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[Entretien] Omar Bakkou explique pourquoi et comment le Dirham se convertit librement (2e partie)
Publié dans EcoActu le 09 - 07 - 2021


Interviewé par Soubha Es-Siari |
Dans cette seconde partie de l'entretien, Omar Bakkou, économiste et spécialiste en politique de change dévoile les dysfonctionnements et les incohérences ayant abouti un mode de convertibilité du dirham assez inédit. Dans son ouvrage intitulé « La convertibilité du DH en question« , Omar Bakkou explique comment aboutir à une convertibilité totale ordonnée.
EcoActu.ma : Pour remédier à une convertibilité désordonnée et justement basculer vers une convertibilité ordonnée. Quelles sont d'après- vous les réformes à mener par le Maroc ?
Omar Bakkou : Le qualificatif « convertibilité désordonnée » symbolise deux caractéristiques du cadre réglementaire régissant les opérations de conversion du dirham en devise :
-La première caractéristique concerne la forme de ce cadre réglementaire qui se présente plutôt sous forme d'un recueil de dérogations avec comme corollaire la dispersion et l'absence de règles uniformes applicables aux différentes transactions économiques internationales : 7 régimes pour les opérations d'importation (contre un seul régime dans 44 pays parmi les 68 pays qui adoptent le contrôle des changes), 18 régimes pour les opérations de voyages( contre deux régimes dans la majorité des pays du monde) , 10 régimes pour les transferts courants ( contre un seul régime dans la majorité des pays du monde), Plus de 10 régimes en matière d'opérations d'exportation(contre un seul régime dans la majorité des pays du monde), 20 régimes pour le régime des comptes(contre deux régimes dans la majorité des pays du monde ), etc.
-La deuxième caractéristique concerne le fond dudit cadre réglementaire qui recèle deux dysfonctionnements essentiels : d'une part, il est incohérent et, d'autre part, tortionnaire.
L'incohérence du cadre règlementaire global régissant la conversion du dirham en devise est liée à l'inapplication de deux principes fondamentaux en matière de processus de démantèlement des restrictions relevant du contrôle, à savoir l'ordre chronologique et l'approche intégrée.
En effet, l'ordre chronologique stipule que libéralisation des opérations courantes doit être opérée préalablement à celles financières. Toutefois, le Maroc a procédé en 2007 et 2010 à la libéralisation des opérations financières des résidents dans la limite de certains seuils, alors que les opérations courantes demeurent marquées par plusieurs micro restrictions.
Cela a abouti à un mode de convertibilité du dirham assez inédit, dans le sens où le dirham peut être légalement converti pour la réalisation des opérations financières des résidents (importations de biens et de services, placements à l'étranger des institutions financières, investissements à l'étranger des entreprises non-financières, etc.), alors qu'il ne peut pas être converti à travers les canaux légaux pour la réalisation de certaines opérations courantes marginales sans enjeux économiques significatifs, telles les opérations de voyages à l'étranger, les règlements anticipés des opérations d'importation de biens et de services, etc.
Cette situation s'applique à toutes les opérations qu'ils s'agissent de celles effectuées par les institutions financières et les entreprises non financières.
Pour les institutions financières, notamment celles bancaires, ces dernières peuvent effectuer des dépenses en devises au titre d'opérations de placements en valeurs étrangères sans limitation sur le plan de la règlementation des changes (les seules limitations ont trait à la règlementation prudentielle), alors qu'elles ne peuvent pas par exemple réaliser des opérations courantes, tels l'octroi de cautions bancaires ou d'opérations de couverture contre les risques financiers, autres que celles définies par la règlementation des changes.
Pour les entreprises non financières, elles peuvent effectuer des dépenses en devises pour la réalisation d'investissement à l'étranger pouvant aller jusqu'à 100 millions de dirhams par an, alors qu'elles ne peuvent pas effectuer des dépenses en devises pour la réalisation d'opérations courantes, tels le règlement par anticipation des importations de marchandises dont le montant dépasse 200.000 dirhams, les voyages professionnels portant sur des montants supérieurs à 500.000 dirhams par an, etc. (également ils ne peuvent pas effectuer des investissements dans les zones d'accélération industrielle établies au Maroc ).
