Le « Deal du siècle » présenté par l'administration de Donald Trump comme la solution-miracle au conflit israélo-palestinien, est rejeté catégoriquement par l'ensemble des composantes du peuple palestinien, dont le président palestinien, Mahmoud Abbas, a appelé les états arabes à le boycotter. Considéré comme une sorte de « mainmise totale » sur l'état palestiniens, des manifestations de rejet ont été observées dans plusieurs pays arabes pour dénoncer ce deal qu'ils considèrent comme une « menace pour la Palestine« . Joint par Hespress fr au sujet de ce « Deal du siècle« , Abdelhamid Benkhattab, professeur en sciences politiques à la faculté de droit Agdal-Rabat considère que « c'est tout à fait normal qu'il y ait un peu d'embrasement justement, parce que le deal du siècle, ou ce qu'on a nommé comme +deal du siècle+, n'est en fait qu'une officialisation du fait accompli qui existe déjà en Palestine depuis une dizaine d'années maintenant. C'est-à-dire un territoire palestinien qui est totalement mis à la merci d'Israël avec un territoire morcelé, totalement enclavé sans frontières claires ni visibles, avec un territoire qui est parsemé de colonies qui sont soustraites à la souveraineté de l'Etat palestinien« . Donc, selon cet expert, « nous sommes devant un Etat fantoche en quelque sorte. L'Etat qu'on veut faire reconnaître aux Palestiniens, c'est un Etat qui n'a aucune possibilité d'exister en tant que tel.C'est-à-dire qu'il n'a ni ressources matérielles, ni ressources humaines ni ressources territoriales, et tout cela sera donc contrôlé par Israël ». Alors, cette officialisation de ce fait accompli, souligne Benkhattab, « se veut en conformité à la logique mercantiliste et marchante de Donald Trump qui a financiarisé les relations internationales. Tout passe par les caisses de l'Etat dans une logique de marchandisation des relations inter-étatiques. Donc ce qui compte le plus chez Trump, c'est d'essayer de faire un deal avec les Etats de la région, moyennant de l'argent et une bagatelle de 50 milliards de dollars, dont 28 milliards passeront pour les Palestiniens dans 5 ans ». Selon Benkhattab, « Donald Trump essaie de monnayer en quelque sorte la paix par un certain nombre de projets qui sont en fin de compte favorables, non pas aux Palestiniens mais aux Israéliens, puisque Israël détient toutes les ressources disponibles sur le territoire palestinien, et ces derniers n'ont pas, de ce fait, beaucoup d'espoir ». « Ajoutons à cela, poursuit notre interlocuteur, que la vision de ce deal du siècle et de ce pacte que veut Trump, exclut totalement les Palestiniens du jeu. Pour lui, l'Etat palestinien n'est qu'un facteur de plus qu'on peut facilement éliminer de l'équation et c'est ce qu'il a fait« . D'ailleurs, l'analyse rappelle que « les Américains ont essayé de négocier non pas avec les Palestiniens mais avec les Israéliens et les autres Etats limitrophes« . Mais le problème selon Benkhattab est « qu'on ne peut pas faire une paix durable et juste au Proche-Orient sans que les Palestiniens ne soient pris en compte en tant d'acteur majeur de l'équation« . Cela dit, les USA et les Israéliens ne se préoccupent pas beaucoup de la réaction des Palestiniens, qui selon eux, peuvent être gérés si cela se limite à des émeutes, ce qui s'explique, a-t-il dit, par le fait que les Américains et Israël « ont une lecture totalement réaliste certes, mais qui malgré son réalisme reste une vision et une lecture de la situation biaisée puisque pour eux, les Palestiniens sont de plus en plus isolés. Les Etats arabes les ont en quelque sorte délaissés, et à partir de ce moment-là, les Palestiniens sont isolés et peuvent accepter n'importe quoi, n'importe comment« . « Or, ce qu'ils refusent de comprendre justement, c'est que les Palestiniens malgré leur isolement et leur faiblesse ne lâchent pas l'affaire parce qu'il s'agit d'une question d'identité et d'existence« , argumente BenKhattab. D'après l'analyste, « les Américains ont cru pouvoir acheter de la paix avec les Palestiniens en achetant justement l'Etat palestinien, chose qui ne sera pas acceptée ni