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Abdelkader Masnaoui, une force tranquille
Publié dans Finances news le 01 - 10 - 2007

Un Monsieur! C’est la première chose qui m’est venue à l’esprit en rencontrant pour la première fois Abdelkader Masnaoui, le fondateur du cabinet Masnaoui Mazars. Non pas uniquement en terme de gabarit, mais également pour son influence et son poids sur la scène économique. Abdelkader Masnaoui n’en est pas moins modeste.
Un Monsieur! C’est la première chose qui m’est venue à l’esprit en rencontrant pour la première fois Abdelkader Masnaoui, le fondateur du cabinet Masnaoui Mazars. Non pas uniquement en terme de gabarit, mais également pour son influence et son poids sur la scène économique. Abdelkader Masnaoui n’en est pas moins modeste. Bien au contraire, il confirme les avis collectés à son propos.
Mais s’il est prédisposé à répondre aux questions de la presse, il faut néanmoins le convaincre de la pertinence de la chose. Et le convaincre est un bien difficile exercice.
Comment cet homme a-t-il bâti sa réputation et sa carrière ? Il faut dire que sa vie est ponctuée des principales étapes de l’histoire du Maroc actuel : marocanisation des cadres, émergence du secteur privé, rationalisation des entreprises publiques…bref, il constitue une vraie mémoire de l’histoire économique actuelle du Maroc.
C’est dans la mythique ville d’Ouezzane qu’Abdelakader Masnaoui a vu le jour. Une ville qui l’a profondément marqué et dont il retient une enfance joyeuse avec des amis de quartier et d’école qu’il a gardés à ce jour.
«C’est ma richesse». De très bons souvenirs lui restent de cette période qui, de surcroît, était marquée par une vie sociale très sécurisante, et moins atomisée qu’actuellement, où toutes les maisons étaient une sorte de chez-soi.
Abdelkader Masnaoui poursuit tranquillement sa scolarité bercé par les oliviers de sa région, et entouré de ces montagnes verdoyantes d’Ouezzane.
À l’époque, le choix des études se faisait par grandes familles, soit des études longues comme pour la médecine ou des études à la Faculté, puisque ne se posait pas le problème de l’emploi.
Mais un événement va précipiter Abdelkader Masnaoui dans son choix : le décès de son père peu de temps avant l’examen du Bac.
«J’avais 17 ans et j’étais l’aîné. J’ai décroché mon bac au lycée Moulay Youssef à Rabat où j’étais interne. Je m’inscrivis ensuite à la Faculté de Droit et j’ai dû travailler à côté». Il hérite très tôt du sens des responsabilités. Il démarre très jeune sa carrière puisqu’il n’a que 20 ans quand il intègre la Banque du Maroc en tant que cadre financier, en 64.
Il faut à ce stade de sa vie souligner qu’entre 1965 et 1969, Abdelkader Masnaoui a connu une période riche en apprentissage.
Déjà, après la Faculté, il intègre le 1er niveau d’expertise-comptable. «Dans le temps, le cours se faisait par correspondance et était assuré par le Conservatoire National des Arts et Métiers de France. Ces études ont été financées par la banque. A l’époque, on était à la veille de la marocanisation des cadres et les Marocains étaient encouragés à faire des études en commerce et en expertise-comptable».
Après avoir passé et réussi l’examen à Paris, Abdelkader Masnaoui va bénéficier d’une bourse pour un master en économie bancaire. À l’issue d’un tirage au sort, il est admis à l’université Bocconi de Milan.
Il atterrit donc en Europe en 1969, juste après une année 68 qui prônait la libéralisation des mœurs. Mais Abdelkader a d’autres préoccupations et investit toute son énergie dans les études.
«Dans le temps, il y avait une politique de promotion des cadres marocains pour qu’ils prennent la relève et répondent aux besoins en cadres au sein des établissements publics du pays». De retour d’Italie, avec un DECS, la Banque du Maroc l’encourage à faire un stage d’expert-comptable de trois ans à Paris.
«J’avais envie d’évoluer et de faire évoluer les choses, je me suis inscrit parallèlement à l’Institut du Droit des Affaires à la Sorbonne».
Disons qu’au Maroc, c’était la décennie de l’apprentissage et de la formation. En 73, de retour au Maroc Abdelkader Masnaoui se met à son compte.
Il entamera une nouvelle étape dans sa vie professionnelle, mais également personnelle. Car une année après son retour au Maroc, il se marie.
«J’étais très enthousiaste, mais j’avais également très peur. J’étais livré à moi-même et je devais assumer mes choix».
