Les sanctions dans le cade du non-respect des principes de la concurrence peuvent coûter très cher aux entreprises au Maroc, indiquent des experts lors d'un atelier de sensibilisation aux médias à la politique de concurrence, à Rabat. Qu'elles soient nationales ou internationales, les entreprises ayant entravé aux règles, sont ponctionnées sur leur chiffre d'affaires. Alors que le Maroc est une économie ouverte, les principes de la concurrence sont strictement régulés et le conseil de la concurrence veille à leur application, surtout depuis que l'institution a été dotée d'un pouvoir d'auto-saisine et ne joue plus qu'un rôle de conseil mais est aussi devenu une autorité qui, parfois sanctionne très fort les entreprises qui ne respectent pas les règles. « Le coût d'une pratique anticoncurrentielle est très lourd pour un opérateur économique (...) il vaut mieux prendre les mesures nécessaires» en amont, a déclaré Saad El Mernissi, juriste, spécialiste en arbitrage international, lors de son intervention dans le cadre d'un atelier organisé par le Conseil de la concurrence en partenariat avec la Banque mondiale et la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). « Souvent les personnes qui commettent des pratiques anticoncurrentielles le font parce qu'elles ne sont pas au courant des lois », a déploré pour sa part, le président du Conseil de la concurrence, Ahmed Rahhou. Car le prix d'une pratique anticoncurrentielle se facture non seulement en chiffres mais aussi en temps puisque les enquêtes durent longtemps et les entreprises sont bloquées, ne pouvant agir qu'une fois que le Conseil de la concurrence se prononce. Le prix en termes de sanctions est le plus lourd à payer pour les entreprises, et c'est pour cela que « la concurrence doit être une préoccupation majeure du management de l'entreprise », qu'elle soit gérée par les PDG et non pas par un département, selon les intervenants. Cela intéresse surtout les entreprises ayant pour projet de se lancer dans une opération de concentration car le conseil de la concurrence a un pouvoir décisionnaire dans ce cas là, et les entreprises sont tenues de notifier cette institution avant sa réalisation, selon les dispositions de l'article 12 de la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence de 2014. La notification concerne, un chiffre d'affaires total mondial (de toutes les entreprises cumulées) supérieur ou égal à 750 millions de dirhams, à 250 millions de dirhams dans le cas d'entreprises ayant eu un chiffre d'affaire au Maroc, et si l'une des entreprises réalisé plus de 40% de ses ventes, achats ou autres transaction sur le marché national. Alors que les opérations de concentrations sont chiffrées à près d'une centaine par an au Maroc, elles sont accaparées par les entreprises étrangères et les fonds d'investissements qui sont « surreprésentés » selon Saad El Mernissi. Et d'indiquer que les entreprises marocaines ne font pas assez de notification de concentration au conseil de la concurrence contrairement aux entreprises étrangères. Pourtant les sanctions sont énormes pour les entreprises qui ne respectent pas les règles. Elles risquent de payer jusqu'à 5% de leur chiffre d'affaires annuel et des pénalités journalières en cas de non-paiement. En cas d'abus de position dominante (monopole) c'est jusqu'à 10% du chiffres d'affaires national ou mondial, c'est-à-dire qu'une entreprise internationale ayant une filiale au Maroc ou basée au Maroc, et qui se livre à des pratiques non concurrentielles, peut se heurter à des sanctions sur chiffres d'affaire international et pas seulement celui qui se limite à ses activités au Maroc. Des sanctions lourdes également attendent les entreprises qui se livrent gun jumping, lorsqu'elle n'attendant pas la décision du conseil de concurrence pour procéder à une opération de concentration. Ainsi pour prévenir ces risques et éviter de devoir payer de lourdes amendes et des sanctions qui peuvent aller jusqu'à des peines privatives de libertés, un guide de conformité élaboré pour les acteurs économiques qui expliquer les règles de la concurrence, a été élaboré par le conseil de la concurrence et présenté en janvier 2022 et les services d'un conseiller juridique se révèlent également d'une aide précieuse. Pour rappel, le conseil de concurrence intervient de manière « décisionnaire » sur plusieurs plans, à savoir sur les pratiques anticoncurrentielles telles que les ententes, les abus de domination, sur les pratiques de prix abusivement bas, et les concentrations économiques. Par ailleurs, les décisions du conseil de la concurrence incluant des sanctions économiques sont indépendantes des autres peines pécuniaires qui peuvent intervenir dans le cadre de procédures judicaires au niveau des tribunaux de commerce.