Concrètement, la réforme vise à améliorer le pouvoir d'achat des Marocains nécessiteux. Dans l'immédiat, des mesures concrètes ont été prises pour atteindre cet objectif. A partir du 1er juillet 2008, un nouveau système de redéploiement de la répartition de la farine subventionnée sur la base de critères de pauvreté prenant en considération les communes défavorisées ciblées sera instauré. Et dès le 1er octobre 2008, l'affichage du prix de la farine subventionnée sur le sac entrera en vigueur, ce qui mettra fin à la spéculation. Mais ce n'est pas tout. Un système de péréquation des prix du sucre et, éventuellement, l'affichage de son prix sur les emballages sera également mis en place. Concernant l'autre mesure, celle relative à la mise en place d'une structure allégée des prix des produits pétroliers et gaziers avant début janvier 2009, elle peut ne pas être perçue comme une bulle d'oxygène pour l'amélioration du pouvoir d'achat des citoyens démunis. 20% de la population démunie ne profitent que de 1% du budget des produits pétroliers. Mais il faut savoir que par rapport à la nouvelle structure des prix des carburants (de l'essence-super, du gasoil 350 et du fuel industriel s'entend), le gouvernement n'a pas augmenté le prix du gasoil utilisé pour le transport des marchandises pour éviter des augmentations des prix des produits alimentaires (légumes, fruits…) et du transport en commun. Aussi, le prix de la bonbonne de gaz n'a pas été modifié. Mais cela reste sans grand effet sur le pouvoir d'achat des ménages moyens qui ne consomment qu'une bouteille de gaz de 12 kg par mois. Pour Moulay Abdallah Alaoui, président de la fédération de l'énergie, il faut que l'Etat augmente de 10 DH la bonbonne de 12 kg. Cela permettra de faire des économies et n'aura pas d'impact visible sur le pouvoir d'achat de la population démunie. Les produits énergétiques ne devraient pas être perçus comme un coût social. Faut-il rappeler que le budget de subventions des produits pétroliers pour l'année 2008 constitue les deux tiers du budget global de la Caisse ? Par ailleurs, s'il y a une mesure susceptible d'améliorer ce pouvoir d'achat, c'est bien les subventions directes, sous forme d'allocations financières, qui seront allouées aux ménages les plus dépourvus suivant la carte de ciblage. Les couches les plus défavorisées identifiées se verront remettre en effet, selon un scénario prévisible, des allocations financières directes estimées à 500 DH par mois (6.000 DH/an) par famille, à charge pour elles d'assumer leurs responsabilités (scolarisation, vaccination des enfants). Même si ce n'est pas l'idéal, c'est un grand pas en avant qui allègera, tant soit peu, les charges des familles nécessiteuses qui supportent mal les augmentations des prix des produits de première nécessité. «Il n'y a pas de crise de la Caisse» L'enveloppe réservée à la compensation est devenue non maîtrisable. De 20 milliards de DH prévus dans la Loi de finances 2008, le budget de compensation frôlera, voire dépassera les 40 MMDH. La cause de cette situation qui échappe à tout contrôle, tant le gouvernement veut maintenir ses niveaux de compensation des matières premières de base et pétrolières, est la flambée des cours mondiaux de ces mêmes matières. L'autre cause est la mauvaise répartition des subventions, dans ce sens où elles profitaient et profitent toujours, en grande partie, à des couches loin d'être dans le besoin et majoritairement consommatrices, au grand dam des couches les plus vulnérables. Le dysfonctionnement majeur, handicapant, est lié au fait que le système de compensation est généralisé, profitant beaucoup plus aux classes aisées qu'à la population démunie. «D'ailleurs au sujet des dysfonctionnements, je voudrais apporter une précision. Il n'y a pas de crise de la Caisse de compensation. La caisse est un département administratif qui obéit aux procédures érigées par les ministères de l'Economie et des Finances et reçoit une dotation budgétaire chaque année pour affecter des subventions aux différents secteurs économiques notamment pétrolier. La caisse est un comptable qui répartit ce budget», dixit le président de la fédération de l'énergie. A l'origine de ces dysfonctionnements, l'analyse du HCP apporte des menus détails. Les 20% de ménages les plus aisés profitent de 40,2% de la subvention pour la farine nationale de blé tendre, de 41,2% de celle du sucre granulé et de 48% des subventions pour l'huile de table. Sur l'autre rive, les 20% de ménages les plus défavorisés, pour ces trois mêmes produits, profitent respectivement de 6,1%, 9,3% et 6,3% des montants des subventions allouées. Pour ce qui est des subventions à l'éducation-formation, les 20% les plus aisés bénéficient d'une part importante à tous les niveaux scolaires : 16,8% dans le primaire, 30,7% au collège, 48,1% dans le secondaire et 58,6% dans le supérieur. Pour les 20% les plus défavorisés, ces proportions sont respectivement de 19,1%, 9,6%, 4,8% et 3,2%. Un constat aberrant qui a précipité une rupture avec le passé, consommée dès aujourd'hui, en mettant en place une réforme dès ce 1er juillet 2008. Elle cible 3 objectifs : la maîtrise de l'enveloppe budgétaire, l'efficacité économique et l'équité, et le renforcement de la protection sociale. Une réforme à deux étages, deux vitesses. Le premier niveau porte sur l'optimisation du système de subvention des prix des produits de première nécessité et ce, pour maîtriser l'inflation et préserver ainsi le pouvoir d'achat de la classe moyenne. Le deuxième, lui, est inhérent au ciblage direct des démunis dans l'objectif de leur permettre de faire face aux augmentations des prix et aux aléas de la vie. Nouvelle structure des prix des carburants Concernant le gasoil, son prix n'a connu aucune augmentation au 1er juillet 2008 malgré une conjoncture marquée par la flambée des cours mondiaux du pétrole. Le gouvernement ayant continué à assumer la hausse de la facture sans procéder à une augmentation des prix à la pompe, vu que le gasoil est utilisé pour empêcher une augmentation des produits alimentaires et du prix du transport. Pour le reste, la nouvelle structure des prix au 1er juillet 2008 montre que l'augmentation des prix à la pompe concernant le gasoil 350, le super et le fuel industriel est respectivement de 1 DH/litre pour les deux premiers et 500 DH/tonne pour le dernier. A l'opposé, la subvention (en DH/l/t), toujours concernant les trois produits pétroliers, est respectivement de 2,9, 2,4 et 2116,17. Du 2 septembre 2006 au 13 janvier 2007, les prix de ces 3 produits ont connu une baisse entre 3 et 5,5%. Ces prix ont été revus à la hausse au 1er juillet 2008.