* Plus d'une semaine après l'explosion de deux kamikazes et la mort d'un troisième, les habitants du quartier El Farah sont toujours sous le choc et traumatisés à l'idée que les membres de la cellule terroriste ont vécu parmi eux pendant plus de deux mois. * Témoignages recueillis sur un événement qu'ils ne sont pas près d'oublier. Aissam, 36 ans, habitant du quartier El Farah «Je n'étais pas présent au moment des faits, mais ma famille était sur place. Donc, mon premier réflexe était de les appeler. J'ai appris qu'ils ont été tous évacués du quartier. Les policiers ont fouillé les maisons de fond en comble à la recherche d'éventuels suspects. Depuis ce mardi noir, le quartier ne désemplit pas de curieux ni d'agents de police. Et cela met nos nerfs à rude épreuve suite à l'explosion du deuxième kamikaze qui s'est faufilé parmi la foule avant de commettre son forfait. Et puis, à chaque fois qu'on entend du mouvement dans la rue, c'est la panique générale de crainte qu'il reste encore des fuyards qui reviendraient perpétrer un acte terroriste dans le quartier». Ali, client de la droguerie du boulevard Bouchaïb Doukkali «Je n'en reviens pas du tout. J'ai assisté à la deuxième explosion survenue le mardi 10 avril vers 19 h. J'ai été choqué de voir le kamikaze sortir de la foule et se faire exploser. Je suis resté presque sourd pendant une heure au milieu d'une bousculade immense. Les agents de sécurité ont contraint le propriétaire à fermer boutique et j'ai dû aller chercher une autre droguerie, et depuis, les choses se sont calmées et je suis revenu chez mon fournisseur. Mais je reste sur mes gardes, c'était une expérience terrible !». Amina, salariée «Je n'ai pas entendu la première explosion, jusqu'au moment où je me rendais au travail. Mais, en sortant de chez moi, j'ai été choquée par ce que j'ai vu, alors j'ai préféré partir au travail parce que l'on parlait de suspects en fuite dans le quartier. Le soir, la deuxième explosion nous a fait sursauter mon mari et moi. Tout le monde courait dans tous les sens. Et j'ai été étonnée de voir les gens s'attrouper alors que je mourais de trouille. C'est à ce moment-là que les policiers ont commencé à inspecter les maisons et les toits. Mais depuis vendredi, la vie a repris son cours malgré la présence des voitures de police». Hind, étudiante universitaire «C'est la dernière chose à laquelle on s'attendait dans le quartier. Mais à quelque chose malheur est bon. Ce quartier qui connaît un important taux de criminalité n'a jamais accueilli une telle concentration de services de sécurité. Nous avons même eu droit à un hélicoptère ; résolument, en deux jours, ils nous en ont mis plein les yeux. D'habitude, en cas de bagarre, il était rare de voir une simple estafette rôder dans les parages, et là, c'est toute l'artillerie qui a débarqué. Durant ces deux jours, j'ai été déstabilisée et pour me rendre à la Faculté, je prenais mon souffle avant de prendre le bus». Abdeljalil, 40 ans, travaillant dans la fourrière de Sidi Moumen «Moi, je suis le suspect idéal ! En plus d'être choqué de ce qui est arrivé dans mon quartier, j'ai été terrorisé à l'idée d'être mené au commissariat pour y être interrogé. Mon seul tort est que je travaille à la fourrière de Sidi Moumen et qu'au cours de sa recherche d'éventuels suspects, la police a retrouvé chez moi des cartons contenant des bouts de ferraille et des clous. J'ai été mené manu militari pour être interrogé, je n'ai été relâché que deux jours plus tard, mais avec plus de peur que de mal. Maintenant, retour à la vie normale, quoique ces évènements resteront toujours dans les annales de ce «derb ». Jamal, 24 ans, salarié vivant au quartier El Amal «Je vis dans le quartier mitoyen à Hay El Farah. La survenue d'attentats kamikazes dans ce quartier m'a vraiment surpris, j'ai même été étonné que les kamikazes y ont vécu. Car, au quartier El Farah, les gens sont «peace and love», ou au pire on peut assister à des bagarres entre soûlards. Malgré la proximité, chez moi au quartier El Amal, la vie quotidienne n'a pas vraiment été perturbée par ces événements, les cafés, les écoles et les commerces sont restés ouverts, mais j'ai noté une forte présence de policiers en civil. Le plus étonnant aussi, c'est la foule qui s'est amassée sur les lieux des explosions ; on dirait que les gens ne mesurent pas le danger encouru. J'ai même vu des femmes partir avec leurs enfants sur place pour voir ce qui se passait. Même après la deuxième explosion, les gens ont fui, mais sont aussitôt revenus voir ce qui se passait ! Il y en a même qui ont pique-niqué toute la journée sur place !».