Plusieurs universitaires, membres des milieux associatifs, notamment juifs en France, se sont insurgés contre la décision du ministre de l'Intérieur français, Gérald Darmanin, d'expulser un imam français, Hassan Iquioussen. Dans une tribune, les signataires appellent à l'arrêt du racisme et spécifiquement islamophobe institutionnel en France. La tribune intitulée « Refuser l'expulsion de l'imam Hassan Iquioussen, c'est défendre les principes élémentaires de l'État de droit », signée par plusieurs universitaires et personnalités issues de la mouvance anti-raciste, rappelle que l'imam visé par une procédure d'expulsion est avant tout né en France, et qu'en ce sens, s'il a commis des délits, il en doit en répondre en France et non pas au Maroc. « Hassan Iquioussen est né en France. Il a dans ce pays des enfants et petits-enfants. Sa vie est ici où, en outre, il est lié à des personnalités politiques du Nord. S'il est avéré qu'il a commis des délits d'antisémitisme ou d'homophobie, c'est en France qu'il doit en rendre compte », ont écrit les auteurs. Pour eux, « la question du positionnement doctrinal et religieux de l'imam menacé par Gérald Darmanin importe peu, en vérité » car le plus important c'est de défendre les valeurs de la France. Ils rappellent une à une, toutes les mesures racistes et visant en particulier les musulmans prises en France. « La menace d'expulsion martialement prononcée par le ministre de l'intérieur contre Hassan Iquioussen est la mise en œuvre de l'aggravation de l'arsenal législatif raciste et spécifiquement islamophobe voté et promulgué sous Macron », indique-t-ils. Il citent la loi « Séparatisme », la loi « Asile-immigration » et estiment que « l'asile n'est qu'un mot mais aussi les fermetures nombreuses de mosquées et/ou la dissolution du CCIF parmi d'autres associations communautaires ». Parmi les signataires de la lettre ouverte au président Emmanuel Macron, et publiée par l'Union Juive Française pour la Paix (UJFP) se trouvent l'islamologue et politologue François Burgat, du CNRS-IREMAM, Laurent Bonnefoy, chercheur au CNRS, la politologue et féministe décoloniale, Françoise Vergès, l'universitaire Jocelyne Cesari, le rabbin Gabriel Hagaï, et le militant juif antiraciste, Dominique Natanson. « Le ton martial de Darmanin sous les applaudissements des députés Rassemblement national est une étape supplémentaire dans la menace que fait peser sur les Musulmans de France le racisme institutionnel », affirment-t-il, en ajoutant qu'il « faut défendre Hassan Iquioussen et refuser fermement son expulsion » Les signataires, expliquent que son expulsion « atteste des entraves toujours plus graves à l'État de droit et la désignation, par la République française, d'ennemis intérieurs ». « La question du positionnement doctrinal et religieux de l'imam menacé par Gérald Darmanin importe peu, en vérité. Hassan Iquioussen est peut-être conservateur mais chaque branche du monothéisme a ses conservateurs voire ses réactionnaires. Il en va de même pour le christianisme et le judaïsme. Disons-le franchement : ce qui est visé ici, c'est la liberté d'opinion et d'expression du groupe identifié comme musulman », ont-t-il affirmé. Jeudi, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a donné raison au ministre de l'Intérieur français, en rejetant la demande de suspension de la mesure d'expulsion vers le Maroc de Hassan Iquioussen. La CEDH a estimé qu' »en raison de la gravité de la menace pour l'ordre public, le ministre (Gérald Darmanin, ndlr) estimait qu'il n'était pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à une vie familiale », s'il devait être expulsé vers le Maroc. Gérald Darmanin a de nouveau justifié l'expulsion de cet imam sur CNews, en jugeant qu'il avait tenu « des propos ouvertement antisémites, ouvertement xénophobes, ouvertement homophobes, ouvertement anti-femmes ». Il « n'a rien à faire sur le sol national », a insisté le ministre de l'Intérieur. De son côté, la défense de l'imam, estime que s'il a eu des propos de cette nature, ces derniers remontent à plus de vingt ans et que cela n'a jamais été un motif pour ne pas lui accorder un nouveau titre de séjour en France. De son côté, le tribunal administratif de Paris rendra sa décision vendredi au plus tard sur le cas de l'imam en suspendant ou non l'arrêté d'expulsion. « Je vous demande de vous méfier de phrases coupées et sorties de leur contexte », a déclaré son avocate, Me Lucie Simon. Pour sa part, la Ligue des droits de l'Homme (LDH) a également soutenu le prédicateur, et la requête de son avocate pendant l'audience. « Ces propos anciens n'ont jamais donné lieu à un refus de titre de séjour ou à une condamnation pénale », a relevé Me Marion Ogier pour l'association, défendant « le droit au respect à la vie privée et familiale ».