De même, ces entreprises lorsqu'elles réalisent des opérations d'exportation seront libres de ne pas rapatrier les recettes en devises issues de leurs exportations (elles peuvent accorder des crédits à leurs clients étrangers à concurrence de 85% de la valeur des exportations et elles peuvent ouvrir des comptes en devises), alors que les mêmes entreprises sont obligées de rapatrier lesdites recettes en devises en vertu d'une autre disposition.
S'agissant de l'approche intégrée, elle stipule que le démantèlement des restrictions relevant du contrôle des changes afférentes aux différentes transactions doit être établi d'une manière coordonnée avec les autres politiques d'ajustement agissantes sur la balance des paiements.
Cela signifie concrètement que chaque opération de libéralisation doit donner lieu au transfert de la compétence de fixation des modalités de réalisation de cette transaction à une autre réglementation relevant des autres politiques d'ajustement : loi sur le commerce extérieur et Codes des Douanes et Impôts Indirects pour les importations de marchandises ; loi sur le commerce extérieur et législation fiscale pour les importations de services, législation du travail pour le transfert des revenus du travail , dispositions prudentielles de Bank Al Maghrib pour les opérations d'emprunt extérieur et de placement en devises des banques, Code des assurances pour les placements des sociétés d'assurance et de réassurance , etc.
Par conséquent, l'inapplication ou plutôt l'application partielle de cette règle (elle s'applique aux opérations d'importations de marchandises) a engendré plusieurs dysfonctionnements. Ces dysfonctionnements prennent la forme de redondances, de conflits de compétences et de vides en matière de régulation.
Quant au « caractère dit tortionnaire » du cadre règlementaire régissant la conversion du dirham en devise, ce qualificatif symbolise l'idée présentée en réponse à la question précédente, à savoir que les restrictions relevant du contrôle des changes ciblent des opérations limitées par des contraintes économiques pures, tandis que les opérations librement réalisables, notamment les importations de marchandises (qui constituent les transactions économiques dominantes au niveau mondial) bénéficient d'une liberté « excessive ».
Ainsi, pour réajuster ce régime atypique, un plan de réforme détaillé est proposé dans mon ouvrage. Ce plan s'articule techniquement autour des principaux axes de réforme suivants :
-La déconstruction du cadre réglementaire actuel régissant les flux de la balance des paiements connu sous le nom de la règlementation des changes. Cela à travers la séparation entre deux catégories de dispositions réglementaires : les dispositions applicables aux transactions sous-jacentes aux opérations du marché des changes (importations et exportations de marchandises et de services, investissements des résidents et des non-résidents, etc.) et les dispositions relatives aux opérations du marché des changes (achats et ventes de devises, détention de devises, opérations de couverture contre le risque de change, etc.) .
-L'extraction des dispositions réglementaires régissant les transactions précitées de la réglementation des changes et leur transfert vers leurs réglementations respectives. Cette suppression consistera à dupliquer le schéma réglementaire déjà prévu en matière d'importation de marchandises (qui constituent par ailleurs l'essentiel des dépenses en devises du Maroc) sur les autres transactions internationales. Cela signifie concrètement que toutes les dépenses en devises relatives à ces transactions(y compris le non rapatriement des revenus des résidents au titre de leurs activités internationales) seront libres, lorsque ces transactions sont réalisées conformément aux modalités et conditions fixées par les réglementations régissant ces transactions : loi sur le commerce extérieur et législation fiscale pour les importations de services, Code des Douanes et Impôts Indirects pour les modalités de paiements des exportations de marchandises, etc.
– L'harmonisation de la réglementation des transactions sous-jacentes aux opérations du marché des changes, à travers la levée des micro-restrictions affectant les paiements relatifs aux transactions économiques courantes et financières des non-résidents.
– Le redressement du dispositif de régulation des transactions sous-jacentes aux opérations du marché des changes, à travers la révision des cadres réglementaires régissant les transactions bénéficiant déjà d'un cadre libéral, à savoir les importations de marchandises et de services : révision de la politique commerciale extérieure notamment à travers la renégociation des accords de libre échange et la réécriture des dispositions règlementaires relatives aux importations de services, etc. .
Dans le même sillage, les prérequis sont-ils tous réunis pour que le Maroc puisse basculer à une convertibilité totale du dirham ?
Le concept de « prérequis » est souvent utilisé pour faire allusion aux conditions macroéconomiques nécessaires pour une transition indolore à un régime de convertibilité totale.
