- La baisse des réserves de change et la hausse de la circulation fiduciaire devraient exercer une pression sur les liquidités. - Le déficit de liquidité devrait s'accentuer de 27 milliards de DH en 2017, pour passer à 70 milliards de DH au terme de l'année 2018.
2018 sera-t-elle marquée par un retour de la pression à la baisse sur le niveau de liquidité sur le marché interbancaire ? C'est en tout cas l'avis des analystes de CDG Capital Research qui, dans un document intitulé «Note annuelle macroéconomique et taux : évolution 2017 et perspectives 2018», anticipent que «le déficit de liquidité devrait s'accentuer de 27 milliards de DH pour passer à 70 milliards de DH au terme de l'année 2018». Un tel chiffre ramènerait le déficit à des niveaux proches de ceux de 2013 (77 milliards de DH), au plus fort des tensions sur les liquidités. Depuis 2014, les choses s'étaient pourtant considérablement améliorées, sous l'effet notamment de la progression significative des réserves internationales nettes, dans le sillage de l'amélioration de la balance commerciale, le rapatriement de devises (dans le cadre de l'amnistie fiscale de 2014) et, surtout, la chute drastique de la facture pétrolière. Résultat : courant 2016, le déficit de liquidité bancaire était entièrement résorbé, avec un marché interbancaire qui était repassé en situation de surliquidité. Une première depuis 2007. Cette situation n'aura finalement duré que quelques temps. Le choc sur les devises des mois de mai et de juin 2017, qui s'est caractérisé par des achats massifs de devises à l'approche de la date annoncée par le gouverneur de Bank Al-Maghrib pour l'entrée en vigueur de la réforme du régime de change, a considérablement creusé le déficit de liquidité. Ce dernier est passé de 19 milliards de DH à fin avril 2017, à 65 milliards de DH à fin juin de la même année. Ce déficit s'est par la suite atténué au courant du deuxième semestre pour s'établir à 43 milliards de DH à fin 2017. La circulation fiduciaire a également joué un rôle en 2017 en matière d'assèchement des liquidités, à travers deux effets, note CDG Capital Research : le premier d'ordre conjoncturel, avec la concentration de plusieurs évènements connus pour la consommation de cash, notamment le Ramadan (juin), la période estivale (juillet-septembre), Aïd Adha et la rentrée scolaire (septembre); et un deuxième effet d'ordre structurel, avec une hausse plus accentuée de la circulation fiduciaire de 7,7% en glissement annuel contre 5% enregistrée en 2016. Face à cette situation, Bank Al-Maghrib a alimenté le marché interbancaire principalement à travers les avances à 7 jours, avec une moyenne annuelle de 37,4 Mds de DH en 2017 contre seulement 9,2 Mds de DH enregistrée en 2016.
Baisse des réserves de change en 2018
Pour 2018, cette tendance au creusement du déficit de liquidité devrait se poursuivre, les mêmes causes produisant les mêmes conséquences. En effet, la baisse des réserves de change, en liaison avec le creusement prévu du déficit commercial, pourrait être amplifiée en cas de dépréciation du Dirham de 2,5%, suite à l'élargissement de la bande de fluctuations de +/-0,3% à +/-2,5%. Par ailleurs, la hausse de la circulation fiduciaire va également exercer une pression sur le déficit de liquidité pour au moins deux raisons : d'une part, la concentration des évènements connus pour l'envolée de la demande de cash entre les mois de mai et de septembre, et d'autre part, une probable fuite de liquidité pour des achats de devises sur le marché parallèle, et ce «en précaution d'un nouvel élargissement de la bande de fluctuations dans le cadre de la réforme en cours du régime de change». Dans ce contexte, l'évolution du taux moyen pondéré (TMP) serait sensible à la capacité de la Banque centrale de préciser avec exactitude le besoin de liquidité du marché interbancaire, y compris les imprévus qui pourraient accentuer le déséquilibre. De même, la persistance ou l'émergence d'un besoin structurel de liquidité chez certains opérateurs du marché pourrait également générer des désalignements, à l'image de ce qui s'est passé en 2017. ■
Bons du Trésor : Vers une légère baisse des taux à moyen et long terme Selon la note de CDG Capital Research, le nouveau contexte d'évolution du marché des bons du Trésor en 2018 est caractérisé par un recul des besoins de financement du Trésor, grâce au bon comportement des recettes fiscales et une meilleure maîtrise des charges, la volonté des pouvoirs publics de réduire le déficit et l'endettement publics et, enfin, la capacité du Trésor à mener des opérations d'échange en vue de soulager ses tombées et réduire son taux moyen d'endettement. A cela s'ajoute la possibilité de recours à d'autres sources de financement internes ou bien une sortie à l'international. Selon les analystes, «l'ensemble de ces facteurs plaident pour une légère baisse des taux en 2018, principalement sur le moyen et le long terme». Pour le court terme, la stabilité prévue du cadre monétaire, avec un taux directeur inchangé et un équilibre de la liquidité garantie grâce aux avances de Bank Al-Maghrib, favoriserait une quasi-stabilité des taux.