés dans des drapeaux algériens, pour prendre des photos et donner le change. Qu'importe qu'ils soient combattants ou « Harkis » pour les dirigeants algériens! Parce que leur vrai objectif est ailleurs et ils sont prêts à courber l'échine, donner leur gaz et servir leurs pétrodollars, pour obtenir ce qu'ils veulent de la France. Le rapprochement entre Alger et Paris a franchi un nouveau palier cette semaine avec le déplacement en France du chef de l'armée algérienne, Saïd Chengriha, et sa réception par Emmanuel Macron. Cette visite est « hautement symbolique », a souligné l'agence de presse française, parce que la dernière visite d'un chef d'Etat-major algérien en France remonte à 17 ans et que l'Algérie est connue pour être l'alliée de la Russie et pas de l'Occident. Aucune autre information sur le sujet n'a été donnée ni par la présidence française, ni par la presse généralement très bien informée, et même pas de photo avec Emmanuel Macron n'a été prise. L'événement était pourtant inhabituel puisque jamais un chef militaire algérien n'a été accueilli au palais de l'Elysée et encore moins pour remettre une lettre du président Abdelmadjid Tebboune à son homologue français, chose qui aurai pu (et dû) se faire par le ministre des Affaires Etrangères. Cette rencontre laisse présager une entente sur des contrats militaires entre l'Algérie et la France. Dans un contexte de tensions avec le Maroc, il est à se demander si la France va armer l'Algérie qui n'a pas caché ses intentions belliqueuses vis-à-vis du Royaume. Le président algérien l'a clairement dit dans une interview à un média français, en affirmant que s'il n'avait pas suspendu les relations diplomatiques avec le Maroc il lui aurait déclaré la guerre. L'augmentation colossale du budget militaire de l'Algérie en 2023, qui va doubler pour atteindre 23 milliards de dollars cette année, trouve maintenant son explication. L'Algérie ne peut pas arrêter d'acheter des armes à la Russie mais doit acheter chez les Occidentaux pour les calmer et éviter de figurer sur la liste des pays qui soutiennent financièrement la machine de guerre russe. Si l'hypothèse d'achat d'armes à Paris venait à se confirmer, le virage de la France vers l'Algérie au détriment du Maroc serait confirmé aussi, puisque l'on sait bien pour qui sont destinées ces armes et les articles à charge contre le Maroc par une certaine presse française s'expliqueraient aussi. Nul doute que le vote à l'unanimité d'une résolution contre le Maroc des eurodéputés du parti présidentiel français est lié à cette affaire, sans parler du silence d'Emmanuel Macron sur le sujet en prétextant une supposée non ingérence alors que cette résolution est une ingérence flagrante dans les affaires intérieures et la justice d'un Etat. Le président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, présent lors d'un sommet France-Espagne, a répondu à la question pour sa part, et indiqué que son parti a voté contre la résolution du Parlement européen. Dans des circonstances pareilles, et Rabat qui observe de loin, difficile d'imaginer un apaisement entre le Maroc et la France ou des relations qui repartent sur un meilleur pied, et la visite du président français au Maroc semble compromise pour le moment puisque le Royaume a été clair sur ses positions, et n'accepte plus de double jeu et encore moins lorsqu'il s'agit de sa cause nationale.