* LAMST va mieux contribuer à la promotion des sciences de la terre en stimulant les échanges entre chercheurs nationaux et chercheurs étrangers. * La forte demande en produits miniers a poussé à louverture danciennes mines et à larrivée de nouveaux opérateurs pour la recherche et lexploitation de gisements. * Le point avec Abdallah Mouttaki, Directeur de linfrastructure géologique et de lexploration minière à lOffice national des hydrocarbures et des mines (ONHYM). Finances News Hebdo : Quelles sont les raisons qui vous ont motivé pour la création de lAssociation marocaine des sciences de la terre (AMST) ? Abdallah Mouttaqi : Cette question peut sentendre sur deux registres : celui de la motivation de la communauté des acteurs qui ont pris part à cette création, ou celui de ma motivation personnelle. Cest, à lévidence, le premier de ces deux registres qui est déterminant, car la création dune telle association, à léchelle nationale, exige une large prise de conscience de son utilité et la mobilisation de très nombreuses volontés. LAMST a été créée suite à la demande émanant principalement de chercheurs géologues désireux de disposer dun espace ouvert déchange et de partage autour de projets nationaux et internationaux, qui soit un espace neutre jouant un rôle de connecteur entre les acteurs venant dhorizons divers qui opèrent dans le domaine des sciences de la terre : universités, professionnels miniers publics et privés, sociétés de services Tous ces opérateurs, qui défendent des enjeux différents, réunis au sein dun espace tiers et médiateur, vont mieux contribuer à la promotion des sciences de la terre en stimulant les échanges entre chercheurs nationaux et chercheurs étrangers et en faisant mieux connaître les grandes questions relatives aux sciences de la terre tant à la communauté scientifique quà la société civile. Aujourdhui, il faut en effet ouvrir davantage les sciences de la terre sur notre société devenue citoyenne, qui invite à un partage plus large des responsabilités et à une coopération plus étroite entre les différents acteurs concernés. F. N. H. : Est-ce que lAssociation est plus tournée vers les professionnels que vers le monde universitaire ou vers celui de la recherche ? A. M : LAMST nest pas tournée vers tel ou tel groupe spécifique de professionnels, mais elle a pour vocation dêtre un espace de rencontre, de partage et daction ouvert à tous les opérateurs qui uvrent dans le domaine des sciences de la terre dans sa définition plurielle, qui va de lenseignement et de la recherche jusquaux problématiques de lenvironnement, en incluant évidemment la reconnaissance des ressources de notre sous-sol - minières et hydrogéologiques - mais aussi les études préalables aux grands travaux dinfrastructure, la prévention contre les risques naturels, le géotourisme ainsi que le soutien de la formation dans ces domaines. Lors de la création de lAssociation, la question a été largement examinée et nous avons choisi déviter que lAMST ne soit confinée dans des champs exclusivement techniques. Au contraire, lAMST sest fixé une mission de facilitation du dialogue entre acteurs scientifiques, économiques et sociaux. Louverture sur lexpertise internationale constitue aussi un axe important pour notre Association ; dans ce cadre, une convention dentente vient dêtre signée avec lAssociation géologique du Canada pour un partenariat gagnant- gagnant et le développement en commun de projets structurants dans ce domaine, dans les deux pays. F. N. H. : Est-ce que lAssociation a les moyens de ses ambitions ? A. M. : Oui, absolument. La réalisation des objectifs que notre Association sest assignés passe par trois composantes : la qualité de ses géoscientifiques, la disponibilité de moyens financiers et la pertinence des projets proposés. Sur le plan humain, les membres actifs de lAMST viennent dhorizons complémentaires pour une gestion intégrée des projets : chercheurs universitaires de haut niveau, établissements publics dont la compétence est notoirement reconnue, ici et à létranger, grands opérateurs miniers privés nationaux et sociétés de services et dinvestissements qui opèrent dans le domaine de la géologie, de lenvironnement et de la géomatique, tous ayant déjà fait preuve dun sens élevé de leur responsabilité sociétale. En témoigne lengagement de personnalités comme Mme Amina Benkhadra, ministre de lEnergie et des Mines, de lEau et de lEnvironnement et Directeur général