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Capital-investissement : la rigidité fiscale pénalise la performance
Publié dans Finances news le 03 - 11 - 2019

La contribution fiscale des entreprises accompagnées par le capital-investissement grossit d'année en année.
La profession dévoile ses principales doléances pour le développement de l'activité.

Par Youssef Seddik

Le potentiel du marché du Private equity est depuis des années sapé par une fiscalité rigide. Si l'industrie contribue aujourd'hui significativement à la collecte de l'impôt - chiffres à l'appui -, elle ne reçoit pas, en retour, d'incitations favorisant son essor.
Une étude réalisée par l'Association marocaine des investisseurs capital (AMIC) démontre l'impact de l'activité à plusieurs échelles : emploi, croissance et contribution fiscale… Sur ce dernier point, les entreprises accompagnées par les acteurs du capital-investissement au Maroc contribuent à plus de 2 milliards de DH à l'IS. Entre l'année d'entrée et celle de sortie, c'est un multiple de 2x et un TCAM de 27%.
«L'IS marocain est à 50 milliards de DH, 80% sont payés par 100 grosses entreprises qui ne font pas partie de nos cibles d'investissements. Sur les 10 Mds de DH restants qui représentent notre environnement, nous payons presque 2 Mds de DH, soit 20%. C'est quand même significatif», explique Hassan Laaziri, administrateur à l'AMIC.
Sur les mêmes périodes étudiées, la contribution à la TVA est de 1,1 Md de DH, celle de l'IR à 309 MDH, alors que les autres impôts et taxes représentent quelque 360 MDH.
Or, l'émergence du capital-investissement dans les pays matures s'accompagne très vite par l'adoption d'un ensemble de règles et de lois favorisant sa croissance, tout en protégeant les investisseurs des risques liés à l'activité de placement. Au Maroc, nous sommes encore loin de cette configuration. «Les investisseurs prennent beaucoup de risque sans contreparties fiscales», déplorent les membres de l'AMIC, qui réclament un certain nombre d'incitations qui permettront d'offrir un environnement plus équitable au Private equity au Maroc. «Nous voulons juste reproduire ce qu'il y a ailleurs pour travailler correctement», font-ils valoir.

En finir avec la TVA sur les frais de gestion
C'est la mesure phare réclamée par la profession depuis 2009. Les fonds au Maroc paient en effet la TVA sur les frais de gestion sans pouvoir la récupérer. Pour l'AMIC, compte tenu du volume des montants investis, il est important pour les fonds de pouvoir la récupérer. Dans tous les pays étudiés (France, Tunisie, Turquie et Afrique du Sud), les sociétés de gestion ont la possibilité de récupérer la TVA ou en sont exonérés.
«Parfois, au bout de cinq années, cette TVA peut représenter 5% de la taille du fonds, ce qui le pénalise par rapport à son TRI. Nous demandons purement et simplement son exonération ou sa récupération. Ceci permettra de réduire le coût de gestion», détaille Adil Rzal, président de l'Association.

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Drainer plus d'épargne locale
Les fonds étrangers dominent toujours le paysage. Ils représentent 80% des montants engagés contre 20% provenant des locaux. Pour inverser la tendance et orienter l'épargne nationale vers cet outil d'investissement à haut rendement, l'AMIC propose des incitations à la base pour les investisseurs institutionnels et privés, soit sous forme d'abattements fiscaux ou d'avantages à l'entrée.
Rappelons que la distinction entre titres de participation (traités comme des immobilisations) et ceux de placement (traités comme un actif circulant), qui existait dans l'ancienne version du CGI en 2006, conférait un avantage crucial. Les premiers pouvaient en effet bénéficier d'abattements fiscaux allant jusqu'à 50% du montant des plus-values réalisées lors de la cession.
«Il y aurait donc un intérêt certain à réintroduire cette distinction dans la réglementation juridique et fiscale de l'activité», souligne l'Association.
Parallèlement, les compagnies d'assurances marocaines ne peuvent exploiter leurs réserves techniques pour investir (hors OPCC) dans les fonds d'investissement. Pour ce faire, elles puisent dans leurs fonds propres. A l'instar de la situation dans les pays plus évolués en matière de capital-investissement, l'AMIC juge «nécessaire» d'autoriser les assurances à investir une part de leurs provisions techniques dans les fonds d'investissement.

Attirer les flux du privé
En plus de la distinction citée en haut, une autre mesure incitative pour les investisseurs individuels serait de pouvoir bénéficier d'avantages à l'entrée. L'AMIC donne comme exemple la France, où les personnes physiques qui investissent dans les FCPI et les FIP ont droit à une réduction de l'IR ou de l'ISF.
En gros, ce sont des mesures qui encourageront les locaux qui disposent de liquidités abondantes à investir, au moment où, pour des raisons d'arbitrage, les étrangers optent pour d'autres pays aux régimes fiscaux plus attrayants.
La mise en place de la consolidation fiscale (existant en Algérie et en Tunisie), l'adoption d'un régime maison mère-filiale, qui permet l'exonération de l'IS sur les plus-values de cession de titres de participation, font également partie des principales doléances de la profession.
Au final, l'attrait de nouveaux flux d'investissement vers le Private equity dépend plus que jamais de la souplesse du cadre fiscal et juridique au Maroc. Dans les économies développées, les institutionnels sont les principaux contributeurs au capital-investissement, sur fond d'un cadre juridique et fiscal plus favorable.
En attendant, l'activité continue de performer malgré le manque de profondeur, et la profession milite pour qu'elle soit plus audible auprès des pouvoirs publics.


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