Désormais, BAM va porter un regard attentif sur la croissance. Par ailleurs, Abdelatif Jouahri a annoncé, lors du Conseil trimestriel de la Banque centrale, l'instauration d'un nouveau dispositif pour accompagner les très petites, petites et moyennes entreprises. Ce n'est pas une politique monétaire non conventionnelle dans le sens occidental du terme, mais nous nous en rapprochons. Car, BAM va non seulement user d'outils originaux dans sa démarche (autres que le taux des réserves obligatoires et le taux directeur), mais va également, et surtout, se mêler de la relance économique par le crédit. «C'est une réponse efficace à ceux qui nous reprochent de ne pas baisser le taux directeur», a affirmé le gouverneur de BAM. Le signal de BAM est encore plus clair que ce qu'il aurait été s'il avait baissé son taux directeur : «Nous ne nous préoccupons plus uniquement de la stabilité des prix, mais également de la croissance», a-t-il ajouté. Ce dispositif envers les PME existait déjà et celles éligibles devaient avoir un chiffre d'affaires de 175 MDH au maximum et des demandes de crédits ne dépassant pas 15 MDH. Mais BAM a décidé de le revoir et d'y rajouter plusieurs modalités. La Banque centrale souhaite agir directement sur la politique commerciale des banques en appuyant là où cela fait mal : leur coût de financement. Concrètement, les banques qui soutiennent les PME se verront réallouer jusqu'à 10% de leurs encours arrêté à fin juin 2013 envers ces entreprises par BAM. Si ces entreprises sont exportatrices ou industrielles, cette allocation peut atteindre jusqu'à 20% de l'encours à fin juin. Dans cette démarche, BAM va se faire accompagner par la Caisse centrale de garantie qui a mis en place un fonds de garantie dédié aux PME d'une valeur initiale de 800 MDH. Des sanctions pour les plus réticentes BAM n'a pas fait les choses à moitié. Elle a prévu de sanctionner à hauteur de 0,5 pbs les prochains financements de toute banque commerciale marocaine qui baisserait son encours envers les PME et ce, pour chaque 1% de baisse d'encours enregistrée. Cette sanction peut atteindre jusqu'à 150 pbs. «L'objectif est clairement d'orienter la politique de distribution de crédit des banques par la carotte et le bâton», a expliqué Jouahri. Toutefois, ce dispositif est entièrement dépendant de l'accroissement de la demande sur les produits industriels car, toujours selon Jouahri, «pour que ce dispositif fonctionne, il faut que la demande se redresse». Enfin, signalons que ce dispositif ne sera mis en place qu'après réunion avec les banques marocaines pour fixer les dernières formalités, et notamment le Reporting, sa fréquence et le détail des exigences de BAM. Maintien du taux directeur Outre ce dispositif innovant, BAM a décidé de maintenir son principal taux directeur inchangé. Et pour cause, l'absence d'éléments de pressions sur les prix aussi bien en interne qu'en provenance de l'extérieur. En effet, le climat est toujours morose en Europe avec un taux de chômage élevé dans plusieurs pays, dont l'Espagne. Aux Etats-Unis, la situation continue de se redresser, à l'image des crédits qui augmentent de 4%, alors qu'ils baissent encore en Europe. De ce fait, l'inflation est maîtrisée en Occident, appuyée également par la stabilisation des prix des matières premières fossiles. En interne, après une croissance de 2,7% en 2012, tirée par l'activité non agricole, BAM s'attend à une croissance comprise entre 4,5% et 5,5% en 2013, grâce notamment à l'activité agricole. Le chômage est stable autour de 9,4% (malgré l'absence de création nette d'emploi en 2012). Le déficit public, pour sa part, s'est aggravé à fin mai, mais devrait se limiter à l'objectif gouvernemental de 5,5% du PIB en fin d'année. Sur ce point, Jouahri a tenu à rappeler que cet objectif dépend étroitement de la capacité de limiter les dépenses de compensation à ce qui a été prévu dans la Loi de Finances de 2013, à savoir un montant compris entre 40 et 42 Mds de dirhams. A titre de rappel, les dépenses de compensation ont dépassé 53 Mds de dirhams en 2012. L'ensemble des ces éléments ne favorisant pas de pressions inflationnistes, BAM a décidé de maintenir inchangé son taux directeur.