de lONHYM qui assure la Présidence dhonneur de lassociation, comme MM. A. Abarro (PDG de Managem), D. Traki (PDG de CMT) et H. Moussaria (PDG de Geomatic) également membres honoraires de lAMST. LAssociation peut donc compter sur le soutien des grands opérateurs miniers du pays et, par ailleurs, certaines banques daffaires lui ont, dès à présent, manifesté dimportantes dispositions de sponsoring à condition, bien entendu, que leur soient proposés des projets cohérents et pertinents comme vecteurs du développement durable du Maroc. Tous ces opérateurs sont également sensibles au rôle que les sciences de la terre jouent dans le développement humain de notre pays. F. N. H. : Comment expliquez-vous lexistence de très peu de centres de recherche privés dans notre pays ? A. M : Effectivement, dans le passé, les projets de recherche et développement dans ce domaine étaient considérés par les sociétés privées comme étant des projets à risques et dans lesquels elles ne sinvestissaient pas. Cette activité était assurée par les universités et instituts affiliés, les écoles dingénieurs, en collaboration avec le privé dans le cadre dun partenariat entre les deux parties, également par les établissements publics à caractère commercial et industriel comme lONHYM et lOCP par le biais du Cerphos, conformément à leurs missions et à stratégies. Depuis quelques années et conscient de limportance de la RD dans la valorisation des ressources minières, le secteur privé a commencé à mettre en place des laboratoires dédiés à ce type de recherche. Lexemple étant le centre de recherche de Managem, sur le site de la mine de Hajjar dans la région de Marrakech et qui compte à son actif de nombreuses découvertes de dimension mondiale pour la valorisation des ressources minières de notre pays. Je pense quune telle répartition des travaux entre les secteurs public et privé répond aux besoins actuels de notre pays et que la création de nouveaux centres de recherche privés, ou de recherche précompétitive, ne pourrait être envisagée que dans le cadre dune vision de dimension régionale correspondant a minima à celle du Maghreb ou de lAfrique de lOuest. F. N. H. : La demande en produits miniers a fortement augmenté ces dernières années ; est-ce qu'il y a eu un impact sur les efforts de recherche et de prospection minières au Maroc ? A. M : Effectivement, lindustrie minière internationale se trouve dans une conjoncture favorable depuis 2003, suite à une augmentation soutenue de la consommation des matières premières minérales, boostée surtout par la Chine. Les cours des métaux connaissent une flambée sans précédent et les travaux dexploration sont en plein boom. Pour notre pays, cette conjoncture sest traduite par la reprise des travaux dexploitation sur danciens gisements qui étaient fermés dans le passé, notamment de cuivre ; la manifestation dintérêt pour certaines concessions de plomb, fer, manganèse et soufre, ainsi que par larrivée de nouveaux opérateurs miniers pour le développement de gisements détain et la reprise de la recherche de luranium, du fer, du zinc et de métaux précieux. F. N. H. : Quels sont les grands axes de recherche au Maroc et quen est-il des zones de recherche ? A. M : Aujourdhui, les travaux de recherche minière à lONHYM sarticulent autour de trois axes majeurs : métaux précieux (16 projets pour lor et largent), métaux de base (08 projets pour le plomb, zinc, cuivre ) et roches et minéraux industriels (02 projets pour la recherche des argiles, dolomite, silice ). La répartition budgétaire en 2007 sur ces trois axes a été de lordre de 68% pour les métaux précieux, 24% pour les métaux de base et 8% pour les roches et minéraux industriels. Ces travaux couvrent les zones les plus prometteuses sur lensemble du territoire national, notamment les provinces du Sud et lAnti-Atlas pour les métaux précieux, la région des Jebilets- Guemassa (autour de la ville de Marrakech) et le Maroc central pour les métaux de base et les bassins tertiaires de la région de Nador et du Gharb pour les roches et minéraux industriels. Il est très important de noter que les travaux de recherche dans les provinces du Sud nont démarré quà partir de 2002 et couvrent aujourdhui 34% du budget total affecté à la recherche minière. Sur ces zones, considérées jusqualors comme des secteurs vierges, de nouveaux prospects ont été délimités ouvrant ainsi de sérieuses nouvelles perspectives au développement minier de notre pays.