Historiquement favorable à l'arbitrage international comme mode de résolution des différends, le Maroc dispose d'atouts à même d'en faire un siège régional et international à l'instar d'autres places. Encore faut-il qu'il fasse l'effort de sa promotion. Le Royaume est parmi les premiers pays à avoir signé et ratifié la Convention de New York, pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères de 1958, de même que la convention de Washington, pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre Etats et ressortissants d'autres Etats en 1965, portant création du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI). Il a depuis franchi un important gap, puisqu'aujourd'hui le pays veut s'ériger en place régionale et internationale de l'arbitrage. Pour cela, le Maroc a lancé plusieurs chantiers, notamment l'adoption de la loi 08-05 abrogeant et remplaçant le chapitre VII du titre V du Code de la procédure civile et qui est entrée en vigueur en 2007. Une loi qui subira sous peu un toilettage, 10 ans après son entrée en vigueur. «Le Maroc a une longueur d'avance certaine, puisque le pays a été précurseur en signant et ratifiant des conventions internationales, celle de New York en 1958 et celle qui a créé le CRDI en 1965. La loi est très favorable mais nous essayons de l'améliorer parce que c'est la pratique qui montre les limites d'un texte de loi. Aujourd'hui, nous avons compris que par rapport à quelques dispositions et par rapport à la jurisprudence dans des tribunaux marocains, la lecture peut être faussée et donc la rédaction est à faire évoluer. Nous avons identifié les pistes d'amélioration avec le département concerné au sein du ministère de la Justice, pour retoucher la loi et nous espérons l'avoir très prochainement parce que c'est un gage de performance de la place d'arbitrage qu'est le Maroc», explique Hicham Zegrary, secrétaire général du Centre de médiation et d'arbitrage de Casablanca. Des atouts majeurs que le Royaume a donc fait prévaloir lors de la 3ème édition de la conférence Casablanca arbitration days 2017, organisée par Casablanca Finance City et tenue autour des derniers développements de l'arbitrage et la médiation en Afrique et au Maroc. L'occasion de présenter le nouveau règlement du CEMAC, entré en vigueur depuis le 1er janvier 2017 et disponible en quatre langues. «Il a été porté par la Cour d'arbitrage et a pris du temps pour le faire. Il y a eu un benchmark des meilleures pratiques qui existent sans faire du copier-coller. Le deuxième point de force est que nous avons une Cour diversifiée. Nous ramenons des praticiens qui ne font pas partie du centre mais qui apportent un regard externe, un regard du monde sur l'arbitrage en Afrique et au Maroc», relève le SG du CMAC, qui se veut l'interface de la place marocaine en matière d'arbitrage international. Le centre est certes récent mais il est le résultat de la coopération de deux centres historiques, notamment la Cour marocaine d'arbitrage créée en 1997 et le Centre euro-méditerranéen de médiation et d'arbitrage créé en 2009. «Nous avons grâce aux efforts consentis, et Casablanca Finance City a travaillé dans ce sens-là, fait émerger le CMAC qui dispose aujourd'hui de ses Cours de médiation et d'arbitrage, de ses clauses et de son règlement. Des atouts qui le prédisposent à acquérir une dimension régionale et internationale. De par notre position géographique, et la posture aujourd'hui de notre pays, notamment une grande crédibilité auprès du continent mais aussi auprès de nos partenaires européens, asiatiques et arabes présents en force à cette édition, le CMAC a vocation à devenir un centre international et à faire émerger davantage l'arbitrage et la médiation au Maroc et en Afrique», défend Hicham Zegrary. Des qualités que partage Emmanuel Gaillard (photo), professeur agrégé aux Facultés de droit, avocat au Barreau de Paris et associé Shearman & Sterling LLP, Paris : «Il y a une très grande concurrence internationale pour attirer des arbitrages dans les différents Etats, car en plus d'être un mode alternatif de règlement de différends, c'est également un marché avec tous ceux qui gravitent autour. Depuis longtemps, le Maroc a été favorable à l'arbitrage, puisque le pays a été parmi les premiers à signer et ratifier la convention de New York de 1958 qui est la constitution du droit de l'arbitrage et la convention de Washington en matière d'investissement. De même qu'il dispose de nombreux traités de protection de l'investissement, une bonne loi et de juges favorables à l'arbitrage. Ce qui permet à ce mode alternatif de règlement de différends de se développer». Le Maroc a de ce fait de nombreux atouts, notamment une carte majeure qu'est la stabilité politique, et un cadre réglementaire favorable, qu'il faudrait compléter par des traités sur la protection de l'investissement en Afrique subsaharienne. Mais un point manque à l'appel auquel il faut impérativement remédier : faire la promotion internationale de la place marocaine pour que l'arbitrage se développe davantage et qu'elle soit reconnue pour être un siège de l'arbitrage à l'instar de Paris, la Suisse ou Singapour, note Emmanuel Gaillard.