À un mois de l'entrée dans ses fonctions de Joe Biden, le président russe Vladimir Poutine a assuré ne rien attendre de la future administration américaine, qualifiée de «russophobe» par Moscou après des propos combatifs du locataire à venir de la Maison-Blanche. Joe Biden prendra les rênes de son pays à un moment où les relations entre les États-Unis et la Russie sont au plus bas depuis la fin de la Guerre froide entre désaccords persistants sur un nombre croissant de dossiers, accusations d'ingérence électorale, d'espionnage et plus récemment de cyberattaques. «Concernant la question du changement à la tête des États-Unis et (le fait) que ça puisse devenir plus difficile pour nous, je ne le crois pas, je crois que ce sera comme à l'accoutumée», a déclaré Vladimir Poutine au cours d'une réunion avec des responsables russes, appelant à continuer le développement des capacités économiques et militaires de la Russie pour faire face «aux difficultés et aux menaces». Plus tôt mercredi, le vice-ministre russe des Affaires étrangères chargé notamment des relations avec Washington, Sergueï Riabkov, avait assuré n'attendre «rien de bon» du futur président américain, estimant que beaucoup dans son entourage «ont fait leur carrière sur la russophobie, en déversant du fiel sur mon pays». Quelques heures auparavant, Joe Biden avait promis de répondre à la gigantesque cyberattaque attribuée à la Russie qui a visé les États-Unis. «Quand j'aurai été informé de l'étendue des dégâts et de l'identité des responsables, ils peuvent être sûrs que nous répondrons», a-t-il menacé. Joe Biden a aussi reproché à Donald Trump de minimiser le rôle supposé de la Russie, alors que des membres de son administration dénonçaient la responsabilité de Moscou dans les attaques ayant visé des services fédéraux aux États-Unis. Washington a pris de multiples sanctions contre la Russie, notamment du fait de piratages informatiques et d'accusations d'ingérence dans la présidentielle de 2016. Le camp démocrate de Joe Biden estime que Moscou a tout fait pour faire élire M. Trump et accusé son entourage de collusion avec les Russes. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a quant à lui promis mercredi une «réplique» à de récentes mesures américaines visant des entreprises russes mais aussi chinoises. Iran et désarmement Ces derniers échanges d'amabilités interviennent alors que diplomates russes et américains ont moult dossiers à régler sitôt que M. Biden aura pris ses fonctions, le 20 janvier. En haut de la liste, la prolongation ou non du traité de désarmement New Start qui expire en février, le dernier grand accord régissant une partie des arsenaux nucléaires des deux grands rivaux géopolitiques que sont la Russie et les États-Unis. Autre sujet, le sauvetage de l'accord sur le nucléaire iranien. Les signataires comptent sur Joe Biden pour revenir à ce texte, après tous les efforts de l'administration Trump en vue d'y mettre fin. Et il s'agit de faire vite, à l'heure ou Téhéran s'éloigne de plus en plus de ses engagements. Pour M. Riabkov, la Russie doit avoir un «dialogue sélectif» avec les États-Unis, en ciblant uniquement les «sujets qui nous intéressent». Et l'Iran et New Start font partie des priorités affichées des Russes. «Endiguement total» Pour le reste, il juge nécessaire une politique d'«endiguement total des États-Unis». Vladimir Poutine avait déjà laissé entendre que le changement de locataire de la Maison-Blanche ne laissait pas présager d'une détente. Il a été l'un des rares dirigeants au monde à avoir attendu le vote du collège électoral américain du 14 décembre pour féliciter le président élu, soit six semaines après le scrutin, arguant du refus de Donald Trump de reconnaître sa défaite. Si la semaine passée, pendant sa grande conférence de presse annuelle, M. Poutine a dit espérer pouvoir régler avec la nouvelle administration «au moins une partie des problèmes» entre les deux pays, il a rapidement repris sa rhétorique habituelle. Il a ainsi vilipendé ses rivaux occidentaux, Américains en tête, fustigeant leur «agressivité» à l'égard d'une Russie «câline» en comparaison. «Qui est « doux et câlin » et qui est agressif ?» a-t-il martelé, reprenant les mots d'une question d'un journaliste, «par rapport à vous (les Occidentaux, NDLR), oui, nous sommes « doux et câlins »».