Les nouveaux cahiers des charges obéiraient à la mise en œuvre saine et complète de la nouvelle Constitution. La programmation des chaînes et radios publiques doit refléter la diversité culturelle, linguistique, territoriale, sociale… Mustapha El Khalfi, ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, revient sur les éléments-clés de ces cahiers des charges. • Finances News Hebdo : Est-ce que vous pouvez nous éclairer sur cette confusion concernant la prédominance des langues arabe et amazigh sur les deux chaînes nationales ? Et si ces deux langues seront majoritaires, quelle tribune auront nos partenaires étrangers pour s'informer sur le Maroc ? • Mustapha El Khalfi : Justement, il y a eu une confusion à ce propos. Certains avancent le fait que les nouveaux cahiers des charges de la SNRT et de la Soread-2M, pourtant approuvés par la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA), provoqueraient la disparition des langues étrangères des chaînes et des radios publiques. C'est totalement faux. Nous sommes tenus par la mise en œuvre saine et complète de la nouvelle Constitution. Et cette même Constitution prévoit dans l'article 5 que l'Etat œuvre à la protection et au développement des deux langues officielles du Royaume, à savoir l'arabe et l'amazigh, à la préservation du Hassani, à la protection des expressions culturelles et des parlers pratiqués au Maroc et à l'apprentissage et la maîtrise des langues étrangères les plus utilisées dans le monde. Cet article est on ne peut plus clair. Dans le cadre de l'élaboration des nouveaux cahiers des charges, nous nous sommes fortement inspirés de cette disposition pour instaurer une sorte d'équilibre en matière d'usage des différentes langues nationales et étrangères pour ce qui est de la grille de référence des différentes chaînes et radios publiques. A titre d'exemple, les langues étrangères constituent 20% de la langue de diffusion de la deuxième chaîne, plus une marge de 5%. Aussi, contrairement à ce qui a été avancé par certains, le cahier des charges de 2M ne prévoit nullement un JT en français au-delà de 23h. La chaîne demeure libre pour choisir l'heure de diffusion du JT. Pour sa part, Al Maghribiya devient une chaîne d'information destinée aux Marocains résidant à l'étranger, aux partenaires du Maroc, aux étrangers résidant au Maroc, mais aussi aux Marocains désireux de suivre les émissions en langues étrangères. Al Maghribiya devra également contribuer à promouvoir le rayonnement du Maroc à l'étranger. Celle-ci devra diffuser en quatre langues : l'arabe, le français, l'espagnol et l'anglais. Idem pour la chaîne Inter. Aussi, les langues étrangères n'ont pas du tout disparu de la chaîne Al Oula. Le cahier des charges prévoit les langues arabe et amazighe comme langues de diffusion d'Al Oula, mais uniquement pour la grille de référence. En outre, la chaîne culturelle devra diffuser un programme destiné à l'apprentissage des langues étrangères… Et on peut citer plusieurs autres exemples dans ce cadre. Donc, les nouveaux cahiers des charges correspondent parfaitement à l'esprit et à la philosophie du nouveau texte constitutionnel, notamment en ce qui concerne la consécration de la diversité linguistique au Maroc. • F. N. H. : En se référant au cahier des charges, quand vous parlez de la diversité, cela veut dire plus d'émission sur l'éducation, la culture, la religion, l'économie, le social… Est-ce que vous pouvez être plus explicite par rapport à la notion de la diversité ? • M. E. K. : Là aussi, nous nous sommes référés à la nouvelle Constitution. Les nouveaux cahiers des charges visent à garantir la diversité de l'offre publique afin de relever les défis de la qualité et de la compétitivité à l'échelle régionale et internationale. Ceci étant, les nouveaux cahiers des charges consacrent la diversité culturelle, territoriale et linguistique dans le cadre du respect des valeurs civilisationnelles et lois applicables au Royaume. En fait, l'article 9 du cahier des charges de la Soread-2M et l'article 11 du cahier des charges de la SNRT disposent expressément que les chaînes et les radios publiques adopteront une programmation qui reflète la diversité culturelle, linguistique, territoriale, sociale et de pensée des composantes et affluents de l'identité marocaine. Elles devront également contribuer à l'enrichissement de la diversité dans le cadre de l'unité, tout en s'ouvrant sur les autres cultures et civilisations. Sans oublier que les nouveaux cahiers des charges consacrent également le pluralisme des courants de pensée et d'opinions de la société marocaine dans tous les domaines. • F. N. H. : N'aurait-il pas été judicieux, parallèlement à la mise en place de ces nouveaux cahiers des charges, d'octroyer plus de licences aux acteurs privés ? Si vous l'envisagez, quelles seraient les spécificités de ces chaînes ? • M. E. K. : Comme nous l'avons signalé auparavant, l'octroi de licences aux acteurs privés dans le cadre de la libéralisation du champ audiovisuel relève de la compétence exclusive de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA), en vertu de la loi n°77-03 relative à la communication audiovisuelle. Cette instance indépendante pourra attribuer à n'importe quel moment des licences à des chaînes de télévision, comme cela a été le cas pour les radios privées. C'est pour cette raison que l'un des principaux défis des nouveaux cahiers des charges du pôle public est justement de mettre à niveau et de promouvoir la qualité et la compétitivité de l'offre publique en perspective de l'échéance de la libéralisation du champ audiovisuel qui, à mon avis, d'après les exigences du contexte actuel, ne devrait pas tarder à avoir lieu. Propos recueillis par F. Z. Ouriaghli