Le ministre espagnol de l'Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, arrive au Maroc ce vendredi au plus fort de la crise migratoire aux Canaries, où il y a eu cette année 18 000 arrivées irrégulières d'émigrants, dont la moitié seulement le mois dernier, annonce l'agence EFE. Drogue, migration et relations bilatérales figureraient au centre des entretiens qui seront menés vendredi 20 novembre par le ministre espagnol de l'Intérieur Fernando Grande-Marlaska pour sa visite au Maroc, la deuxième après celle effectuée en février. «Bien que le gouvernement espagnol ne donne pas de détails sur la nationalité des arrivants, les autorités espagnoles estiment que la moitié d'entre eux sont marocains. La visite de M. Marlaska est donc considérée comme une tentative de s'entendre avec Rabat sur de nouveaux mécanismes de rapatriement pour leurs ressortissants et d'étudier comment renforcer le contrôle marocain des côtes atlantiques» indique EFE. La pression migratoire, traditionnellement concentrée sur les côtes du détroit et de la Méditerranée, «s'est déplacée vers les côtes du sud du Maroc, et notamment le Sahara, où à la fois les candidats à l'émigration et les mafias qui déménager», selon des experts. Des sources de la ville de Tanger, «point de départ commun pour l'émigration», ont déclaré à EFE que les Africains subsahariens qui étaient concentrés dans des quartiers comme Boukhalef ou Moghogha, ont disparu et se sont déplacés vers les villes de Laâyoune et de Dakhla «en attendant de trouver une occasion de gagner l'Europe». «La même démarche a été prise par les nombreux Marocains, généralement très jeunes (entre 15 et 25 ans) qui quittent leurs foyers une année où la sécheresse et l'effondrement économique de la pandémie se sont conjugués, notamment chez les petits ouvriers agricoles» continue EFE. Le gouvernement marocain estime que le taux de chômage pourrait augmenter de quatre points de pourcentage cette année, à 13% de la population, avec un effet particulier sur les jeunes de 15 à 30 ans, qui représentent traditionnellement les deux tiers du total des chômeurs. Les mesures de confinement rigoureuses décrétées au Maroc contre le coronavirus entre avril et juin ont entraîné une baisse drastique de la sortie des bateaux vers l'Espagne, mais au moment où les restrictions ont été levées, à partir de l'été, ces sorties ont grimpé en flèche. «Il y a un détail qui rend le contrôle migratoire plus difficile: les puissants zodiacs ne sont quasiment plus utilisés pour naviguer sur la mer, mais les filets migrateurs préfèrent les bateaux en bois utilisés par les pêcheurs, qui peuvent passer plus inaperçus. Il en va de même pour les cayucos arrivés aux Canaries en provenance du Sénégal: ce sont des bateaux de pêche qui sont jetés à la mer avec une apparente normalité» a-t-on détaillé. Avec la Mauritanie – un autre pays de départ sur la «route des Canaries» – l'Espagne dispose d'un mécanisme bien «huilé» pour les vols de rapatriement: «quand on considère qu'un émigrant irrégulier est arrivé aux Canaries depuis la côte mauritanienne, le pays du Maghreb s'engage à les récupérer sur les vols de rapatriement» a-t-on énoncé. Grâce à ce mécanisme, quatre avions sont partis pour la Mauritanie depuis les aéroports des îles Canaries avant la pandémie (avec 162 migrants à bord) et un cinquième le mois dernier. Immédiatement après le débarquement, ils ont tous été expulsés de Mauritanie vers le Sénégal et le Mali, principaux points d'origine. De son côté, le Maroc procède également à des rapatriements avec différents pays subsahariens: entre septembre et novembre, au moins six avions ont décollé des aéroports marocains vers le Sénégal, le Mali et la Guinée Conakry, les plus grands pays émetteurs d'émigration irrégulière. Ces vols sont généralement convenus avec les pays d'origine des émigrants, selon des sources diplomatiques marocaines, qui les qualifient de «rapatriements humanitaires», bien qu'ils ne soient pas effectués en coordination avec les agences onusiennes présentes au Maroc Le Maroc se targue d'être l'un des rares pays africains à avoir une stratégie d'émigration qui a permis à quelque 50 000 personnes d'être régularisées, mais la double crise de la sécheresse et de la pandémie a porté un coup sévère à l'économie informelle, pourvoyeuse d'emplois pour cette catégorie.