Les agrégats budgétaires sont maintenus dans la première mouture d'élaboration de la LF, indépendamment des évolutions enregistrées depuis dans le contexte économique tant interne qu'externe. L'effet multiplicateur des mesures prévues dans le projet de budget risque d'être réduit. Face au déficit de la croissance, la mise en place d'un budget plus réactif s'impose. Àpeine quelques mois passés de l'année 2012 que les pronostics vont bon train sur l'évolution du taux de la croissance. Les scénarios changent de jour en jour à cause de la modification des hypothèses sous-jacentes à l'élaboration du taux de croissance. La variable internationale intervient à plus d'un titre. Et le tassement qui commence à gagner nombre de secteurs de production au cours du premier trimestre de 2012 tient principalement à cette dégradation de la conjoncture internationale. Le ralentissement de l'activité touche chaque jour une région et se transforme parfois en récession ouverte sous l'effet de l'affaiblissement de la demande, de la détérioration du pouvoir d'achat et de la crise de la dette. Aussi, les principales économies locomotives de la croissance mondiale ont, tour à tour, affiché un tassement du cycle de production conjugué à une montée de chômage et un infléchissement de la tendance des prix. Sur le plan interne, la sécheresse qui sévit depuis le début de la campagne agricole a fortement contribué au durcissement des contraintes. Le déficit pluviométrique qui a atteint un niveau élevé au plus fort de la saison hivernale a sérieusement compromis les cultures céréalières. Et d'après les opérateurs, les données actuellement disponibles sur l'évolution de la campagne agricole, à la veille de la saison printanière, ne permettent d'envisager pour les cultures céréalières qu'une récolte atteignant à peine le tiers de la campagne précédente. Connaissant le poids des activités agricoles dans l'ensemble du système productif et leurs effets induits sur les autres secteurs d'activité, les conjoncturistes estiment que cette perspective est de nature à amputer à elle seule le taux de croissance global de l'économie de près de deux points. Après un diagnostic de la situation telle qu'elle prévaut aujourd'hui, la question qui se pose est : quel budget faut-il prévoir pour faire face à ce déficit de croissance ? Changement d'hypothèses : quelle marge de manoeuvre ? Face à cette situation trop contraignante, le budget a un important rôle à jouer, et ce de deux manières. La première option, la plus directe, consiste à prendre acte de l'écart entre le taux de croissance retenu lors de l'élaboration du budget et celui qui semble se profiler à l'horizon. « Cet écart estimé à plus de deux points devrait conduire en toute logique à la révision des agrégats budgétaires aussi bien dans leur volet recettes que dans celui des dépenses», tranchent les conjoncturistes. Une chose est sûre : l'élasticité relativement forte des recettes fiscales, directes et indirectes, par rapport à la croissance de l'activité économique, impliquerait des changements significatifs des volumes prévus dans l'hypothèse de la baisse du taux par rapport à celui prévu initialement. Un réajustement des principales composantes du projet de budget, en vue d'une meilleure adaptation à la difficulté du contexte, s'impose désormais. La seconde option, plus réactive, place l'action du budget dans une perspective longue où interfèrent des dynamiques intemporelles. Les actions à envisager dans le cadre de cette option chercheront à réagir aux effets dépressifs à travers la mise en œuvre de politiques foncièrement contracycliques. Il est utile de rappeler qu'en période d'incertitude, de montée de chômage, d'affaiblissement de la demande… le soutien à l'activité par les moyens budgétaires est fortement préconisé. Au vu du projet de la Loi de Finances tel qu'il a été adopté le 11 de ce mois, les conjoncturistes demeurent sceptiques parce que d'après eux, ni l'une, ni l'autre des deux options ne semble avoir été retenue. Conséquence, même si les auteurs du budget admettent la perte probable de plus d'un point de croissance, la programmation budgétaire, élaborée initialement sur la base d'un taux de 4,2%, ne subit aucune modification. «De même que prenant acte de cette déconvenue conjoncturelle, le budget ne semble pas envisager la mise en œuvre d'actions visant à faire face à cette situation qui risque d'affecter les équilibres économiques globaux», s'inquiètent les analystes du CMC. Ajoutons à cela le retard pris dans le processus d'élaboration du projet de budget et son adoption qui risque de limiter considérablement l'impact attendu. Dans le meilleur des cas, les nouvelles dispositions budgétaires et particulièrement celles ayant trait à l'investissement, ne pourraient avoir l'effet escompté que lors du second semestre de l'année en cours. Pis encore, l'effet multiplicateur attendu risque de devenir un vœu pieux.