Pour améliorer la sécurité juridique des transactions foncières, le Code des droits réels subira son deuxième amendement depuis son entrée en vigueur en 2012. La chasse à l'acte sous seing privé continue au profit de l'acte authentique. par A.C. Les affaires de spoliation foncière qui éclatent de temps à autre ont fini par pousser le gouvernement à réagir, en élaborant un projet de loi portant amendement du Code des droits réels. Comme le souligne la note de présentation de ce projet, signée par le ministre de la Justice et des libertés, ce phénomène porte atteinte au régime de la propriété foncière marocain, ternit l'image du Maroc et porte préjudice au droit de propriété consacré par notre constitution. Que prévoit le projet de loi qui a été adopté par le Conseil du gouvernement le 23 septembre dernier? La solution proposée, dit le ministre de la Justice et des Libertés, est le fruit d'une concertation entre son département, la Direction Générale des Impôts, l'Agence Nationale de la Conservation Foncière, du Cadastre et de la Cartographie, l'Ordre National de Notaires, l'Ordre National des Adouls et l'Association des Barreaux d'avocats du Maroc. En quoi consiste-t-elle ? Selon toujours la note de présentation du projet de texte, l'examen des causes qui sont derrière les affaires de spoliation foncière a démontré que les transactions concernées sont conclues sur la base de fausses procurations établies sous seing privé soit au Maroc, soit à l'étranger. Plus de procuration sous seing privé Pour attaquer ce fléau à ses origines, la solution est donc, de bannir les procurations sous seing privé en matière de transactions immobilières. Par quel moyen ? En étendant le champ d'application de l'article quatre du Code des droits réels aux procurations. Rappelons que ce fameux article du Code des droits réels adopté en 2011, a «révolutionné» le droit foncier marocain. Comment ? Tout simplement en interdisant l'acte sous seing privé pour toute opération de transfert de la propriété (vente, donation) ou la constitution, le transfert et la modification d'un droit réel (hypothèque, usufruit...). Depuis l'entrée en vigueur de cet article, tous ces actes sont obligatoirement établis par acte authentique (notarié ou adoulaire) ou par acte dressé par un avocat agréé près la Cour de Cassation. Cette petite «révolution» est venue secouer une culture profondément ancrée dans notre société. Les contrats et actes portant sur les transactions immobilières se faisaient en bonne partie par actes sous seing privé ne procurant aucune sécurité aux parties contractantes. En imposant l'intervention des professionnels juridiques (Adouls, notaires et avocats), le législateur vise à améliorer la sécurité des transactions foncières. Bien sûr, cet article n'a pas été bien reçu ni par le grand public, ni par les agents d'affaires (écrivains publics). Les arguments ne manquaient pas ; alourdissement des formalités, coût élevé du passage par les professionnels juridiques et privation des agents d'affaires d'une bonne partie de leur chiffre d'affaires. Ceci a donné lieu au premier amendement de l'article 4 qui a rétabli l'acte sous seing privé pour l'inscription et la radiation des hypothèques de petits montants. En interdisant les procurations établies sous seing privé, le législateur fait gagner au Maroc des points importants en matière de sécurité foncière. Mais il faut admettre que le travail «d'assainissement» de notre droit foncier n'est qu'à ses débuts. Beaucoup de chemin reste à faire. Certes, l'adoption du Code des droits réels en 2011 est un grand pas puisqu'il a codifié une bonne partie du droit foncier. D'autres questions méritent d'être attaquées pour faire de notre droit foncier un bon outil de protection de la propriété privée et un levier de développement économique et social du pays. A l'heure actuelle, il est considéré comme l'une des contraintes majeures au développement du pays.