Le problème de la mobilisation de l'épargne au Maroc est toujours ressenti avec acuité. Il est vrai que lépargne nationale continue de se maintenir à un niveau satisfaisant gravitant autour de 25,3% du PIB, permettant ainsi de couvrir la totalité des investissements tout en dégageant un excédent de financement de près de 1,3 point du PIB. Ce progrès est attribuable notamment à la performance de lépargne extérieure qui trouve son origine dans la progression des transferts des MRE et des recettes du tourisme. Nonobstant le vaste chantier de réformes visant à libéraliser et moderniser le système financier et à améliorer le circuit de l'épargne institutionnelle, les résultats tant escomptés tardent toujours à se réaliser. En dépit des efforts fournis dans le domaine financier, certaines contraintes subsistent. Le statu quo persiste puisque les placements des agents non financiers restent orientés vers la constitution davoirs à vue ou réalisables à court terme. De fait, les actifs financiers des entreprises non financières concernent, plus particulièrement, les avoirs liquides et les placements à vue sous forme notamment de comptes dépargne. Pour sa part, lépargne longue se consolide toujours à la faveur des provisions techniques des sociétés dassurances et des organismes de retraite et de prévoyance. Nombreux sont les observateurs qui qualifient cette tendance dencourageante, témoignant en cela «de la confiance des agents dans les perspectives de léconomie domestique et dans la poursuite des restructurations du tissu industriel». Un bémol est toutefois à signaler: dans cette configuration, signalet-on, le passif des banques, de maturité courte et volatile, ne permet pas à ces mêmes agents de sadosser à cette épargne pour délivrer des crédits à long terme sans courir des risques considérables. Epargne liquide Et le moins que lon puisse dire, cest que lépargne au Maroc reste foncièrement liquide. Ce type de placement de lépargne financière détient toujours la part du lion, avec un taux de près de 80%. Du fait du ralentissement de lactivité économique, de la raréfaction des opportunités de placement, les agents jettent toujours leur dévolu sur les placements relativement liquides et ne comportant que peu de risques de perte de capital. A cela sajoute le fait que lindustrie de gestion de portefeuille fonctionne avec peu de moyens de diversification. Au passage, à rappeler quenviron 90% des actifs gérés par les OPCVM sont investis dans les bons du Trésor. Et pour preuve, les avoirs liquides et les placements à court terme constituent lessentiel de lépargne financière, affectant négativement lefficacité de la participation de lépargne nationale dans le financement de linvestissement. Les conséquences de cette situation sont la sous-exploitation des ressources bancaires et limportance des crédits à court terme dans la structure des crédits distribués. La capacité du secteur bancaire au financement de linvestissement se trouve, de ce fait, limitée en dépit des réaménagements successifs apportés au système de garantie accordé aux entreprises. Selon le ministère des Finances et de la Privatisation, dans ce contexte, lépargne nationale na représenté que 27,4% du PIB au cours de la période 2001-2004, après avoir été de 21,9% durant la période 1997-2000. Cette progression est due en particulier à lexpansion des transferts des MRE. En parallèle, lépargne intérieure sest établie en moyenne à 19,1% du PIB sur la période 2001-2004 après 17,1% entre 1997-2000. Avec une telle progression, lépargne nationale a dégagé une capacité de financement de léconomie nationale couvrant la totalité des investissements depuis 2001. Cet excédent représentait léquivalent de 3,7% du PIB durant la période de référence contre un besoin de financement de 0,7% du PIB. Somme toute, un taux insuffisant pour permettre à l'économie marocaine de réaliser un taux de croissance supérieur susceptible de graviter autour des 5%. Par ailleurs, ce caractère liquide de lépargne financière na pas permis de profiter pleinement à linvestissement. Les avoirs liquides et les placements à court terme ont représenté plus de la moitié de lépargne mobilisée par le secteur financier et 55% des placements financiers des agents non financiers. Les placements à moyen terme, lépargne institutionnelle et celle collectée par les OPCVM, ainsi que les titres émis par les sociétés, bien quils aient réalisé une progression appréciable au cours de cette période, continuent néanmoins de représenter une part relativement faible de lépargne financière totale, soit 34%. Cette prédominance de lépargne liquide sexplique, dun côté, par la baisse du rendement sur le marché boursier favorisant les placements relativement liquides et à faible risque et, de lautre, par la tendance baissière des taux à moyen et long termes générée par la faible diversification des produits financiers utilisés dans la gestion de portefeuille et la hiérarchie des taux dintérêt. Cette épargne financière est drainée, en majeure partie, par les banques qui participent pour une large part dans le financement de léconomie. Une seule parade pour rectifier le tir : lépargne des entreprises et des ménages susceptible dêtre drainée par les organismes de prévoyance et de couverture sociale. Si cette épargne venait à être stimulée, elle permettrait une meilleure diversification des risques, tout en dynamisant linvestissement domestique. Encore quil faille baliser le terrain à un développement des produits dassurance qui représente, aux yeux des experts, un puissant levier damélioration des performances de croissance.