■ Plusieurs dossiers portés devant la Justice. ■ Des interrogations sur les méthodes de contrôle du gendarme du marché. Si au début dévoiler des délits d'initiés et de manipulation de cours était considéré comme sujet tabou, ces dernières années ce n'est plus vraiment le cas. Le gendarme de la Bourse a porté certains dossiers devant la Justice. À cet effet, Kawtar Raji, avocate au cabinet Lefèvre Pelletier & associés souligne que «l'absence de publicité des décisions de Justice impliquant des délits financiers rend impossible toute tentative d'évaluer l'ampleur de la délinquance financière au Maroc». Alors, ces dossiers ont-ils été déjà vidés par la justice ? Si oui, pourquoi les jugements n'ont-ils pas été rendus publics ? Mais, il faut souligner que le CDVM n'est pas tenu de publier toutes les sanctions qu'il prononce. «Cependant, il gagnerait plus à le faire, cela renforcera un peu plus son image et lui conférera plus de crédibilité sur le marché et auprès des investisseurs», déclare un professionnel de la place. Des sanctions qui laissent à désirer Un autre manquement est enregistré sur le marché et concerne les sanctions prévues et infligées aux contrevenants. En effet, ces dernières sont généralement minimes en comparaison avec les infractions commises et les préjudices subis. Un professionnel du marché précise : «Les sanctions ne dépassent jamais les avertissements ou des sanctions pécuniaires évaluées à quelques dizaines de milliers de DH. Seul un cas enregistré, GSI, a été transféré au tribunal où il traîne depuis des années, sans qu'on ne sache le chemin qu'a pris le dossier». Ce qui pousse éventuellement à se demander sur quelles bases le montant des sanctions est déterminé. Comment le CDVM peut-il affirmer que pour tel préjudice c'est le montant X qu'il faudrait infliger comme sanction ? Les critères de tailles, de rendements, de résultats sont-ils pris en considération ? Ou bien est-ce le préjudice en lui-même qui est sanctionné ? Sur un autre volet, le nombre des infractions enregistrées reste insignifiant. Rappelons que le CDVM avait décidé de saisir le procureur du Roi de trois dossiers se rapportant à des faits pouvant être qualifiés de délits d'initiés et deux dossiers se rapportant à des faits pouvant être qualifiés de manipulation de cours l'année passée. Un professionnel du marché a affirmé à cet effet que «les délits boursiers enregistrés au niveau du marché marocain sont très minimes. Sur les cinq dernières années, seulement 3 ou 4 délits d'initiés ont été relevés par le CDVM. Je ne pense pas que notre marché soit si efficient que ça». Pour ce dernier, «l'autorité du marché ne dispose ni de temps ni de moyens nécessaires pour relever les infractions commises par les SDB, les SDG, les sociétés cotées ou investisseurs». Une méthodologie trop laxiste ? Mais au-delà du temps, la méthodologie peut être sujette à caution. En effet, en cas de soupçon, le CDVM prévient la société de sa future visite, son objet, mais aussi des documents à préparer et à mettre à sa disposition lors de ladite visite. Kawtar Raji précise à cet effet que «la loi pose expressément les droits de la défense en imposant au CDVM de convoquer, dans les délais légaux, les contrevenants présumés. A titre d'illustration, le CDVM ne peut retirer l'agrément à un OPCVM que si le contrevenant a été dûment convoqué, au moins une semaine avant sa comparution devant le CDVM, afin d'être entendu». Le CDVM doit lui avoir, au préalable, signifié les infractions relevées et communiqué tous les éléments du dossier, conformément aux dispositions de l'article 112 de la Loi 1-93-213 du 21 septembre 1993 relative aux OPCVM. Le défaut de convocation ou de communication des éléments du dossier constitue un vice de forme susceptible d'entraîner l'annulation du retrait d'agrément. Entre temps, si infraction il y a, elle pourrait être réglée ou du moins résolue avant l'arrivée du gendarme. Cette réalité nous pousserait justement à croire que cette procédure incite plus les sociétés de Bourse à mettre à jour leurs documents qu'à les pénaliser en leur infligeant des sanctions. D'aucuns se demandent d'ailleurs si cette mesure n'est pas trop laxiste, vu qu'elle permet aux fraudeurs d'éviter les sanctions. ■