Ces conditions macroéconomiques, telles qu'elles sont énumérées dans les différentes études effectuées à ce titre ainsi que dans la littérature du FMI, comprennent la soutenabilité des équilibres budgétaires, la stabilité du taux d'inflation, l'équilibre du compte courant, la suffisance du niveau des avoirs de réserve, une croissance économique forte, la qualité du système bancaire, etc.
Ces différents indicateurs gravitent autour d'un indicateur central qui est l'équilibre structurel du compte courant . Cet indicateur permet en réalité de mesurer « la qualité de l'hygiène de vie d'une économie », c'est-à-dire le degré de concordance entre sa production ou son revenu et ses dépenses globales. Autrement dit de voir si l'économie en question est une économie qui vit au-dessus ou au-dessous de ses moyens. Cette qualité affecte tous les autres indicateurs :
-Les équilibres budgétaires et la situation financière de l'Etat seront compromises car un compte courant déficitaire est à la fois la conséquence (souvent les sur dépenses génératrices de déficits du compte courant sont dues aux dépenses publiques) et la cause du déficit budgétaire (un déficit du compte courant a pour corollaire une affaissement de la production qui se traduit généralement par une baisse des recettes fiscales laquelle baisse engendre à son tour des déficits du budget public );
-Le taux d'inflation sera affecté car des déficits du compte courant persistants engendrent nécessairement des déficits budgétaires lesquels engendrent en cas d'épuisement de toutes les possibilités de leur financement (financement intérieur et extérieur), le recours par le gouvernement au financement direct par la banque centrale. Ce recours connu par l'expression de « planche à billet » se traduit par l'envolée du taux d'inflation.
-Les avoirs de réserve seront également affectés car des déficits du compte courant persistants ne peuvent pas être financés d'une manière illimitée par l'endettement extérieur.
Cette approche en terme de prérequis s'appuie à mon avis sur un substrat intellectuel biaisé ou en tout cas non valable pour analyser le cas du Maroc. En effet, les conditions économiques mis en exergue par ladite approche ont été déduites des déterminants des contrôles des changes purs , c'est-à-dire ceux mis en place en période de guerre (et également par plusieurs pays jusqu'au début des années 1980) : affaissement de la production, baisse des recettes fiscales, difficultés de financement du déficit budgétaire, pénurie des ressources nationales et également internationales pour le financement du déficit budgétaire, recours à la taxe inflationniste pour le financement du déficit budgétaire.
Par conséquent en suivant cette logique, le contrôle des changes devrait être abandonné dans le cas de disparition de ces conditions économiques : amélioration de la croissance économique, équilibre budgétaire, stabilité du taux d'inflation, etc.
Aujourd'hui dans le cas du Maroc, nous adoptons une convertibilité excessive du dirham mais qui se présente, faute d'une mise à niveau du cadre réglementaire régissant cette convertibilité, sous forme d'un régime de convertibilité restrictif. Car si on voudrait appliquer les prérequis on doit revenir sur les choix libéraux adoptés par le Maroc depuis le milieu des années 1980 , solution qui serait impossible à adopter dans le contexte mondial actuel. La solution que je propose dans mon ouvrage , c'est d'inverser ce concept à travers la mise en place d'une convertibilité totale ordonnée.
Cela requiert , en plus des mesures proposées ci-dessus pour le passage à une convertibilité ordonnée , une simple actualisation logique et intelligente du cadre réglementaire régissant les opérations de conversion du dirham en devise en consignant les éléments de cette actualisation dans une loi cadre de régulation des opérations de la balance des paiements qu'on pourra appeler loi sur la convertibilité du dirham. Cette loi est fondée sur deux principes essentiels :
-D'une part, la liberté générale (abolition du système de rationnement) de réalisation des « opérations de la balance des paiements » ;
-D'autre part, l'obligation de conformité de ces opérations à des règles bien définies souvent scindées en deux catégories : celles régissant les opérations sous-jacentes aux opérations du marché des changes précitées fixées par les réglementations régissant ces opérations citées ci-dessus et celles régissant les opérations du marché des changes (achats et ventes de devises, détention de devises, opérations de couverture contre le risque de change, etc.) fixées par un arrêté ou un décret du Ministre chargé des finances relatives à l'organisation du marché des changes et par des circulaires d'application de la banque centrale.
