Les pays émergents et en développement ont tiré la croissance mondiale ces cinq dernières années. Ils restent, cependant, très frileux des politiques économiques mises en œuvre dans les pays développés. Une croissance plus équilibrée, plus solidaire, et un système financier plus sûr demeurent les gages d'une sortie de crise. L'nvitation de l'Economic Club of New York du 10 avril, était une occasion pour la directrice du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde, de revenir sur la situation économique mondiale et, surtout, de brosser un tableau des problèmes majeurs qui se posent actuellement. A la question de savoir si l'économie mondiale se trouve sur une tendance positive, la directrice générale du FMI rétorque qu'une réalité plus complexe se dessine et prend l'allure d'une mosaïque. Toutefois, elle fait remarquer que les conditions financières semblent s'améliorer en raison des mesures prises par les gouvernements. La dangerosité de l'économie internationale semble s'amenuiser et la croissance mondiale est plus rapide par rapport à l'année dernière. Mais, à l'inverse, Lagarde souligne que les disparités entre les régions sont plus marquées que jamais. L'apparition d'une économie mondiale «à trois vitesses» est manifeste : celle des pays qui affichent de bons résultats, celle des pays dont la situation se rétablit et celle des pays qui ont encore du chemin à parcourir. Le vent en poupe Concernant les pays qui affichent un bon résultat, la responsable du FMI cite en exemple les pays de l'Asie du Sud-Est et les pays en développement qui, selon elle, ont mis en place une politique économique saine pour échapper aux contrecoups de la crise internationale. Notons que Lagarde a été dithyrambique à l'endroit des pays en développement, estimant qu'ils ont entrainé la reprise en assurant les 3/4 de la croissance mondiale au cours de ces cinq dernières années. Toutefois, elle rappelle aussi que ces pays sont de nouveau en phase de relance bien qu'ils aient accusé un léger ralentissement en 2012. Actuellement, l'Asie et l'Afrique sont les deux régions qui connaissent l'expansion la plus rapide à l'échelle mondiale. Toujours selon elle, il y a la prévalence d'une forte inquiétude de la part des pays émergents ou en développement concernant les répercussions de la politique monétaire laxiste et des politiques d'assouplissement internationales des pays développés, foudroyés par la crise. Ces politiques monétaires peu vertueuses pourraient avoir un impact sur les taux de change, les flux des capitaux, la hausse des actifs, affectant ainsi les pays en développement. Mais, pour l'instant, la patronne du FMI juge que ces risques semblent maîtrisés et les capitaux se dirigent vers les pays émergents essentiellement parce que ces derniers poursuivent des politiques judicieuses et leurs marchés offrent de bonnes perspectives. Dans l'optique d'une meilleure consolidation de leurs agrégats macro-économiques, la directrice du FMI suggère que les pays en développement accroissent leurs défenses tout en élargissant leur marge de manœuvre budgétaire qui s'est réduite pendant la crise. Les pays émergents doivent aussi renforcer leurs mesures de réglementation et de contrôle bancaires. Stratégie pour se défaire de la crise La directrice générale du FMI est formelle sur la portée globale des problèmes actuels qui, à ses yeux, n'épargnent aucun pays. Ces problèmes, datant depuis la crise sont toujours en suspens. Il s'agit notamment de la réforme du secteur financier, du rééquilibrage de la demande mondiale et du recentrage de l'attention sur la croissance, de l'emploi et de l'équité. Dans ce sillage, Lagarde estime qu'une réforme efficiente du secteur financier international passera inévitablement par l'appui de la croissance et de la stabilité. Pour elle, les banques ne doivent plus privilégier l'obtention rapide de profit au détriment d'une prospérité durable qui a peu de risque de déstabiliser l'économie. Pour annihiler la crise, le modèle de banque surdimensionnée, trop importante, doit être battu en brèche. Le rééquilibrage de la demande mondiale est un pré-requis, car il existe des pays affichant des excédents des transactions courantes et ceux enregistrant des déficits conséquents. A ce titre, il est nécessaire, selon la patronne du FMI, d'appuyer une croissance plus équilibrée, plus solidaire, et un système financier plus sûr, soutenant l'économie réelle. Concernant la croissance, l'emploi et l'équité, elle considère qu'il faut que tous les pays s'attèlent à régler les problèmes liés à ces trois aspects représentant une préoccupation majeure pour les populations. Elle estime qu'il existerait plus 200 millions de personnes n'ayant pas de travail. Le meilleur moyen de créer des emplois, c'est la croissance. Celle-ci est donc primordiale et doit être favorisée par un dosage adéquat de politiques axées sur la demande et sur l'offre. L'équité est tout aussi importante pour la responsable du FMI, parce qu'une distribution plus équilibrée des revenus permet d'assurer une croissance plus durable, une économie plus stable, fondée sur un tissu social ayant la confiance pour trame. Mais elle fait noter que les inégalités sont trop marquées dans les pays, et elles ont augmenté dans la plupart des zones pendant la crise. En fin de compte, la DG du FMI reste convaincue que les gains de la croissance doivent être partagés, tout comme le sont les pertes liées à l'ajustement. Pour elle, cela est important pour les populations des pays en transition du monde arabe qui s'efforcent de prendre un nouveau départ, dans la dignité et la justice, et pour les deux milliards et demi de personnes qui survivent avec moins de deux dollars par jour.