Le fleuve de la Moulouya qui prend racine dans les montagnes des Haut et Moyen Atlas n'atteint plus son embouchure en mer Méditerranée. Les défenseurs de l'environnement alertent sur ce drame écologique. Après plusieurs mois d'alerte par les défenseurs écologiques, le drame est finalement arrivé: asséché par le drainage de quatre barrages et deux stations de pompage, le fleuve de la Moulouya s'éteint avant son embouchure en mer Méditerranée, rapporte le site électronique Yabiladi. Plusieurs internautes activistes ont publié récemment sur les réseaux sociaux les images d'un cordon sableux séparant l'un des plus importants fleuves du Maroc à son embouchure. Parmi eux, Mohamed Benata, docteur en géographie et président de l'ONG Espace de solidarité et de coopération de l'Oriental (ESCO). Il dénonce « la politique de M. Aziz Akhannouch pour pomper toutes les eaux de la Moulouya », le débit écologique (écoulement minimal d'eau entre deux points, ndlr) ayant été « détourné pour l'usage agricole au détriment de la nature et de la biodiversité ». «La situation est très catastrophique et très critique et tout le monde est d'accord là-dessus. Nous aborderons ce problème avec la direction régionale des Eaux et forêts. Le dessèchement de la Moulouya va détruire le site, surtout avec des prélèvements d'eau qui ne laissent plus rien à la nature», confie-t-il à nos confrères. «La station de pompage du barrage Sultan Moulay Ali Cherif s'accaparait de la moitié du débit du fleuve. Ils ont mis en place une autre à Oulad Settout (mise en service en mars 2021) alors qu'il est prévu d'en rajouter d'autres. Seulement, avec ces deux stations déjà opérationnelles, le débit écologique n'est pas préservé et l'eau n'atteint plus la mer», explique-t-il. « Une première dans l'histoire de la Moulouya » «Pourtant, la Loi de l'eau prévoit un débit écologique nécessaire à respecter, quelle que soit la structure (station de pompage, barrage,...). Elle est donc claire et il existe des textes et des conventions. Malheureusement, la réalité sur le terrain est toute autre», regrette cet ingénieur agronome à la retraite, militant pour les questions environnementales. De plus, ce phénomène n'est pas sans conséquence sur la faune et la flore alentours. «Lorsque l'eau n'est plus courante et ne coule plus, il y aura automatiquement de la pétrification et de mauvaises odeurs dans les eaux qui stagnent au niveau de la zone. Il faut donc s'attendre à la mortalité des poissons et la dégradation de la biodiversité», détaille-t-il. Et d'abonder: «Nous sommes devant une vraie catastrophe écologique. Même pendant les années de sécheresse, l'eau coulait toujours dans la rivière et atteignait la mer. Le courant entre le fleuve et la mer n'a jamais été rompu dans l'histoire de la Moulouya, ce qui est une première.» L'associatif appelle alors à une «révision» de la politique agricole dans la région. «Le ministère ne doit pas pompé au-dessus de ce qui est possible. Il ne reste plus rien pour la nature avec les stations de pompages et les barrages. Ils doivent laisser un petit débit et veiller au respect de cette mesure», martèle-t-il. Ce n'est pas faute d'avoir averti à plusieurs reprises les autorités, en particulier « le gouverneur, le wali, la direction des Eaux et forêts, le Point focal de RAMSAR (Convention sur les zones humides d'importance internationale, ndlr) ». «Tout le monde est au courant mais rien n'a été fait», déplore Benata.