Au fait, sa frayeur n’émane pas de sa compétence mais plutôt du contexte de l’époque, le relationnel jouait davantage et pour un jeune expert-comptable, se mettre à son compte sans un réseau de contacts constituait un défi.
Mais qu’à cela ne tienne, Abdelkader Masnaoui était convaincu de la solidité de sa formation et de ce qu’il pouvait apporter à ce pays. Animé par cette crainte de décevoir et ce souci d’être à la hauteur, il va se mettre au travail.
Et ça paye, puisque à l’époque les experts-comptables qui avaient une capacité technique au niveau international étaient plutôt rares.
Mais également parce qu’entre 73 et 79, l’Etat marocain avait mis en place des moyens de soutien au crédit, en faveur des entreprises privées cette fois-ci. L’émergence d’une nouvelle classe d’entrepreneurs marocains était soutenue également par l’élaboration des codes d’investissements sectoriels.
Forcément, cela offrait une grande opportunité de travail pour Abdelkader Masnaoui avec des clients qui recherchaient la confiance et la sécurité.
Au début des années 80, le Maroc amorce une nouvelle décennie qui sera marquée par la rationalisation des entreprises publiques, car après la formation, le besoin en technicité s’est fait ressentir et à l’époque, Abdellatif Jouahri avait procédé au diagnostic et au recensement des entreprises publiques. Bien évidemment, ce nouveau chantier avait nécessité la contribution des cabinets d’expertise-comptable. Le travail était tel dans le secteur public que vers 1984 «il fallait avoir un appui technique en matière d’audit opérationnel, de réorientation des politiques des entreprises publiques. Dans le temps, j’étais correspondant d’Arthur Anderson et il fallait capitaliser sur l’expertise étrangère dans les entreprises publiques comme la Poste, les Télécoms, les Mines, en plus d’avoir les personnes ressources pour soutenir l’équipe».
Cette ouverture du cabinet aux expertises internationales va motiver la décision d’Abdelkader Masnaoui de créer une relation technique avec un cabinet étranger, de préférence français et de taille humaine avec une tarification homogène à la tarification marocaine ; et c’est ainsi que le choix d’Abdelkader Masnaoui s’est fixé sur Mazars qui était à l’époque en plein développement à l’international.
Ce choix d’ouverture vient à point nommé puisque durant les années 90, le Maroc amorce la modernisation de son économie, aussi bien en interne (avec de nouveaux textes juridique et fiscaux dont la rédaction du Code Général de Normalisation Comptable à laquelle il a largement contribué ; il a par ailleurs participé à la création du Cycle Marocain d’Expertise-Comptable et dirige une revue professionnelle dédiée au management) qu’en externe avec une libéralisation de l’économie et l’ouverture sur le marché international.
«D’où ce souci de répondre à une expertise de qualité dans les dossiers à traiter, et la recherche de compétences et expertises pointues pour les amener à travailler sur des sujets marocains».
Maintenant, l’heure est à la pérennisation des acquis pour donner un socle au cabinet pour le futur.
Le secret d’Abdelkader Masnaoui est qu’il a toujours cru en ce qu’il faisait, mais tient également au choix pertinent de ses collaborateurs et associés. «À la base, je cherche toujours des personnes motivées».
Son deuxième atout, c’est la délégation. «Je pousse très tôt les gens à prendre leur responsabilité dans un cadre mesuré, bien sûr».
Vient ensuite l’évaluation, au moins une fois par an et qui permet aux talents d’évoluer au sein du Cabinet. Sa casquette de boss, il la troque facilement pour sa ville natale pour lui rendre un peu de la joie qu’elle lui a procurée quand il était enfant. C’est un fervent défenseur de l’égalité des chances. «Le social est une manière de compléter l’action citoyenne». D’ailleurs, la citoyenneté est pour lui une manière de faire de la politique.
Abdelkader Masnaoui a travaillé tellement dur que s’il avait à refaire sa vie il aurait consacré plus de temps à sa femme et à ses quatre enfants ainsi qu’à la découverte du monde. Ses lectures sont essentiellement consacrées à la réflexion et aux idées. «Des livres qui vous éclaircissent une énigme». Mais également des livres sur le soufisme. S’il existe une personne qui l’a profondément marqué dans sa vie c’est bien le Roi Mohammed V. Evoquant son exil, Abdelkader Masnaoui ne cache pas son admiration pour un homme qui a fait preuve de renoncement pour rester fidèle à ses principes !


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