L'UA a accordé la semaine dernière à Israël le statut d'observateur. Une victoire diplomatique pour l'Etat hébreu qui, selon les deux parties, devrait notamment permettre à Israël d'aider le continent à lutter contre la pandémie de Covid-19 et le terrorisme. Mais l'enjeu est tout autre : faire sortir les pays africains de l'ensemble des nations habituées à agir contre Israël dans les organisations internationales. L'attaque est d'une rare véhémence. Le vieux guerrier Ramtane Lamamra a affirmé, dans un entretien le 9 août, que «les déclarations [du président de la Commission de l'Union africaine] sont une tentative de se défendre, sans en mesurer les conséquences», notant que «ces positions peuvent conduire à la division de l'Union africaine.» Depuis que l'ambassadeur israélien Chad Aleli Admasu a présenté ses lettres de créance à Moussa Faki Mahamat, le 22 juillet, plusieurs membres de l'UA ont dénoncé une décision «unilatérale» dont l'Algérie, qui a condamné la décision d'accorder à Israël le statut d'observateur à l'organisation panafricaine. Alger est même accusée par certains membres de créer des oppositions d'intérêts, des rivalités, des différends, des luttes qui dégénèrent facilement en conflits au sein de l'UA. «La désapprobation algérienne aura-t-elle été une vaine manifestation de stérile sentimentalité ? Assurément. Il faut écarter les artifices de langage et les réserves mentales, sources souvent insignifiantes de froissements inutiles qui laissent des traces fâcheuses dans les dispositions réciproques des nations» a déclaré un diplomate éthiopien hostile aux menées algériennes. «Alger veut gagner par des empiétements le plus d'avantages possible au sein de l'UA, au lieu de se borner à bien mettre en lumière la vraie valeur et les intérêts communs» a-t-il pointé. S'il persiste à redire que «les modes de fonctionnement de l'Union africaine ne permettent aucune possibilité pour les 87 Etats observateurs extra-Africains d'influencer les positions de l'Organisation continentale, dont la détermination est la compétence exclusive de ses Etats membres», et à déplorer une «agitation médiatique autour de ce qui relève plus du "non-évènement"» Lamamra a tenté plusieurs vains essais pour empêcher qu'Israël jouisse du statut de membre observateur de l'organisation. «S'il ne néglige rien de ce qui peut faire valoir ses arguments, il ne dissimule non plus aucun de leurs faiblesses. Lamamra passe volontiers condamnation sur une décision qui le dépasse» a déclaré une source au sein de l'Union africaine. «Les questions de ce genre se résolvent généralement par une entente tacite ou un recours à la médiation. Les sympathies ou antipathies des Etats sont souvent établies sur des éléments qui ne procèdent pas de la stricte équité» a déclaré un poids lourd égyptien de l'UA. L'Etat israélien a réussi grâce à son lobbying sur le continent africain de gagner des débouchés commerciaux et de confirmer qu'il jouit du soutien dans les instances internationales. L'Algérie perd du terrain sur le plan africain. En 2016, malgré ses intrigues, Alger a échoue d'empêcher le Maroc à obtenir un siège au Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'UA, l'organe de règlement des conflits, dirigé depuis sa création par.. l'Algérie. Smaïl Chergui, l'indéboulonnable commissaire à la paix et à la sécurité de l'UA, n'a pu rien faire. Israël, pour rappel, avait participé à un mini-sommet africain sur la sécurité et la lutte contre le terrorisme en 2016. «Tous les pays africains peuvent bénéficier d'une coopération renforcée avec Israël. Israël revient en Afrique. Nous croyons en l'Afrique. Nous pensons que l'Afrique a un énorme potentiel. Nous voulons être partie prenante de votre succès», a renchéri l'ex-président du gouvernement israélien Netanyahou. M. Faki Mahamat a affirmé que la décision d'accréditation de l'Etat d'Israël auprès de l'organisation panafricaine relève de sa «totale compétence». «À la suite de la décision d'accréditation du représentant de l'Etat d'Israël auprès de l'Union africaine, le président de la Commission de l'Union africaine Moussa Faki Mahamat tient à rappeler que cette décision relève de sa totale compétence, sans être liée par une mesure préalable de procédure quelconque», a-t-on indiqué. Cette décision «a été prise sur la base du constat de la reconnaissance d'Israël et le rétablissement de relations diplomatiques avec lui par une majorité supérieure aux deux tiers des Etats membres de l'UA, et à la demande expresse d'un bon nombre de ceux-ci en ce sens», a-t-on détaillé. Israël a obtenu jeudi le statut d'observateur à l'UA, qu'il réclamait depuis des années, une percée majeure pour l'Etat hébreu. Israël, qui entretient des relations avec 46 pays africains sur 54, avait ce statut d'observateur au sein de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) jusqu'à sa transformation en Union africaine en 2002.