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La COP 25 prête-t-elle au scepticisme ?
Publié dans Hespress le 09 - 12 - 2019

Le Maroc figure parmi les pays les plus engagés dans la lutte contre les assauts du dérèglement climatique, selon un rapport onusien rendu public à l'occasion de la COP 25 qui se tient du 02 au 13 décembre à Madrid. Cette revendication de « bon élève » du climat, a été réitérée par le chef du gouvernement dans son intervention à l'ouverture de la COP25 à Madrid.
Saâd Eddine El Othmani, a, dans ce sens, confirmé l'engagement du Royaume « à consolider sa stratégie de lutte contre les changements climatiques », avant de rappeler les nombreux programmes et stratégies lancés à cet effet, en partenariat avec des acteurs locaux, régionaux et internationaux en vue de dépasser l'objectif visant à réduire de 42% ses émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2030.
Mais, pour autant, si le Royaume et quelques autres rares Etats sont cités en exemple (68 pays ont annoncé présenter un nouveau plan climat pour Glasgow 2020), pour avoir revu leurs engagements en prévision de l'an prochain à la COP 26, ce n'est hélas pas le cas du gros de la troupe dont l'urgence climatique à laquelle la planète est confrontée importe peu. Le mercure a déjà gagné 1 °C et il n'a de cesse d'amplifier les catastrophes climatiques.
Cette COP 25 Madrid qui devait avoir lieu au Chili dont le slogan est « Time for action », en réalité, prépare le terrain pour la COP 26 de Glasgow où l'on devra s'accorder à fixer des objectifs plus ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES).
Mohamed Benata l'écolo au verbe haut et facile
Hespress en français a voulu savoir ce que pouvait bien représenter cette COP 25 pour l'écologie locale et qui mieux pour nous éclairer que le militant Mohamed Benata, Ingénieur Agronome, président de l'Espace de Solidarité et de Coopération de l'Oriental (ESCO), Coordinateur de l'Ecolo PlateForme du Maroc du Nord (ECOLOMAN), membre du Groupe de Travail Gdt-Maroc/WWF, initiateur de la Conférence Maghrébine pour la lutte contre le Gaz de schiste.
Connu pour avoir le verbe haut et facile tant il a roulé sa bosse en militant un peu partout pour la cause verte dans le Royaume et en dehors, Mohamed Benata est vite entré dans le vif du sujet et son constat ne prête pas à l'optimisme.
« En tant que militant écologiste, je suis très inquiet pour le devenir de l'Humanité. Le constat effectué par les scientifiques n'est pas rassurant du tout. Notre civilisation est basée principalement sur l'emploi des énergies fossiles (95% des énergies proviennent du charbon, pétrole et gaz). Ces énergies sont à la source de pollution et d'émission de gaz à effet de serre (GES) », nous dit-il.
Pour l'ingénieur en sciences de la nature la réponse au pollueur payeur est au-delà de la taxe carbone.
Il explique: « Depuis la révolution industrielle le taux du gaz carbonique (CO2) dans l'atmosphère n'a cessé d'augmenter. Nous sommes actuellement à plus de 400 ppm de CO2 dans l'atmosphère soit le double de sa teneur au début de la révolution industrielle. En plus du CO2 d'autre gaz comme le méthane qui a un effet vingt plus que le CO2 vient accentuer ce phénomène. Les plus pollueurs sont le plus riches, ils payent et s'en sentent moins responsables ».
Le GIEC alarmiste avec des chiffres alarmants
« Les rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), organe chargé par l'ONU de faire la mise au point des recherches scientifiques sur l'évolution du climat, sont de plus en plus alarmant. Ils démontrent que la communauté internationale n'a pas réussi à stabiliser les émissions des GES dans l'atmosphère, bien au contraire, le tableau s'assombrit de plus en plus », relève Mohamed Benata.
Et de tracer un noir tableau entre le dire et le faire des COP: « Les Conférences des Parties (COP) pour les changements climatiques tendent à rapprocher les avis des décideurs à travers le monde pour +décarboniser+ nos modes de production et œuvrer pour une transition vers l'utilisation des énergies propres et renouvelables. Mais malgré les bonnes déclarations des chefs de délégations, les efforts consentis ne sont pas à la hauteur pour arrêter l'augmentation de la température moyenne à 1.5°C fixée à l'occasion de la COP 21 de Paris ».
Le retrait des Etats-Unis et l'effet domino
Et soulignant le retrait de certains pays du traité de Paris comme les Etats-Unis le militant vert poursuit dans sa lancée.
« L'effet domino de ce retrait n'a certes pas eu lieu, mais plusieurs dirigeants dans le monde tendent à suivre l'exemple du président Donald Trump comme le président du Brésil qui encourage l'incendie de la forêt amazonienne. Ces incendies qui sont entrain de ravager les forêts primaires partout sur la planète comme l'Australie ou d'autres pays africains ou en Asie », déplore notre interlocuteur.
Quel changement donc peut apporter la COP 25 qui se tient à Madrid ? Pas grand chose semble penser Mohamed Benata. «Je pense que la position des USA par le retrait de l'Accord de Paris et les déclarations du président brésilien, Jair Bosonaro, et d'autres pays, planent sur les esprits et les négociations de l'actuelle COP . Tant que les décisions et les accords des COP ne sont pas contraignants pour tous les pays du globe, on ne peut être rassuré sur le devenir de l'Humanité de façon optimiste », souligne-t-il.
Dénoncer la mainmise politique sur le climat
Selon notre interlocuteur, «plusieurs associations de la société civile essayent autant que possible de faire pression sur les négociateurs lors de ces COP et d'influencer les politiques climatiques au niveau de leur pays. Parfois elles se regroupent dans des réseaux à l'échelle international pour agir sur les différentes délégations lors des négociations à l'occasion des COP pour trouver des solutions à la crise climatique. Malheureusement ces associations ou ces réseaux ne sont pas associées aux négociations officielles et ne figurent qu'en tant qu'observateurs ».
Très probablement, relève toutefois le militant, « avec les mouvements des jeunes qui ont eu lieu récemment à travers le monde à la suite de l'initiative de la jeune Greta Thunberg, suivie dans certains pays par des milliers de jeunes, la pression de la société civile sur les décideurs mondiaux peut donner des fruits« .
Tout l'espoir repose donc sur les jeunes, qui selon notre consultant « seront les électeurs de demain et pourront peut-être faire obstacle à la montée au pouvoir de personnalités climatosceptiques qui ne sont pas encore convaincues du réchauffement climatique comme Donald Trump ou Jair Bolsonaro ».


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