Le dossier de la Samir ne cesse de faire couler de l'encre depuis plusieurs semaines déjà. Dans cette interview, Abdelkader Amara, ministre de l'Energie, des mines, de l'eau et de l'environnement, revient sur cette affaire et également sur les mesures mises en place en vue de compléter le mix énergétique du Royaume avec l'utilisation de l'énergie nucléaire. propos recueillis Par Roland Amoussou Quelle lecture faites-vous de la situation actuelle de la Samir ? Abdelkader Amara : Pour la Samir, je crois que c'est assez clair. C'est une entreprise privée et ses dirigeants doivent prendre leur responsabilité. On ne peut pas demander à l'Etat de mettre la main à la poche pour renflouer les caisses d'une société privée, afin de la secourir. Et ceci, alors même qu'elle avait tous les moyens pour être une bonne entreprise. Vu la situation, quels sont les scenarii possibles de sortie de crise à votre avis ? Le seul scénario possible pour une sortie de crise de la Samir, c'est que cette société paie ses dettes à l'Etat marocain, et rien d'autre. Outre les énergies renouvelables, le Maroc souhaite également développer l'énergie nucléaire. Toutefois, il y a un grand risque lié à son utilisation. Alors, quelles sont les conditions réunies pour que le Maroc puisse exploiter sereinement cette énergie ? D'abord, il faut savoir que le débat sur le nucléaire et ses risques est un débat international, qui se fait partout. Le nucléaire est un mode de production énergétique qui a ses avantages et ses inconvénients. Il est clair qu'avec le déclin des énergies fossiles, on sera de plus en plus amené à trouver des énergies alternatives. Alors, il y a les énergies renouvelables et il y a aussi l'énergie nucléaire. Au Maroc, je pense qu'on est objectif et serein. Ce qu'on est en train de faire, c'est de se préparer pour une éventuelle décision qui viendrait au moment opportun pour compléter notre mix énergétique. C'est une étape à laquelle on ne peut pas échapper. Maintenant, comme tout projet bien sûr, il faut calculer les risques et le coût. L'évolution technologique, et aussi le fait qu'il y ait plusieurs pays qui, jadis n'étaient pas dans cette façon de faire et qui le sont maintenant, comme la Turquie, les Emirats Arabes Unis, la Biélorussie, et bien d'autres, sont des éléments qui me font penser que le Maroc, cette année, va prendre une décision quand les conditions seront réunies. Ce qui est très important, c'est qu'avant de parler de cela, et contrairement à ce qui se fait dans les autres pays, c'est d'abord le fait de construire ses capacités et ses compétences. On ne peut prétendre faire du nucléaire si on n'est pas en phase avec la législation internationale et avec les institutions au niveau national en charge du contrôle des installations. Ce sont des préalables qu'il faut réunir pour le nucléaire. A ce propos, où en est-on par rapport à la mise en place de ces institutions au Maroc ? Au Maroc, on est très bien avancé. Déjà en 2014, nous avons adopté la loi 142-12, qui nous a permis de créer une autorité de contrôle de sûreté, de sécurité. Ce qui représente donc, un préalable pour prétendre faire de l'énergie nucléaire. Donc, nous avons la loi, nous avons le décret qui va sortir dans les jours qui viennent pour créer cette autorité et je pense qu'avec cette mission de l'AIEA, on aura encore les idées plus claires, notamment en matière d'études technico-économiques et des sites qualifiés, et on verra après bien sûr. Quelles sont vos attentes par rapport à cette mission que va entamer l'AIEA dans le pays ? C'est une mission d'experts qui viennent évaluer un certain nombre de points sur un plan objectif. C'est-à-dire que pour eux, ce n'est pas le côté politique qui est important, mais plutôt ce que nous avons dans notre pays qui ferait de nous un pays qui peut héberger un programme nucléaire. Ils auront donc la mission de décortiquer ce que nous avons, ce qui va nous donner une image de nos acquis. Tout ceci nous permettra de capitaliser sur ces acquis, et d'attaquer aussi ce que nous n'avons pas encore.