Vous comprenez à travers les éléments présentés ci-dessus que la convertibilité totale ne signifie pas, comme il est établi dans l'imaginaire collectif, la liberté de remplir de grands sacs en devises, puis les transporter librement à l'étranger ; ce système n'existe nul part ailleurs.
La convertibilité consiste plutôt en un système fondé sur un cadre réglementaire , soit une loi que chaque pays se permet de lui accorder un titre selon ses préférences propres(loi sur la défense de la valeur de Livre en Turquie, loi sur la convertibilité en Russie ,etc.), loi ayant deux principales caractéristiques : le principe de liberté générale de réalisation des opérations de la balance des paiements , c'est-à-dire toutes les opérations potentiellement dénouables sur le marché des changes (opérations et l'obligation de conformité de ces opérations à des règles bien définies et souvent plus rigoureuses que celles existant dans les pays qui adoptent le contrôle des changes.
Le Maroc se penche aujourd'hui sur la mise en place d'un nouveau modèle de développement qui se fixe des objectifs à l'horizon 2035. Quelle place doit occuper la politique de change dans ce nouveau modèle pour pallier un tant soit peu le problème de compétitivité dont pâtit notre économie d'une manière structurelle ?
La politique de change comprend deux composantes : la politique du taux de change et la politique de contrôle des changes.
-La politique du taux de change peut-être définie comme la stratégie adoptée par un pays donné en matière de comportement du taux de change de sa monnaie à moyen et long terme. Cette politique peut être scindée en deux types de politiques :
Les politiques de taux de change rigides, soit des politiques qui se caractérisent par la stabilité des taux de change sur un horizon temporel donné (généralement le moyen et le long terme). Cette stabilité résulte de la conjugaison de deux facteurs : le choix d'un régime fixe ajustable (appelé régime d'ancrage conventionnel) et le faible recours aux ajustements du taux de change. Les politiques rigides se traduisent souvent par l'apparition de situations de surévaluation du taux de change (pour simplifier, lorsque la demande de devises est supérieure à l'offre de devises).
Les politiques de taux de change flexibles, c'est-à-dire des politiques qui se caractérisent par la variabilité des taux de change sur un horizon temporel donné (généralement le moyen et le long terme). Cette variabilité peut être soit contrôlée soit confiée aux forces du marché. La variabilité contrôlée concerne le cas de pays qui adoptent un régime fixe couplé à un usage fréquent de mesures de dévaluations des taux de change . Cette dernière stratégie a été adoptée par plusieurs pays, notamment Singapour ,l'Ile Maurice, la Chine etc. Alors que la variabilité confiée aux forces du marché désigne le cas de pays qui adoptent un régime flottant.
Ainsi, en se référant aux éléments présentés ci-dessus on constate que la politique du taux de change adoptée par le Maroc depuis la création du dirham en 1959 est une politique pouvant être qualifiée de rigide : régime fixe et faible recours aux mesures de dévaluation du taux de change, hormis la période s'étalant de 1980 à 1992 marquée par l'adoption de huit mesures de dévaluation. A titre de comparaison, la Turquie a effectué 164 mesures de dévaluation en une seule année, soit l'année 1981, de même la Chine a dévalué sa monnaie nationale à peu près 200 fois durant la période 1980-1995.
Cette rigidité du taux de change a eu un impact négatif sur « la compétitivité prix » du Maroc , et, partant, sur les équilibres extérieurs (soldes du compte courant) : le taux de change du dirham était surévalué durant les périodes s'étalant de 1973 à 1980 et de 2009 à 2013.
Pour remédier à cette situation, le Maroc a lancé un processus de flexibilisation graduelle de la politique du taux de change à travers la deuxième modalité présentée ci-dessus(le flottement). Ce processus a été entamé à travers l'adoption d'un régime fixe au sein d'une bande horizontale, bande qui fera l'objet d'un élargissement graduel jusqu'à sa suppression.
La première étape de ce processus de flexibilisation a été franchie le 15 janvier 2018 avec la mise en place d'un régime fixe autour au sein d'une bande de fluctuation de plus ou moins 2,5% autour d'un taux de change central fixé selon la méthode du panier (c'est-à-dire une différence entre la valeur minimale et maximale du taux de change de 5% maximum). Puis, une deuxième étape dudit processus a été franchie le 9 mars 2020, avec l'élargissement de la cette bande de fluctuation à 5% (c'est-à-dire une différence entre la valeur minimale et maximale du taux de change de10% maximum).
