Le Forum international des ressources humaines, organisé par l'Association des gestionnaires de ressources humaines (AGEF), et qui s'est tenu récemment dans la ville de Tanger, avait la particularité de constituer à la fois une plateforme de rencontre pour les chercheurs d'emploi et les entreprises et de susciter un débat contradictoire utile pour l'amélioration de l'employabilité et la réduction de l'ampleur du chômage au Maroc. L'il y a une problématique qui se pose avec acuité au Maroc depuis des décennies, c'est bien celle de la difficulté d'enrayer le chômage. Chaque année, près de 220.000 demandeurs d'emploi débarquent sur le marché du travail, sachant que l'économie nationale ne peut en absorber que près de 110.000 annuellement. Ce qui a amené certains intervenants lors du récent Forum international sur les ressources humaines à Tanger (HR Days 2014) à parler d'une question éminemment structurelle. Ce forum international auquel a pris part Abdeslam Seddiki, ministre de l'Emploi et des Affaires sociales et d'autres experts aussi nationaux qu'internationaux, était une excellente occasion pour établir un diagnostic des problèmes liés à l'amélioration de l'employabilité au Maroc et, surtout, d'échanger sur la pertinence des solutions apportées au fléau du chômage dans le pays. Une complexité patente Abdeslam Seddiki reste persuadé que la création d'emplois ne se décrète pas (voir entretien). Ce qui est d'autant plus vrai qu'au Maroc pour créer 30.000 emplois, il faut une croissance de 1% du PIB. Or, cette croissance est tributaire de facteurs endogènes (demande intérieure, pluviométrie, etc.) et de facteurs exogènes (partenaires extérieurs, demande adressée au Maroc, etc.). A cette complexité, il faudrait ajouter que le secteur privé qui emploie 91% des travailleurs au Maroc érige la création d'emploi comme une variable d'ajustement structurelle. En d'autres termes, si les entreprises anticipent un ralentissement de leur activité, elles gèlent les recrutements. Ce qui a de facto un impact négatif sur l'employabilité. De ce point de vue, force est de constater que l'Etat ne peut jouer qu'un rôle de facilitateur pour la création d'emplois. A ce titre, le ministre a rappelé lors de son intervention quelques mesures étatiques visant la création de plus de postes de travail. Il s'agit entre autres, de la prise en charge de la couverture médicale pour les jeunes stagiaires et celle des cotisations salariales dans la limite de cinq employés. A côté de ces mesures, il y a lieu de noter qu'une stratégie nationale pour l'emploi est en passe d'être mise en oeuvre avec la création d'un observatoire pour l'emploi. Par ailleurs, si d'après Kamal Hafid, Directeur général de l'Anapec, l'inadéquation de la formation et le marché du travail est un obstacle majeur à l'employabilité au Maroc, il en est tout autrement pour l'économiste Mohamed Chiguer. Ce dernier estime que le problème se situe au niveau du profil économique du pays, largement dominé par l'agriculture qui emploie près de 40% de la population active. L'autre obstacle à une lutte efficace contre le chômage est l'importance du secteur informel qui génère des emplois précaires et très souvent non comptabilisés dans les statistiques nationales. D'ailleurs Moncef Kettani du Conseil économique, social et environnemental estime le nombre de TPE exerçant dans le secteur informel à près de 3 millions. Pour mieux prendre la mesure de ce phénomène, il est utile de rappeler que 81% des emplois dans le commerce par exemple relèvent du secteur informel. Outre ce diagnostic quelque part peu reluisant, Kamal Hafid juge que réduire le taux de chômage des jeunes passe inéluctablement par la promotion de la formation professionnelle en limitant les filières trop généralistes. Pour sa part Moncef Kettani place le curseur sur la pertinence des stratégies mises en place pour parfaire l'employabilité. En cela, il estime que l'Etat met les moyens nécessaires pour enrayer le chômage puisque 20% de ses ressources sont dévolues à l'éducation et pourtant, les résultats demeurent mitigés. L'auto-emploi, une panacée ! Lors de son allocution, Abdeslam Seddiki a vanté les vertus de l'auto-emploi comme étant un rempart efficace contre le chômage. Toutefois, il a rappelé que le programme Moukawalati qui soutient les jeunes pour la création de leur propre entreprise est un échec cuisant. Par manque d'expérience et faute de suivi, la plupart des jeunes soutenus par ce programme se sont heurtés à la dure réalité de l'entreprise et ont failli. A ce titre, le ministre a annoncé que le programme Moukawalati sera réformé pour venir davantage en aide aux travailleurs expérimentés pour la création de leur entreprise. En outre, les salariés en situation de perte d'emploi qui représentent 34% des chômeurs, seront à l'avenir concernés par ce programme. En définitive, HR Days 2014 était à la fois un espace d'échange d'idées et un lieu de rencontre pour les chercheurs d'emploi et les recruteurs. D'ailleurs, plusieurs conventions portant sur la création de plusieurs milliers d'emplois ont été signées entre l'Anapec et différentes sociétés.