S'il est un fait bien établi, c'est que Rabat et Paris ne parviennent pas à trouver un second souffle à des relations, sous fond de crise silencieuse. Le président français Emmanuel Macron en visite actuellement en Algérie en est très certainement une des causes principales de cette situation ressentie comme une forme d'injustice de la part de l'allié marocain. En attendant à Alger, Emmanuel Macron aura bien des dossiers délicats à décanter. Le gaz algérien est tout en haut des préoccupations du président français. Mais pas que, selon à le politologue et journaliste basé à Paris, Mustapha Tossa dans une analyse à Hespress FR. « La livraison de gaz algérien pour l'hiver qui pointe à l'horizon, les fractures mémorielles qui tiennent à cœur à Emmanuel Macron, l'imbroglio malien dans lequel le régime algérien assume un jeu trouble, la crise explosive entre Madrid et Alger, les visas et bien sûr la question du Sahara marocain, le nœud gordien de toutes les angoisses régionales depuis des décennies », sont les dossiers centraux de cette visite de 3 jours. Mustapha Tossa notera également qu'Emmanuel Macron aura essuyé deux revers avant même que de poser pied en Algérie : « le Grand rabbin de France d'origine algérienne, Haîm Korsia qui, sous un déluge d'insultes antisémites, aurait invoqué le Covid pour expliquer son retrait du voyage présidentiel, alors que des sources médiatiques affirment en revanche l'annulation de son visa par Alger. Et la mystérieuse disparition de la liste officielle française du nom de l'"enfant gâté" des autorités françaises, le recteur de la grande mosquée de Paris, Chems Eddine Hafiz, auteur d'un tweet d'une violence inouïe au lendemain de l'attaque terroriste contre l'écrivain Salman Rushdie ». On peut donc imaginer la suite de la visite du président français soumis au dictat de la Junte algérienne avant même que d'entamer son déplacement et donc forcément prêt à concéder moult et une bricoles à son hôte. Pour Mustapha Tossa, « Emmanuel Macron se rend en Algérie avec en tête le discours que le Roi Mohammed VI a prononcé le 20 août dernier et dans lequel il a ciselé une véritable sommation à l'encontre des alliés qui hésitent à reconnaître la souveraineté du Maroc sur son Sahara et ciblant, sans la nommer, Paris, allié d'exception, historique au sens structurel du mot et qui se complaît dans une ambiguïté devenue inexpliquée et difficile à justifier ». Tossa nous détaille alors, « qu'après la nouvelle architecture politique issue de la reconnaissance américaine, du nouveau positionnement espagnol et allemand, du consensus arabe et des ouvertures africaines et latino-américaines, le Maroc ne parvient plus à comprendre comme un allié aussi important que la France puisse encore cultiver l'hésitation et ne pas inscrire ses pas dans ceux des pays qui ont déjà reconnu la marocanité du Sahara ». Et de s'interroger sur le manque de réactivité de l'Élysée et du Quai d'Orsay. « Pour cette raison cardinale, Rabat va surveiller les mots, les gestes et les postures du président français en terre algérienne. Les autorités marocaines savent que le régime politico-militaire algérien va jouer son va-tout lors de cette visite, qu'il va mettre dans la balance d'abord des pressions puis des concessions et des cadeaux pour empêcher que la France ne bascule dans le cercle des pays qui reconnaissent officiellement la souveraineté du Maroc sur son Sahara, qu'il va même s'activer pour tenter d'élargir le fossé des mésententes entre Paris et Rabat ». Tossa dira également « Signe de l'extrême inflammabilité de ce déplacement , cette information diffusée à dessein avant la visite et qui fait à état d'un projet français de réunir en France Marocains, Algériens et Espagnoles pour essayer de trouver un terrain d'entente et éloigner de la région le spectre de la déflagration. Peut-être aussi une manière de tenter de sortir par le haut de ce piège des alliances et des amitiés ». On le voit donc, entre Paris et Rabat les relations sont crispées et surtout ne se disent plus. Tahar Benjelloun dans un article publié par Le Point dernièrement, indiquait à propos de la visite du président français à Alger, « qu'Emmanuel Macron est en train de sacrifier la bonne entente avec le Maroc dans l'espoir d'obtenir des militaires algériens de meilleures dispositions à l'égard de son pays. Pour l'écrivain, il est un « vent glacial entre le Maroc et la France ».