D'autres étapes seront programmées à l'avenir en fonction de l'évolution de la situation financière extérieure du Maroc et de l'appréciation des autorités.
Cette modalité de flexibilisation adoptée par le Maroc recèle un biais inter-temporel. Ce biais réside dans le fait qu' il s'agit d'un remède présumé vertueux dans une conjoncture de déficits du compte courant générateurs de situations de demandes de devises supérieures à son offre, comme celle enregistrée au Maroc durant la période d'étalant de 2008 à 2012. Ce remède devient, en revanche, non bénéfique dans des contextes de demandes de devises inférieures à son offre, car il se traduira par une appréciation du taux de change.
Ce scénario est très probable au Maroc, au vu de la structure du marché des changes du Maroc marquée, hormis la phase 2008-2012 par une offre excédentaire de devises, et ce, grâce aux transferts des MRE et aux recettes au titre des investissements directs étrangers. Il faudrait ajouter à cet inconvénient la volatilité du taux de change inhérente au flottement, laquelle volatilité génère des coûts de couverture pour se prémunir contre l'incertitude engendrée par ladite volatilité ( coûts au titre des opérations d'importation, d'exportation, d'investissement étranger au Maroc.
Par conséquent, la solution la plus optimale sur le plan économique réside dans l'adoption d'une politique de flexibilisation contrôlée du taux de change : le maintien du contrôle sur le taux de change par l'Etat, tout en procédant à des mesures de dévaluation de ce taux en fonction de l'évolution de la situation extérieure du Maroc. Cette solution demeure toutefois politiquement difficile à mettre en œuvre, du fait que les mesures de dévaluation sont perçues comme des décision d'augmentation des prix par le gouvernement, augmentation jugée comme socialement inacceptable .
Ainsi , compte tenu des éléments présentés ci-dessus et afin d'optimiser le fonctionnement du régime de flottement , il faudrait que ce régime soit piloté dans un sens qui permet de bénéficier des gains inhérents à l'adoption de ce régime(dépréciation du taux de change en cas de déficit du compte courant) et de minimiser ses inconvénients précités : éviter autant que possible l'appréciation du taux de change et mettre en place des instruments appropriés de couverture pour les opérateurs économiques.
-Quant à la politique de contrôle des changes , elle vise aujourd'hui à contrôler les opérations de demande de devises (autorisation préalable de l'administration) destinées à la réalisation de transactions financières extérieures (investissements en valeurs étrangères au-dessus de certains seuils) et à la détention de devises à des fins spéculatives (détention de devises non motivée par la réalisation d'opérations d'échanges extérieurs).
Pour la mise en œuvre de cet objectif, cette politique s'appuie sur un cadre réglementaire conçu de façon à éviter que les opérations de conversion du dirham en devise librement réalisables ne soient un canal pour la réalisation des transactions soumises au contrôle précitées. Ce cadre réglementaire définit ces transactions et fixe les conditions de leurs réalisations.
Concrètement la politique de contrôle des changes adoptée actuellement au Maroc ressemble à un mur de séparation entre « le territoire dirhams » et « le territoire devises » dans lequel ont été frayés deux portes : une grande porte ouverte accessible à l'aide « d'une balise », soit le cadre réglementaire précité et une autre porte par laquelle sont censées se diriger les personnes qui veulent emprunter un chemin non prévu par ladite balise.
L'analyse cette politique effectuée dans l'ouvrage que je viens de publier a permis de faire ressortir les deux principaux constats suivants :
-Le premier est que la démolition de cette deuxième porte serait sans impact sur le fonctionnement du marché des changes , et ce, pour plusieurs raisons dont certaines ont été citées ci-dessus ;
-Le deuxième est que la première porte est mal balisée : elle contient trop de détails et empêche la réalisation de certaines opérations marginales sans enjeu significatif. Cela exerce un impact négatif sur la dynamique du tissu productif : coûts de transaction pour les opérateurs économiques, coûts en termes de mauvaise image pour le climat des affaires, etc.
Ainsi, la réforme de cette politique, dont les grandes lignes ont été présentées ci-dessus, permettra à coup sûr d'améliorer le climat des affaires et agira par conséquent positivement sur la compétitivité de notre économie.
Lire également : [Entretien] Omar Bakkou explique pourquoi et comment le Dirham se convertit librement (1ére partie)


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