Les citoyens se sont habitués, ces dernières années, à voir éclater des affaires scandaleuses impliquant de hauts commis de l'Etat, avec pour corollaire des actions en justice et des incarcérations. Mais les «affaires» mettant en cause des hauts représentants de la diplomatie marocaine sont rares, pour ne pas dire inexistantes. Du moins, s'il y en a eu, elles n'ont guère été portées sur la place publique. Pourtant, lundi dernier, le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération (MAEC) s'est fendu d'un communiqué pour annoncer qu'il a dépêché une mission d'inspection, comprenant également des éléments de l'Inspection générale des finances à l'Ambassade du Maroc à Antananarivo. Cette décision, informe le MAEC, «fait suite à des informations recoupées selon lesquelles l'ancien ambassadeur à Madagascar aurait procédé notamment à des détournements de fonds à l'occasion d'opérations humanitaires décidées en faveur du peuple malgache. L'ancien ambassadeur à Madagascar aurait également procédé à des actions d'ingérence dans les affaires intérieures du pays, en violation des usages diplomatiques et en contradiction avec la tradition diplomatique marocaine». «Il aurait procédé à des agissements discriminatoires à l'égard des communautés nonmusulmanes du pays, sans respecter la diversité ethnique et religieuse de Madagascar, ni les valeurs d'ouverture et de tolérance prônées par la religion musulmane et portées par le SM le Roi, Commandeurs de croyants», précise le communiqué. Lequel nous renseigne sur plusieurs faits. D'abord, dans la forme. Il est écrit au conditionnel. Mais la tutelle auraitelle pris le risque d'informer l'opinion publique si elle n'avait pas de certitudes ? Difficile de le croire. Cela, d'autant que le Souverain était en visite officielle à Madagascar. Ensuite, dans le fond. L'ancien ambassadeur aurait commis trois fautes graves : détournements de fonds, qui sont passibles d'une peine de prison, l'ingérence, qui est tout sauf diplomatiquement correct, et agissements discriminatoires, en parfaite contradiction avec les messages de tolérance véhiculés par le Souverain. Pour un diplomate, et si les faits s'avéraient justes, ce serait la totale. En tout cas, cette affaire est bien embarrassante pour l'image du Maroc. Pour autant, on apprécie la promptitude des Affaires étrangères dans sa communication, surtout pour une affaire aussi délicate. On appréciera aussi que la tutelle fasse preuve de la même transparence pour livrer les résultats de l'enquête de l'Inspection générale des finances. Surtout, l'opinion publique attend, s'il y a effectivement détournements de fonds, qu'il y ait des suites judiciaires. Immunité diplomatique ou pas.