Si son nom ne vous évoque rien, cest uniquement parce quil est très discret et quil naime pas sexposer. Karim Saloui, chacun de nous la au moins croisé une fois au travers de ses compositions, ses arrangements, ses jingles publicitaires, ses habillages TV et radio. Dans le domaine de la musique, il nest plus à présenter puisquil a 20 ans de métier. Grand de taille, imposant, Karim Slaoui fera pourtant de son mieux pour ne pas se faire repérer. La discrétion chez lui est presque une religion. Musicien, compositeur, arrangeur, pour cet artiste né, faire de la musique ce nest certainement pas pour devenir célèbre, mais pour assouvir une passion qui lanime depuis son enfance. Né en 1970 à Casablanca de parents originaires de la ville de Fès, Karim Slaoui devra faire face à lopposition de ses parents à son rêve de faire carrière dans la musique. «Pour mon père, la musique nest pas un vrai métier ni une profession qui nourrit son homme». Et pourtant, elle lui colle à la peau depuis quil avait lâge de 7 ans. «La musique est pour moi une force incompréhensible». De 1989 à 1995, Karim Slaoui se rend à Paris où il poursuivra ses études dart appliqué et darchitecture dintérieur à lécole Boulle. Mais la musique na jamais été bien loin. En effet, Karim enchaînera des boulots dans des restos ou dans des studios denregistrement pour continuer à vivre pleinement sa passion tout en finançant ses études. Une fois diplômé, il restera en France quelque temps où il réussira à se frayer un chemin dans le monde du showbiz en tant que musicien arrangeur. Et cest en France quil se découvrira une vocation : celle de faire connaître le patrimoine musical marocain. Une vocation qui ne le quittera jamais. «À la fin de mes études, je pensais exercer le métier pour lequel jétais formé et continuer ma carrière dans le monde de la musique. Mais je me suis vite rendu compte que ce nétait pas chose facile». De retour au Maroc et en attendant de trouver un emploi approprié, Karim Slaoui se familiarise avec le milieu artistique marocain et fera la rencontre de Moncef Adyel, arrangeur aussi. «À lépoque, je navais pas encore décidé de la voie à choisir et cest Moncef qui a encouragé ma décision pour la carrière artistique, au lieu de travailler dans le design intérieur». La sauce prend rapidement au Maroc où Karim Slaoui commence à faire des arrangements musicaux pour des sommités comme Abdelhadi Belkhayat ou Latefa Raafat. Avec cette dernière, Karim reprend le tube «Alach ya Ghzali», ce qui lui vaudra une grande reconnaissance dans le milieu dautant que ses arrangements apportaient une touche de modernité à de grands classiques de la chanson marocaine. Mais cette notoriété ne changera rien au tempérament de lartiste qui préfère rester discret et loin des projecteurs. Quà cela ne tienne, puisquil était souvent sollicité par les medias. Discret, Karim Slaoui a une volonté plus dure que le fer. En effet, il y a une année, alors quil était à vélo, il fut victime dun accident qui lui occasionnât une fracture de la cheville gauche. Les médecins étaient pessimistes et larrangeur ne pouvait plus marcher quà laide dune béquille. Une année plus tard, il parvient à marcher normalement. Et bientôt, il reprendra le vélo, un exercice auquel il tient beaucoup. Karim Slaoui na pas fini de nous surprendre puisquil continue de composer, jouer et arranger, mais surtout revisiter les grands classiques. Dailleurs, il travaille actuellement avec le grand luthiste marocain Saïd Chraïbi sur un projet colossal. Celui de revisiter le patrimoine musical marocain, y compris les chants tribaux des régions du Maroc et larranger de manière à en faire une uvre philharmonique. «Lidée est de réorchestrer les chansons traditionnelles marocaines avec des arrangements modernes et universellement connus pour diffuser le patrimoine musical sur le plan universel». Un projet ambitieux qui nécessite beaucoup de moyens. Karim Slaoui, avec sa maquette prête, cherche aujourdhui à monter tout un spectacle qui reprend ce patrimoine revisité de manière subtile. Le talent de Karim est inné puisquil est de ces compositeurs qui travaillent sans partition. «Souvent, quand je fais des arrangements ou des compositions, je commence le travail comme pour construire une maison. Il faut être très attentif au sujet de la chanson et à ses paroles, mais également à lidentité de lartiste pour mieux trouver les sons et le rythme appropriés. Je favorise toujours le recours à des sons de notre patrimoine marocain. Car il ny a pas mieux !». En tant que musicien, compositeur, accordéoniste, arrangeur et ingénieur du son, Karim Slaoui a une oreille difficile. «Jaime écouter tout genre de musique, sauf la musique fast-food !». Il apprécie particulièrement le compositeur français Franck Pourcel. Il nen demeure pas moins quil porte beaucoup daffection aux compositeurs nationaux. Dailleurs, lun de ses futurs projets est de reprendre les grands tubes marocains et de les retravailler en musique instrumentale pour revaloriser le travail de compositeurs comme Abdelkader Rachdi. «Les Marocains répètent souvent de grands classiques dont ils ne retiennent que le nom du chanteur, mais rarement le nom du compositeur. Lidée est de faire sortir certains noms de lombre car ils avaient beucoup de succès sans pour autant que le public ne les connaissent». Derrière sa table de mixage et darrangement, Karim Slaoui se libère et se lance dans lexploration de notre patrimoine musical, quil sagisse des chants tribaux ou des grands tubes de chansons marocaines classiques. Son ambition est que la musique marocaine atteigne luniversalité. Bon vent !