« J'ai 76 ans et encore beaucoup de projets avec la fibre végétale » Les éditions « La Croisée des Chemins » publient « Tu en Verras de Toutes les Couleurs », un ouvrage de 350 pages retraçant la vie et l'œuvre du peinte marocain André Elbaz. La publication de l'ouvrage d'André Elbaz coincide avec les rétrospectives consacrées à l'œuvre d'André Elbaz dans les deux Villas des Arts de Casablanca et Rabat durant l'année 2010. « Tu en Verras de Toutes les Couleurs » qui est un ouvrage d'une finesse littéraire singulière et anecdotique, nous révèle qu'André Elbaz aurait cru avoir inventé le collage avant de se rendre compte que les dadaïstes et les cubistes avaient été ses prédécesseurs dans cet art une fois débarquer d'El Jadida, sa ville natale, à Paris en 1955. Car, André Elbaz est modestement un peintre autodidacte et au fil des temps, il découvrira l'histoire de l'art qu'il perfectionne avec beaucoup d'aisances et de créativités, notamment au musée d'art moderne de Paris. Il fera ainsi, de 1955 à 1962, son apprentissage de la galère et de la peinture à Paris, puis il reviendra au Maroc durant une année avant de rejoindre une autre fois l'Europe. Il acquérait ses premières ventes, ses premiers signes de reconnaissance, sa première exposition, et enfin une invitation pour montrer ses travaux au Maroc. Première rétrospective à Tanger en Mars 1962, en Avril de la même année à Bab Rouah à Rabat et un mois plus tard à Casablanca. En cette période, il accepte la proposition de Farid Belkahia d'enseigner la peinture à l'école des beaux-arts à Casablanca. Il y passera une année, avant d'être remercié ! André Elbaz rencontre Chaïbia, par l'intermédiaire de son fils Hossein Talal, et l'encourage à faire ses premiers dessins. André quitte définitivement le Maroc en juin 1967 après les évènements dramatiques qui ont coucoués le monde arabe. Il reviendra exposer au Maroc presque 40 ans plus tard ! Dans cette période, il acquerra notoriété et gloire et continuera le collage, inventera le Pictodrame, posera sur toiles certains conflits, utilisera la fibre végétale, mettra en scène des courts métrages et des films d'animation, peindra ses villes atypiques, visitera l'Amérique, le Ja-pon, vivra à Londres, au Québec, avant de s'installer définitivement, avec femme et enfants, entre Paris et Narbonne. Sa période la plus féconde ? « C'est mon dernier mode de travail, qui me conduit à détruire mon œuvre, pour exprimer autrement le monde que nous vivons. C'est la série dite l'Exécution de l'œuvre, les Anamorphoses, les Paysages éclatés, les Lacérations à la main et à la machine. Mais ma période la plus féconde sera, j'espère, celle que j'entreprendrai après cette rétrospective, qu'il a fallu neuf mois à Nada Naami, la commissaire, ainsi qu'à Françoise et à moi, pour mettre en place… J'ai 76 ans et encore beaucoup de projets avec la fibre végétale »… « Tu en Verras de Toutes les Couleurs » nous livre enfin le fardeau pesant d'André Elbaz à savoir la crise identitaire d'un grand peintre français d'origine marocain et de religion juive. « Au Québec, raconte-t-il, plusieurs ne voient en moi qu'un ‘'maudit Français''. En France, je suis traité de Marocain ; pour les Ashkénazes, je suis un Sépharade… ; en Amérique on me répond, comme le directeur du Withney Museum, ‘'dommage que vous soyez Français'' ; en Israël, je suis ‘'shahar'', le noir, ou le ‘'Morocco saquin'', le Marocain au couteau. Et au Maroc, j'entends parfois « hadak lihoudi… » De part des collages et des toiles très originales, le livre d'André est une invitation à un voyage pictural et artistique de toutes les couleurs.