Après la confirmation de l'arrestation de Mohamed Boudrika en Allemagne, le Raja de Casablanca a pris la décision de tourner la page et d'aller de l'avant. L'affaire de Boudrika et avant lui celle de Said Naciri au Wydad de Casablanca relancent le débat sur le mariage sport-politique au Maroc. En application des statuts des associations sportives, le comité directeur du Raja a déclaré la vacation du poste de président et aussitôt désigné le premier vice-président Adil Hala pour gérer la période transitoire, dans l'attente de la tenue d'une assemblée générale extraordinaire pour élire un nouveau patron. Cette décision a momentanément dissipé les doutes sur l'avenir du champion en titre et rassuré partiellement les joueurs sur les engagements du club. Dans des échanges par visioconférence avec des cadres de l'équipe, le président intérimaire a promis, samedi 20 juillet, de verser «dans les deux prochains jours» les salaires et les primes en retard. Adil Hala a invité les joueurs «à se montrer compréhensifs quant aux contraintes du comité directeur et à ne pas résilier leurs contrats de manière unilatérale, surtout que l'équipe a besoin de leurs services». En effet, deux anciens joueurs, Bard Banoun et Issam Raki en l'occurrence, conduisent de bons offices pour parvenir à des compromis avec leurs anciens coéquipiers sur la question des arriérés et aussi pour les persuader de ne pas quitter le navire. Le bureau du procureur général de Hambourg, dans le nord de l'Allemagne, a confirmé, jeudi dernier, l'interpellation du président du Raja. «L'arrestation de Boudrika a eu lieu, mardi 16 juillet, à l'aéroport de Hambourg, à la demande des autorités marocaines. Actuellement, il est placé en détention provisoire, dans l'attente de son extradition», a relaté le ministère public, qui s'est refusé de fournir plus de détails sur les raisons de son arrestation. D'après plusieurs sources, Mohamed Boudrika aurait commis des infractions au Maroc en rapport avec ses projets immobiliers à Casablanca. Il aurait émis des chèques sans provision pour de grosses sommes d'argent, ce qui aurait amené ses créanciers à saisir la justice marocaine. D'autres sources parlent de sa présumée implication dans le scandale des billets de la Coupe du Monde, qui a défrayé la chronique en son temps. Le président de la FRMF, Fouzi Lekjaa, avait promis de faire toute la lumière sur cette question et de traduire devant la justice quiconque aurait trempé dans cette affaire. Les sagas judiciaires de Mohamed Boudrika et Said Naciri ne font que raviver le débat sur la probité et l'honnêteté des personnalités politiques et sportives, à la lumière des nombreux scandales impliquant des députés, des présidents de communes et des élus locaux. Dans une déclaration à Barlamane.com, l'analyste politique Mohamed Chakir a estimé que les doubles-casquettes «contribuent indéniablement à l'ancrage des pratiques frauduleuses dans les sphères politiques et sportives», relevant que «ce grave phénomène écorne l'image du Maroc, d'où la nécessité d'interdire aux dirigeants politiques et partisans de gérer les clubs sportifs». Cette situation est exploitée, dans certains cas, par des responsables sans scrupules pour exacerber les tensions et mobiliser les supporters, ce qui encourage le fanatisme parmi les supporters et concourt à la propagation de l'hooliganisme et de la violence, a-t-il fait remarquer. Le cumul de casquettes peut aussi avoir des conséquences néfastes sur les clubs sportifs, comme cela a été démontré dans les cas de Naciri, Boudrika et d'autres présidents, dont les errements ont terni la réputation des équipes, a poursuivi Mohamed Chaki, avant de lancer : «Il est grand temps de considérer le cumul de responsabilités sportives et politiques comme un cas d'incompatibilité».