Le développement fulgurant qu'ont connu les OPCVM nécessite de plus en plus la mise à la disposition des épargnants d'outils d'information et de mesure de performance crédibles, pointus et facilement compréhensibles. Mais quand la détention d'informations censées être publiques est considérée comme étant un privilège, il est évident qu'il reste encore un bon bout de chemin à parcourir. Mis en place pour drainer une partie de l'épargne longtemps orientée vers les instruments de placement classiques, les OPCVM ont connu un développement appréciable depuis 1995. Il faut dire que les mesures fiscales incitatives qui ont accompagné leur lancement ont considérablement favorisé l'essor de ce type de produits. Aujourd'hui, la multiplication des sociétés gestionnaires de fonds et la diversité des fonds proposés mettent les épargnants devant des choix de plus en plus difficiles. Surtout si l'on tient compte du fait qu'ils ne disposent guère de suffisamment d'informations fiables et facilement compréhensibles. Les performances des OPCVM rendues publiques régulièrement par l'ASFIM (Association des sociétés gestionnaires de fonds) ne permettent pas en effet aux épargnants de procéder à une lecture critique, sinon objective des données dont ils disposent. D'où la nécessité de mettre en place des outils d'information et de mesure de performance crédibles et pointus. C'est d'ailleurs sous cet angle qu'il faut appréhender l'initiative de Wafa Gestion qui a organisé, mardi dernier, un séminaire sous le thème : « Performances des OPCVM : analyse des critères de sélection et de classement des portefeuilles au service de l'investisseur». La mesure de performance a pour objectif, entre autres, de déterminer la rentabilité d'un fonds sur une période donnée. Cette démarche n'est pas pour autant aussi facile. Car le rapport de la valeur finale du fonds, augmentée des dividendes éventuellement perçus, à la valeur initiale du fonds ne donne pas forcément au gestionnaire du fonds la rentabilité correcte réalisée. Dans cette optique, il reste difficile de procéder à une comparaison des performances. Pour Olivier Maesracci, Directeur des Etudes chez Europerformance, qui a animé cette rencontre, la comparaison des performances à ce niveau comporte plusieurs limites liées, entre autres, aux différences de calendriers, aux écarts entre les heures et les jours de valorisation, ainsi qu'aux erreurs éventuelles au niveau de la collecte de données. La qualité de gestion Etablir un classement de fonds sur la seule base du critère de rentabilité ne permet pas d'apprécier convenablement la qualité de gestion, dans la mesure où il faudrait prendre en compte le niveau de risque pris. A cet égard, la qualité du gestionnaire s'appréhende en combinant sa performance en fonction du niveau de risque pris. Mais encore faut-il pouvoir mesurer le risque. Selon Maestracci, les professionnels utilisent actuellement trois principales mesures du risque : la volatilité, qui présente l'inconvénient d'être manipulable, le bêta et l'écart de suivi, qui mesure le risque supplémentaire pris par rapport aux mesures du marché. Néanmoins, souligne-t-il, l'on s'achemine actuellement vers un nouveau modèle de mesure du risque, notamment la Value at Risk qui est «égale à la mesure de la perte la plus élevée que peut encourir un portefeuille pendant un intervalle de temps donné avec un certain intervalle de confiance, dans des conditions de marché normales. Cette perte est conditionnée à une certaine probabilité de réalisation, qui constitue l'intervalle de confiance choisi». Description des mesures traditionnelles Dans le cadre de la mesure de performance, les mesures ajustées pour le risque les plus usitées sont le ratio Sharpe, le ratio de Treynor et l'alpha de Jensen. Le ratio Sharpe est défini comme le ratio de la rentabilité excédentaire moyenne du portefeuille (l'écart entre la rentabilité moyenne du portefeuille et le taux sans risque) et de l'écart-type de la rentabilité du portefeuille. Il est sous-tendu par le fait que le gestionnaire aurait pu investir dans un actif sans risque. Le fonds est d'autant meilleur que le ratio est élevé, puisque c'est celui qui a achevé la meilleure performance au moindre risque. Ainsi, lorsqu'il est positif, plus le ratio de Sharpe est élevé, plus la prise de risque est rémunérée. Le ratio négatif signifie que le portefeuille n'a pas sur-performé un placement sans risque. En ce qui concerne le ratio de Treynor, il permet une mesure synthétique du rendement total et du risque systématique, utilisant le risque marginal du portefeuille en lieu et place du risque total, alors que l'alpha de Jensen donne une mesure de la valeur ajoutée du gérant... L'ensemble de ces mesures, si elles présentent l'avantage d'être faciles à estimer, présentent néanmoins des limites inhérentes, entre autres, à la variation du niveau de risque au cours d'une période considérée, au portefeuille de référence utilisé pour estimer les paramètres (alpha, bêta...). Le choix du benchmark utilisé influence donc considérablement, voire bouleverse les classements de performance. D. W. A quand un palmarès des fonds au Maroc ? Le manque d'informations fiables, ou plutôt la rétention de l'information rend difficile toute velléité d'établir un palmarès des fonds présents au Maroc. Il est indispensable, tel qu'il est ressorti des débats qui ont suivi le séminaire, que les mesureurs de performance, à l'instar de Finaccess, l'ASFIM, les gestionnaires de fonds, ainsi que la presse spécialisée travaillent ensemble pour élaborer le cadre technique nécessaire à la concrétisation d'un tel projet. Evidemment, suivant cette logique, chacun devra faire ce qu'il sait faire...