- Flou total autour du rôle de la SIE avant juin 2018, date de la tenue du prochain Conseil d'administration. - Quatre scénarios de repositionnement de la Société d'investissement énergétique (SIE) sont en cours d'évaluation par un comité ad hoc - Le point avec Ahmed Baroudi, Directeur général de la SIE, sur la sortie du capital de Masen.
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Finances News Hebdo : L'annonce de la sortie de la SIE du capital de Masen a marqué la scène énergétique marocaine. Quelles sont les raisons de ce divorce ?
Ahmed Baroudi : Cette sortie est une suite logique et attendue de la nouvelle organisation du secteur énergétique de l'Etat. Rappelons qu'en 2016, les missions de Masen ont été étendues à l'ensemble des énergies renouvelables. Celles de l'AMEE (autrefois ADEREE) se sont concentrées exclusivement sur l'efficacité énergétique. De nouveaux décrets de loi relatifs à ces deux établissements sont apparus. Des ajustements sont à opérer notamment avec l'ONEE qui pourrait présenter des fonctions doubles avec Masen. Ce qui est également le cas de la SIE avec cette dernière, ainsi qu'avec l'AMEE. C'est pourquoi il est nécessaire de rationaliser les rôles de chacun, de manière à asseoir une organisation dont l'Etat profite au maximum, sur la base d'un principe d'additionnalité. Il est question d'assurer la complémentarité des acteurs. C'est dire que les positions des uns et des autres ne peuvent plus rester telles quelles. Il faut donc prendre une décision de gestion. C'est pourquoi la SIE, étant toute petite dans son action par rapport au périmètre qu'occupe Masen, ne pouvait plus rester actionnaire à hauteur de 25%. D'ailleurs, c'est une décision qui était inéluctable dès le premier jour. C'est une nécessité administrative et légale qui s'impose pour justement pouvoir opérer l'organisation rationnelle requise aujourd'hui. La SIE ne peut pas rester actionnaire de Masen, c'est plutôt l'inverse qui a plus de sens.
F.N.H. : Concrètement, qu'est-ce qui va changer ? Le nouveau rôle de la SIE est-il enfin défini ?
A. B. : C'est une question pleine et entière. Aujourd'hui, la SIE joue un rôle de catalyseur économique dans les secteurs des énergies renouvelables, de l'efficacité énergétique et puis, en transversal, de l'amont industriel dans ces deux domaines. Toutefois, aujourd'hui, je suis incapable de répondre à la question : «que deviendra la SIE ?». Un comité ad hoc a été nommé lors du dernier Conseil d'administration par le ministre de l'Energie. Il est composé du ministère des Finances, qui détient 71% de l'actionnariat de la SIE, du président du Fonds Hassan II, qui possède 100% du complément, et de notre ministère de tutelle, représenté par l'actuel secrétaire général. La SIE se tient à la disposition dudit comité pour réfléchir aux prochaines étapes et faire avancer les choses. Ce comité a jusqu'à juin, date de la tenue du prochain Conseil d'administration, pour étudier les différents scénarios de repositionnement de la SIE et établir les éléments de décision.
F.N.H. : Quels sont les scénarios probables de cette réorganisation ?
A. B. : Parmi les scénarios possibles, il y a premièrement la fermeture de la SIE. Toutefois, lors du dernier Conseil, il a été question d'écarter, pour le moment, cette possibilité. Ce qui ne veut pas dire que cela ne se fera pas. Deuxième scénario, c'est une fusion acquisition de la SIE par Masen. Troisième cas, c'est un changement des rôles dans lequel Masen deviendrait actionnaire dans le capital de la SIE. Quatrième possibilité, l'ouverture du capital de la SIE au privé. Le président du Conseil d'administration a été très clair : il a demandé à ne pas se brider et à étudier tous les cas possibles. Le comité étudiera les 4 cas de figure sur le plan légal et juridique.
F.N.H. : En attendant le prochain Conseil, quelle sera votre mission ?
A. B. : Cette question se posait déjà vers fin 2016 lors de la réorganisation de Masen. Pourtant, la SIE a poursuivi ses activités en 2017. Nous avons continué à développer les projets que nous avons préalablement engagés, et à soutenir (essentiellement en apport d'expertise) les régions ainsi que les municipalités. Nous tenons à mener à terme nos engagements vis-à-vis de nos partenaires. Nous ne lâcherons jamais nos partenaires au milieu du gué. C'est pourquoi nous veillerons à ce que les projets aboutissent, quitte à se retirer au profit de la mise en œuvre et de la réalisation du projet dans notre pays. C'est le cas du projet d'une centrale solaire de 4 MW pour la COPAG (coopérative agricole de Taroudant) sur lequel nous travaillons depuis 3 ans. Cette dernière année a été marquée par un grand effort financier. Avec nos partenaires, nous avons obtenu des conditions de financement intéressantes auprès d'une banque marocaine. Mais n'ayant pas de position claire de la gouvernance de la SIE dans les délais impartis, nous nous sommes retirés du projet pour que la COPAG puisse bénéficier de cette capacité d'autoproduction, gagner en compétitivité, réduire ses coûts de fonctionnement et aller de l'avant.
F.N.H. : Ce manque de visibilité explique-t-il l'annulation des appels d'offres relatifs à la mise à niveau de l'éclairage et de l'installation électrique de 240 mosquées dans les villes de Kénitra, Témara et Salé ainsi que de 90 mosquées à Rabat ?
A. B. : J'ai aujourd'hui des instructions de mes administrateurs de ne rien engager. Zéro engagement, zéro projet. Cette annulation est en effet une conséquence directe des instructions. Actuellement, nous sommes en train de préparer un transfert des dossiers d'efficacité énergétique de la SIE vers l'AMEE, ainsi que ceux des énergies renouvelables vers Masen. ■