L'Association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS), présidée par le Dr Khadija Moussayer, organise samedi sa troisième journée de l'auto-immunité. Nous avons à cette occasion abordé le sujet avec le Dr. Khadija, voici ce qui en ressort : « Le corps dispose d'un système immunitaire, un réseau de cellules spécialisées et d'organes qui le défendent contre les microbes, virus, parasites... Le cœur de ce dispositif repose sur sa capacité à faire la différence entre ces agresseurs et nos propres cellules. Un défaut de fonctionnement peut rendre le corps incapable de les distinguer : les globules blancs vont attaquer par erreur nos cellules et causer des dégâts à nos organes. On assiste alors à une véritable autodestruction, d'où le terme employé de maladie auto-immune. « Ce type de pathologie touche entre 7 et 10 % de la population mondiale et représente la 3ème cause de morbidité dans le monde après les affections cardiovasculaires et les cancers. Il occupe également le deuxième ou troisième poste des dépenses de santé dans la plupart des pays. « Et pourtant, peu de personnes peuvent citer une seule de ces affections quand on parle de « maladie auto-immune ». C'est en effet un concept scientifique relativement récent et encore peu médiatisé au Maroc, même si ces phénomènes immunitaires constituent aujourd'hui un des trois axes principaux de la recherche scientifique avec les neurosciences et la cancérologie. Tout le monde connaît en fait plusieurs de ces nombreuses pathologies (plus d'une centaine) : polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite, maladie cœliaque ou intolérance au gluten, psoriasis, lupus, sclérose en plaques, myasthénie, diabète juvénile…sans compter une partie significative des maladies thyroïdiennes, du sang, du système digestif … Elles constituent une même famille ayant en commun des mécanismes semblables, même si les organes touchés peuvent être différents, De plus, alors que les maladies infectieuses sont maintenant partout en recul, elles progressent rapidement à la façon d'une « épidémie silencieuse ». « Un deuxième fait ignoré : ce mal est essentiellement féminin (3 à 4 femmes concernées pour un homme). Certaines de ces maladies vont même jusqu'à frapper 10 à 20 fois plus les femmes! Au moins une femme sur 9 est ou en sera atteinte au cours de sa vie. Cette prédominance s'expliquerait par le rôle que joueraient certaines hormones (les œstrogènes), les chromosomes féminins ainsi que la grossesse. D'autres facteurs motivent également leur survenue : hérédité, infections, pollution… « Leurs premières manifestations, souvent sournoises et peu perceptibles (fatigue, étourdissements, douleurs diffuses venant et disparaissant…), font fréquemment douter de leur déclenchement. Beaucoup ne sont diagnostiqués que plusieurs années après. Même si elles sont incurables, des traitements (les immunosuppresseurs notamment) existent pour contenir leurs atteintes et restaurer une certaine qualité de vie. « De nouvelles thérapeutiques appelées biothérapies, issus d'organismes vivants, ouvrent depuis quelques années de grands espoirs dans la résolution de ce fléau. Elles sont encore malheureusement d'un coût élevé qui en limite l'accès au Maroc à ceux qui bénéficient d'une bonne couverture médicale : un seul traitement peut coûter en effet autour de 60 000 dirhams! Au total, les débats, lors de cette manifestation scientifique, porteront en particulier sur les dommages (potentiellement mortels parfois) aux organes « cibles » (cœur, poumons, foie, système nerveux, œil...) que provoquent habituellement ces pathologies. Tout ceci en présence notamment d'experts internationaux, comme le Pr Loïc Guillevin, président d'honneur d'AMMAIS, et des représentants d'associations de malades française et marocaines »