La première réunion trimestrielle du Conseil de Bank Al Maghrib (BAM) au titre de l'année 2021 pour décider de la conduite de la politique monétaire est prévue mardi prochain. Unanimes, les experts et économistes tablent sur le maintien du taux directeur inchangé au niveau de 1,5%. En effet, rappelons-le, depuis le déclenchement de la crise du Covid-19, la Banque Centrale avait décidé de baisser le taux directeur aux premier et deuxième trimestres 2020, de respectivement 25 points de base (Pb) et 50 Pb, suivies d'une pause aux troisième et quatrième trimestres. « Lors du prochain conseil de Bank Al Maghrib, il est fort probable que le taux d'intérêt directeur soit maintenu à son niveau actuel fixé à 1,5% », estime l'économiste et spécialiste de politique de change, Omar Bakkou. Contacté par la MAP, M. Bakkou relève que ce taux, qui demeure le plus bas historiquement depuis son instauration en tant qu'instrument phare de refinancement des banques auprès de la banque centrale et, partant, de conduite de la politique monétaire, pourrait en effet être considéré comme approprié. « Cela en raison de l'absence d'arguments solides à même de justifier sa réduction ou son augmentation », précise l'expert. D'après M. Bakkou, une baisse du taux d'intérêt directeur manque d'arguments solides en faveur de son adoption, car une telle décision serait au mieux « insuffisante » pour améliorer les conditions de financement de l'économie nationale, au pire « nuisible » pour l'épargne nationale.
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Dans son analyse, M. Bakkou explique qu'une baisse serait insuffisante pour pouvoir exercer un impact significatif sur l'amélioration des conditions de financement de l'économie nationale, du fait de son faible effet éventuel sur la demande de crédits bancaires, évoquant deux principales raisons. D'une part, la demande de crédits bancaires, particulièrement ceux destinés au financement des investissements, demeure fortement influencée par l'état défavorable de la conjoncture économique actuelle. « Pour preuve, les baisses précédentes du taux d'intérêt directeur, ainsi que les différentes initiatives des autorités publiques en vue de faciliter l'accès au financement, n'ont pas réussi à provoquer une reprise des crédits », a expliqué M. Bakkou. D'autre part, a-t-il poursuivi, la demande de crédits bancaires reste liée aux taux d'intérêt débiteurs lesquels demeurent partiellement hermétiques aux baisses des taux d'intérêt directeurs, particulièrement dans la conjoncture économique actuelle marquée par l'augmentation naturelle de la prime de risque. En outre, l'expert souligne qu'une baisse serait « nuisible » pour l'épargne nationale, car elle serait susceptible d'exercer un impact négatif sur les taux d'intérêt créditeurs, ce qui risquerait de décourager les dépôts bancaires, particulièrement les comptes sur carnet et les dépôts à terme. Parallèlement, l'économiste souligne qu'une augmentation du taux d'intérêt directeur manquerait également d'arguments solides en faveur de son adoption.
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M. Bakkou avance, dans ce sens, deux principales raisons. Il s'agit de « l'absence de risques inflationnistes à l'horizon, à la faveur notamment de la baisse prévisible des prix des produits alimentaires inhérente aux perspectives d'une bonne année agricole, de la stabilisation des prix du pétrole ainsi que la stagnation de la demande globale provenant des ménages. La deuxième raison est la persistance de risques pesant sur la situation financière des banques, qui a été fortement endommagée par la crise du Covid-19 (baisse importante des sources de financement gratuites des banques, les dépôts à vue, à la suite des retraits massifs d'argent de la clientèle, augmentation des créances en souffrance, décélération des diverses recettes générées au titre des services financiers dispensés par les banques). Pour leur part, les analystes de BMCE Capital Research (BKR) anticipent également un statu quo du taux directeur. »Bank Al Maghrib devrait, selon toute vraisemblance, renouveler en l'état son dispositif d'intervention au niveau du marché monétaire. Le taux directeur et la réserve obligatoire devraient ainsi se stabiliser à 1,5% et 0% respectivement », indique BKR dans leur dernier « Flash strategy -Preview BAM », publié mercredi. « Nous pensons qu'il est plus probable que le Conseil de Bank Al-Maghrib maintient le taux directeur inchangé au niveau de 1,5% lors de ce prochain Conseil, et ce dans l'attente d'une transmission complète des baisses du taux directeur vers les taux débiteurs et d'une reprise de la demande de crédit aussi bien des entreprises que des ménages », estime, de son côté, CDG Capital Insight, également dans son flash consacré au Conseil de BAM.