par les Palestiniens, d'ailleurs leur position est unanime là-dessus, ni par les Etats limitrophes puisque dans ce sens on sait très bien que 50 milliards de dollars ça parait beaucoup mais en 5 ans ce n'est rien« . Dans ce même registre, Benkhattab fait savoir que « pour construire un Etat palestinien propre et digne de ce nom, la communauté internationale doit pouvoir justement investir beaucoup plus d'argent pour garantir aux Palestiniens une vie décente et un Etat souverain« . Note consultant déploré, par ailleurs, que « la position arabe est devenue depuis longtemps molle à l'égard de la question palestinienne. On a observé une certaine mollesse. Pourquoi ? Parce que les pays arabes, chacun de son côté vit ses propres problèmes et on voit très bien que la situation dans le monde arabe n'est pas propice pour une position favorable aux Palestiniens« . D'après lui, ce qu'on verra par la suite, « c'est des positions pro-palestiniennes certes, mais une action pour la Palestine, je ne crois pas qu'on est arrivé à ce stade. Chaque Etat arabe est noyé dans les tumultes de ses propres problèmes« . Ce qu'en pense le Maroc Pour rappel, dans une réaction officielle à cette annonce, le Maroc a affirmé « apprécier les efforts constructifs de paix, déployés par l'administration américaine actuelle, en vue de parvenir à une solution juste, durable et équitable au proche-orient ». Ainsi, interrogé mercredi sur la position du Maroc au sujet du plan de paix annoncé mardi par le président des Etats-Unis M. Donald Trump lors d'un point de presse à l'issue de ses entretiens avec son homologue portugais, Augusto Santo silva, le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l'étranger, Nasser Bourita, a indiqué que la résolution de la question palestinienne est la clé de la stabilité au Moyen Orient, voilà pourquoi, le Royaume apprécie les efforts constructifs de paix, déployés par l'administration américaine actuelle, en vue de parvenir à une solution juste, durable et équitable à ce conflit. Le Maroc a suivi avec intérêt la présentation de la vision du président Trump, sur la question israélo-palestinienne, a-t-il ajouté, notant qu'au vu de l'importance de cette vision et de son ampleur, il examinera ses détails de manière très attentive. D'ores et déjà, le Maroc relève des éléments de convergence avec des principes et des options que le Maroc a toujours défendus dans ce dossier, à savoir notamment la solution à deux Etats et la négociation entre les deux parties comme démarche privilégiée pour parvenir à toute solution, tout en maintenant une ouverture au dialogue. « L'acceptation par les parties des différents éléments est, en effet, fondamentale pour la mise en œuvre et la durabilité de ce plan », a poursuivi le ministre, soulignant que si la dimension économique est importante, elle doit être complétée par une dimension politique. S'agissant de Jérusalem, Bourita a soutenu que le Maroc, dont le Souverain préside le Comité Al-Qods, réitère la position contenue dans « l'Appel d'Al-Qods » du 30 mars 2019, signé par le Roi, Amir Al Mouminine, et le Pape François, qui affirme la nécessité « que dans la ville sainte, soient garantis la pleine liberté d'accès aux fidèles des trois religions monothéistes et le droit de chacune d'y exercer son propre culte, de sorte qu'à Al Qods Acharif s'élève, de la part de leurs fidèles, la prière à Dieu, Créateur de tous, pour un avenir de paix et de fraternité sur la terre ». Le Royaume considère que le statut de Jérusalem doit être préservé, a dit le ministre, relevant que la décision finale doit faire l'objet de discussions entre les parties conformément à la légalité internationale. Et de faire savoir que le Maroc forme le souhait qu'une dynamique constructive de paix soit lancée, en vue d'une solution réaliste, applicable, équitable et durable à la question israélo-palestinienne, satisfaisant les droits légitimes du peuple palestinien, pour un Etat indépendant, viable et souverain, avec Jérusalem-Est comme capitale, et permettant aux peuples de la région de vivre dans la dignité, la prospérité et la stabilité.